Question de M. HAYE Ludovic (Haut-Rhin - RDPI) publiée le 19/11/2020

Question posée en séance publique le 18/11/2020

M. Ludovic Haye. Madame la ministre du travail, le télétravail s'est invité dans nos vies, notamment en raison de la crise sanitaire. Il est, actuellement, la solution la plus efficace pour résoudre la difficile équation de maintenir une activité économique et professionnelle tout en limitant les contacts entre citoyens.

Ce passage contraint et massif au télétravail ne doit toutefois pas servir de référence à une diffusion plus large de ce mode de travail. Le télétravail en situation de crise n'est pas représentatif d'un télétravail efficace et équilibré. Comme tous les modes d'organisation, il doit être pensé et structuré, requérant en outre une formation préalable, des outils adaptés, un partage de l'information à l'abri des menaces cyber, une réduction de la fracture numérique entre les territoires et de nouveaux processus dématérialisés.

Le télétravail présente, à première vue, de nombreux avantages : sur le plan environnemental, en limitant les transports ; sur le plan territorial, en désengorgeant les métropoles et en libérant des surfaces ; sur le plan personnel, en apportant flexibilité dans la vie de nos concitoyens. Apparaissant, de prime abord, comme une petite révolution, il est avant tout une adaptation à une société qui évolue sans pour autant annihiler les bénéfices indiscutables d'un lien social, qui reste plus que jamais essentiel.

Pour cela, il faudra veiller à une forme de justice dans son application, tous les métiers n'y étant pas éligibles et tous nos concitoyens n'étant pas égaux devant les compétences spécifiques qu'il requiert. Nous devons travailler, dès aujourd'hui, à l'articulation optimale entre télétravail et présentiel, en considérant le premier de manière qualitative plutôt que quantitative.

En outre, il nous faut dès à présent travailler sur les effets collatéraux du télétravail : droit à la déconnexion, à la prévention des conduites addictives et des traumatismes psychologiques.

Au vu des nombreux enjeux de cette nouvelle pratique, n'est-il pas opportun, madame la ministre, de prévoir une grande réflexion autour de ce sujet majeur ? Quelle stratégie le Gouvernement souhaite-t-il mettre en œuvre concrètement, afin de permettre à nos dirigeants comme à nos salariés d'appréhender ce virage sociétal avec succès ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)


Réponse du Ministère du travail, de l'emploi et de l'insertion publiée le 19/11/2020

Réponse apportée en séance publique le 18/11/2020

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion. Monsieur le sénateur Ludovic Haye, comme vous l'avez rappelé, la situation n'est pas la même qu'au printemps. En mars, nous avions demandé aux Français de rester chez eux et de faire ce qu'ils pouvaient en télétravail. De fait, une partie importante de notre activité économique s'était arrêtée.

Cette fois, nous avons voulu maintenir l'activité économique tout en posant des règles exigeantes en matière de télétravail. Cela fait maintenant deux semaines que ces règles s'appliquent. L'enquête que nous avons menée début novembre nous montre que, dans leur très grande majorité, les employeurs et les salariés jouent le jeu ; je les en remercie.

Premier enseignement : cette enquête confirme que tous les salariés ne peuvent pas télétravailler ; un tiers d'entre eux peut le faire facilement, mais plus d'un tiers est sur un poste qui n'est pas du tout télétravaillable.

Deuxième enseignement : l'enquête nous montre en outre que la très grande majorité de ceux qui peuvent télétravailler l'ont fait, et ils l'ont fait davantage que la semaine précédente.

Troisième enseignement : le télétravail cinq jours sur cinq représente un véritable effort pour les salariés, qui peuvent parfois souffrir d'isolement. C'est le cas pour quatre salariés sur dix. Dans les grandes entreprises, il existe des cellules d'accompagnement psychologique. Nous avons donc mis en place, pour les petites, un service d'assistance et de conseil, accessible par le numéro vert covid.

Au-delà, nous devons tirer tous les enseignements de cette expérience, pour que le télétravail joue pleinement son rôle, au cours des prochaines semaines et des prochains mois, dans la lutte contre le virus.

Enfin, il s'agit d'inscrire le télétravail comme une pratique durable, dans de bonnes conditions, pour les employeurs et pour les salariés.

C'est précisément le sens de la concertation engagée entre les partenaires sociaux en vue d'un accord national interprofessionnel. Nous souhaitons tous, me semble-t-il, que cette concertation puisse aboutir rapidement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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