Question de Mme BRULIN Céline (Seine-Maritime - CRCE) publiée le 22/10/2020

Mme Céline Brulin attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports sur la situation des liaisons maritimes entre la France et le Royaume-Uni, durement impactées par la crise sanitaire. Confinement, quatorzaine, limitation des déplacements, incertitude du Brexit, etc. ont fait chuter la fréquentation des ferries de 60 à 80 % s'agissant des passagers et de plus de 20 % pour le fret. Conséquence directe, les compagnies assurant ces liaisons transmanche sont en grande difficulté que ce soit, de Dunkerque à Roscoff en passant pas Calais, Dieppe, Le Havre, Caen-Ouistreham, Cherbourg, Saint- Malo. Certes, les mesures de chômage partiel et d'accès aux prêts garantis par l'État ont constitué un premier amortisseur. Mais en s'associant, les régions Normandie et Bretagne, ont apporté 85 millions d'euros alors que l'État n'y mettait que 15 millions d'euros. Si cela permet de maintenir à minima les emplois dans le cadre d'une activité réduite, la pérennité des compagnies sur le long terme, est plus que menacée. Les élus seino-marins se mobilisent pour demander le déploiement d'un plan ferry pour permettre le maintien de cette activité en donnant aux compagnies les moyens de traverser la crise, à l'image de l'engagement du Gouvernement en faveur des entreprises. Les collectivités locales concernées s'impliquent particulièrement sur ce sujet, conscientes de l'importance de cette activité pour leur territoire. C'est le cas par exemple à Dieppe, avec une délégation de service public entre le département et la compagnie Transmancheferries. En lui rappelant que les liaisons transmanche rapportent 1,5 milliards d'euros en dépenses touristiques pour 5 000 emplois directs, elle lui demande de préciser les intentions du Gouvernement pour assurer le maintien de ces liaisons, la sauvegarde des emplois et le développement du savoir-faire hexagonal maritime.

- page 4764


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité publiée le 02/12/2020

Réponse apportée en séance publique le 01/12/2020

Mme le président. La parole est à Mme Céline Brulin, auteure de la question n° 1321, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.

Mme Céline Brulin. Madame la secrétaire d'État, crise sanitaire, quatorzaine imposée unilatéralement par la Grande-Bretagne, Brexit : la filière transmanche subit une baisse de trafic considérable. Quelque 5 000 salariés et, plus largement, 12 500 emplois indirects sont en jeu.

Le Premier ministre, interpellé par une cinquantaine de parlementaires, a accepté que le bénéfice de l'activité partielle soit ouvert à cette filière et que les cotisations sociales pour 2021 soient remboursées aux compagnies, mais hélas pas à toutes. Les compagnies qui opèrent en délégation de service public, sur la ligne Dieppe-Newhaven par exemple, en sont exclues. Cela crée une inexplicable distorsion de concurrence.

Je rappelle que les deux ferries de Dieppe enregistrent une baisse de deux tiers du trafic de passagers. L'opérateur évoque des suppressions d'emplois via des départs volontaires. Le directeur de la ligne et l'ensemble des élus locaux demandent l'appui de tous.

L'avenir du trafic transmanche est important pour les régions concernées, en premier lieu la Normandie. La ligne Dieppe-Newhaven est empruntée chaque année par 400 000 passagers ; l'ensemble des lignes normandes le sont par 2 millions de passagers. Le trafic transmanche a des retombées très importantes en matière de fret, mais également en matière de tourisme, et ce dans toute la France. La moitié des dépenses effectuées en France par les Britanniques est liée aux passages transmanche.

Il est donc nécessaire de mettre en œuvre un plan « ferry » qui aille au-delà des premières mesures évoquées. L'État doit s'engager davantage, y compris en obtenant des fonds européens, en travaillant au développement des rotations, en faisant la promotion de ces liaisons maritimes et, bien sûr, en accompagnant les collectivités locales dans le financement de ce service.

Madame la secrétaire d'État, le Gouvernement sera-t-il au rendez-vous ?

Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice Brulin, si les entreprises de transport maritime ont été touchées par cette crise, et cela de manière hétérogène, le transport maritime sur la Manche a été fortement affecté, notamment celui qui est opéré sous pavillon français par Brittany Ferries et DFDS.

Au printemps dernier, ces lignes de ferry ont connu des baisses de fréquentation pouvant aller jusqu'à 80 % et des pertes de chiffre d'affaires de l'ordre de 75 % – ce qui est absolument colossal – par rapport à 2019.

En outre, comme vous l'avez souligné, la décision britannique d'instaurer une quatorzaine en plein mois d'août à toute personne entrant au Royaume-Uni n'a pas permis à ces armateurs de réaliser une saison estivale satisfaisante.

Le Gouvernement a porté dès le début de la crise une attention toute particulière aux compagnies de transport de passagers, notamment en mettant en place puis en prolongeant des aides d'urgence en faveur de certains secteurs comme le transmanche. Certains armateurs ont bénéficié de prêts de trésorerie garantis par l'État, les PGE. De plus, nous sommes intervenus auprès des gouvernements britannique et irlandais pour qu'ils facilitent également de leur côté la mise en place de soutiens financiers à ces compagnies.

Par ailleurs, depuis le printemps, un dispositif d'activité partielle de longue durée a été mis en place afin d'assurer le maintien de l'emploi dans les entreprises confrontées à une réduction d'activité durable ; mais il n'est pas de nature à compromettre leur pérennité. Des échanges avec les organisations syndicales sont nécessaires, mais cette mesure pourrait trouver à s'appliquer aux ferries en fonction de la tendance de reprise.

Enfin, à la suite de nombreux échanges avec les armateurs, le Premier ministre a annoncé en septembre dernier le principe du remboursement pour une durée d'un an des cotisations sociales des salariés. Cet effort, d'un montant estimé entre 24 millions et 30 millions d'euros pour l'ensemble des compagnies de ferry actives sur les liaisons internationales hors délégation de service public, a été inscrit dans le quatrième projet de loi de finances rectificative.

Ce soutien en subventions s'ajoute au soutien sous la forme d'avances remboursables de la part des régions Bretagne et Normandie – dont nous saluons l'engagement –, qui interviennent en tant qu'actionnaires des sociétés d'économie mixte.

Comme vous pouvez le constater, madame la sénatrice, s'il n'en porte pas le nom, l'ensemble de ces dispositifs constitue bel et bien un plan de soutien inédit en faveur des acteurs du ferry. Soyez assurée que nous soutenons pleinement ces opérateurs transmanche.

Mme le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.

Mme Céline Brulin. Nous dressons le même constat, madame la secrétaire d'État, mais maintenant il faut aller au-delà de ce constat et des premières mesures, dont nous ne contestons pas l'existence, mais qui s'avèrent insuffisantes pour répondre à la crise de trafic très importante que vous avez vous-même évoquée.

Par ailleurs, vous n'avez pas répondu à ma question relative aux lignes faisant l'objet d'une délégation de service public, qui ne sont absolument pas soutenues. Il faut venir en aide aux collectivités locales qui en assurent le financement pour garantir l'avenir de ces lignes.

L'avenir d'un modèle exceptionnel, celui du pavillon français, est en jeu. Il ne faudrait pas qu'il disparaisse !

- page 10736

Page mise à jour le