Question de M. FOLLIOT Philippe (Tarn - UC) publiée le 29/10/2020

Question posée en séance publique le 28/10/2020

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Philippe Folliot. Madame la ministre de la défense, depuis quelques mois, la multiplication de comportements inamicaux, voire agressifs de la Turquie envers ses alliés de l'OTAN en général et de la France en particulier pose un grave problème.

L'incident avec la frégate Courbet, au mépris des règles de l'Alliance, les explorations sauvages en Méditerranée orientale, au mépris du droit de la mer, la livraison d'armes à la Libye, au mépris de l'embargo décidé par l'ONU, l'intervention au Haut-Karabakh, au mépris des équilibres régionaux, et, pour finir, les insultes contre le président Macron, au mépris des usages diplomatiques les plus élémentaires : tout cela fait beaucoup, tout cela est trop !

Le peuple turc ne saurait être assimilé aux outrances d'un président confronté à une contestation populaire majeure, les lourdes défaites électorales récentes agitant, avec l'énergie du désespoir, un islamisme conservateur et agressif.

Un des symboles en est le sabordage de l'héritage du moderniste et visionnaire Mustafa Kemal, dit « Atatürk », notamment au travers de la transformation de Sainte-Sophie de musée en mosquée.

Nous avons régulièrement abordé ces questions et ces différends au sein de l'assemblée parlementaire de l'OTAN, en relevant notamment que le président turc ne se comportait pas comme un allié respectueux de nombre de principes démocratiques et ignorait les articles fondateurs 4 et 5 du traité de l'Alliance.

Quelle réponse apportez-vous au décalage entre les actes du président populiste Erdogan et les obligations qui lui incombent en tant qu'allié de la France au sein de l'OTAN ? Madame la ministre, selon vous, la Turquie peut-elle et doit-elle rester dans l'OTAN ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)


Réponse du Ministère des armées publiée le 29/10/2020

Réponse apportée en séance publique le 28/10/2020

M. le président. La parole est à Mme la ministre des armées.

Mme Florence Parly, ministre des armées. Monsieur le sénateur, la Turquie a adhéré à l'OTAN en 1952 et a apporté, pendant de nombreuses années, sa contribution à la sécurité euro-atlantique.

Nous avons pu avoir des différends avec d'autres alliés par le passé, mais aucun n'a jamais porté atteinte à la cohésion de l'Alliance. Et le fait même que la Grèce et la Turquie appartiennent à la même alliance a pu contribuer à apaiser certaines tensions entre ces deux pays.

Mais, depuis quelques mois, nous assistons à une situation tout à fait inédite où la Turquie pratique la politique du fait accompli et adopte une attitude décomplexée au mépris, comme vous l'avez souligné, de bon nombre des intérêts de sécurité de ses alliés et au risque de l'escalade.

Je ne reprendrai pas tous les exemples que vous avez cités, mais je pense notamment à la situation en Méditerranée orientale ou à l'envoi de mercenaires dans le Haut-Karabakh.

Par ailleurs, cette attitude se double des outrances verbales parfaitement inadmissibles des dirigeants turcs qui ont conduit le ministre de l'Europe et des affaires étrangères à rappeler l'ambassadeur de France en Turquie pour consultation.

Le constat que je dresse est celui d'un allié qui ne se comporte pas en allié. Face à cette situation, il n'est qu'une seule attitude possible : rappeler à la Turquie les obligations qui s'imposent à elle en tant qu'alliée.

C'est ce que j'ai fait en juin dernier, lors des incidents avec notre frégate Courbet. C'est ce que j'ai refait la semaine dernière, devant mes collègues de l'OTAN, lors d'une réunion des ministres de la défense, en rappelant que la France serait intraitable face à toute violation du droit international ou à toute remise en cause de la solidarité européenne.

Comme l'a souligné M. Clément Beaune, bon nombre de pays – européens ou non, comme les États-Unis, par exemple – ont condamné publiquement les agissements de la Turquie. Mais au-delà de ces dénonciations, il faut agir. C'est ce que nous faisons, notamment dans le cadre de l'opération Irini, où nous adoptons une posture à la fois de vigilance et de fermeté. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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