Question de M. BONNE Bernard (Loire - Les Républicains) publiée le 15/10/2020

M. Bernard Bonne rappelle à M. le ministre de l'intérieur les termes de sa question n°17441 posée le 30/07/2020 sous le titre : " Contraintes d'ordre réglementaire pour les armuriers ", qui n'a pas obtenu de réponse à ce jour.

Il lui fait observer que plus de deux mois se sont écoulés depuis le dépôt de cette question. Cette durée est en totale contradiction avec le Règlement du Sénat et avec la circulaire n° 5623/SG du 12 décembre 2012 relative aux relations avec les parlementaires dans laquelle le Premier ministre souligne que les questions écrites « constituent une modalité importante de l'exercice par le Parlement du contrôle de l'activité gouvernementale » et que les délais de réponse, un mois éventuellement prolongé d'un mois supplémentaire, « doivent être strictement respectés ».

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 03/12/2020

La réglementation relative aux armes a fait l'objet d'importantes réformes avec la transposition de la directive européenne 2017/853 du 17 mai 2017 modifiant la directive 91/477/CEE du 18 juin 1991 relative au contrôle de l'acquisition et de la détention d'armes. En particulier, la dernière étape de la transposition de cette directive européenne s'est traduite par la publication des décrets n° 2020-486 et n° 2020-487 du 28 avril 2020, contribuant ainsi à la création d'un nouvel outil de traitement des données à caractère personnel dénommé « système d'information sur les armes » (SIA) et à l'application de nouvelles règles de marquage des armes à feu. Ces réformes suscitent certaines inquiétudes chez les professionnels du secteur. Le SIA conjugue l'exigence juridique de traçabilité des armes, les impératifs de sécurité publique et la nécessité de simplification des démarches administratives. La traçabilité des armes tout au long de leur vie (de leur apparition sur le territoire - fabrication, importation - à leur sortie - destruction, exportation) en constitue l'axe fondateur. Pour ce faire, les professionnels (fabricants, importateurs et armuriers détaillants) disposeront dans le SIA d'outils dématérialisés (tel que le livre de police numérique) qui leur permettront d'enregistrer en ligne les données indispensables au contrôle, en temps réel, des transactions d'armes. Le SIA est déployé progressivement depuis le mois de janvier 2020. Sa première « brique », le référentiel général des armes (répertoire numérique de toutes les armes circulant en France comportant actuellement environ 40 000 fiches, avec leur classement) est disponible pour les professionnels des armes depuis le 1er janvier 2020. Le portail dédié aux professionnels incluant le livre de police numérique sera déployé à partir du 1er octobre 2020. Il remplacera le registre spécial papier dans lequel sont enregistrées toutes les transactions d'armes assemblées. À partir de cette date, les armuriers devront créer un compte professionnel individualisé dans ce système d'information. Il convient de préciser que le calendrier du SIA est juridiquement encadré par un arrêté ministériel du 28 avril 2020 pris en application d'un décret du même jour, qui retient comme date butoir à cette mise en œuvre opérationnelle le 31 décembre 2020. Le choix a été fait de fixer cette date au 1er octobre 2020. C'est à cette date que le nouveau livre de police numérique (LPN) se substitue aux « registres spéciaux » sous format papier. Il est utile de préciser que les fonctionnalités du LPN et ses conditions de « communication » avec les systèmes d'information des distributeurs ont fait l'objet de nombreux échanges entre le ministère de l'intérieur et les professionnels depuis le début 2018. Sa mise en service opérationnel n'est donc pas une surprise pour eux. Par ailleurs, le LPN n'impose aux professionnels aucune autre obligation concernant l'inscription des transactions d'armes que celles qu'ils doivent déjà respecter dans les « registres spéciaux » actuels. Il n'impose donc aucune tâche nouvelle aux professionnels, en lieu et place de l'administration ou des particuliers. Attentif à ce que les activités commerciales ne soient pas empêchées ou retardées dans les premiers temps du déploiement de ce nouvel outil informatique de traçabilité des armes, le ministre de l'intérieur a pris la décision d'aménager une période de transition pendant laquelle l'usage du LPN ne sera pas une obligation pour les professionnels. Ceux-ci pourront continuer d'utiliser l'actuel « registre spécial ». Cependant, cette période de tolérance ne pourra pas aller au-delà du 31 décembre 2020, pour des raisons tenant tant au respect de nos engagements européens qu'à l'objectif de renforcement du contrôle de la circulation des armes sur le territoire national. Enfin, les armuriers n'ont pas l'obligation, pour le seul accès au « portail professionnel », de procéder à des investissements informatiques dédiés (achat d'ordinateurs ou de logiciels). Ils consultent obligatoirement le fichier de données à caractère personnel relatif aux personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes avant toute cession. Tous les armuriers sont donc nécessairement équipés à cette fin. Fonctionnellement, le LPN n'exige donc qu'un ordinateur domestique et un navigateur grand public. S'agissant du marquage physique des armes à feu, il est prévu par la directive d'exécution 2019/68 du 16 janvier 2019 établissant des spécifications techniques relatives au marquage des armes à feu et de leurs parties essentielles. Elle établit des règles relatives au marquage, en fixant une taille minimale de police, en prévoyant le choix, par chaque Etat membre, d'un alphabet et d'un système numéral et en déterminant les conditions de marquage des armes fabriquées en matériaux non métalliques. La France a transposé cette directive d'exécution par l'arrêté du 28 avril 2020, publié le 29 avril 2020, applicable à compter du 30 avril 2020. Certes, cette directive européenne n'harmonise que partiellement les règles applicables aux armes à feu, de sorte que des divergences peuvent continuer à exister entre Etats membres, mais elle a précisément pour objet de fixer des règles minimales communes en matière de marquage qui étaient jusqu'alors inexistantes. Le Gouvernement a transposé cette directive d'exécution 2019/68 en droit national sans durcir les conditions de marquage, tout en associant et en informant les professionnels du secteur à chaque étape de la transposition. En tout état de cause, la cour de justice de l'Union européenne (CJUE) considère que les différences subsistantes de réglementations nationales ne peuvent en principe pas conduire les Etats membres à faire obstacle à la libre circulation des marchandises (CJUE, 16 décembre 2008, Lodewijk Gysbrechts, n° 205/07, points 34 et 35). Ainsi, il est de principe qu'un Etat membre ne pourrait refuser l'entrée et la commercialisation sur son territoire d'armes ne répondant pas à sa réglementation nationale de marquage sauf à justifier que ce refus est fondé sur des exigences impérieuses d'intérêt général et que cette mesure est nécessaire et proportionnée (CJUE, 20 février 1979, Rewe-Zentral, dit « Cassis de Dijon », n° 120-78). Toutefois, il est exact que l'application intra-européenne de cette directive peut soulever des difficultés, notamment par rapport aux États qui ne l'ont pas encore transposée. C'est pourquoi la France a demandé l'inscription de cette thématique à l'ordre du jour des prochaines réunions sur les armes organisées par la commission européenne, qui doit faire le bilan de l'application de la directive de 2017 et de ses directives d'exécution, le cas échéant pour adapter la législation européenne.

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