Question de M. BLANC Jean-Baptiste (Vaucluse - Les Républicains) publiée le 24/12/2020

M. Jean-Baptiste Blanc attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'approbation au niveau européen du phosmet, qui arrive à expiration le 31 juillet 2021 et dont le processus de renouvellement est en cours.

Le phosmet ne fait pas partie des molécules les plus préoccupantes selon l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES, avis du 10 avril 2020). Il ne possède pas de critères d'exclusion immédiate du marché et n'est pas candidat à substitution au regard du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil. Enfin, il n'est pas non plus un perturbateur endocrinien.

Mais il reste surtout, depuis le retrait du diméthoate, le seul moyen de lutte contre la drosophila suzukii si ravageuse sur les vergers de cerises en Vaucluse.

En cas de retrait, les conséquences économiques et sociales sur les exploitations pourraient être dramatiques. Toutes les filières de colza, moutarde, olive et cerise seraient fragilisées, ce qui entraînerait une augmentation des importations.

Même si ces filières sont d'ores et déjà en mouvement vers une démarche vertueuse en matière environnementale, il est indispensable de permettre aux producteurs de poursuivre la culture avec les outils existants dont la protection phytosanitaire en attendant la disponibilités de nouvelles méthodes telles que les filets « insect proof » ou la technique d'insectes stériles.

En conséquence, il souhaite savoir si la France va soutenir son agriculture et se prononcer favorablement au renouvellement du phosmet.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 10/03/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/03/2021

Mme le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, auteur de la question n° 1440, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Jean-Baptiste Blanc. Monsieur le ministre, l'approbation, à l'échelon européen, du phosmet arrive à expiration le 31 juillet 2021. Le processus de renouvellement de l'homologation de ce produit est en cours, mais il semble que nos partenaires européens y soient plutôt opposés ; vous nous le direz…

Si tel était le cas, cela poserait de grandes difficultés, du point de vue de la souveraineté alimentaire, à la filière du colza, mais pas seulement, car cet insecticide est aussi, depuis le retrait du diméthoate, le seul moyen de lutte contre la Drosophila suzukii, si ravageuse pour tous les fruits à chair tendre, dont les cerises de Vaucluse, département dont je suis élu.

Avec près de 4 000 hectares plantés et une récolte annuelle de 15 000 à 20 000 tonnes, le Vaucluse est le premier producteur français de cerises ; nos arboriculteurs sont aujourd'hui très inquiets. En effet, même si ces filières sont d'ores et déjà en mouvement vers une démarche vertueuse en matière environnementale, il est indispensable de permettre aux producteurs de poursuivre leur culture avec les outils existants, dont fait partie la protection phytosanitaire, en attendant la disponibilité de nouvelles méthodes, telles que les filets dits « insect proof » ou la technique d'insectes stériles.

Certes, ces filets sont inscrits parmi les aides aux exploitations dans le plan de relance, mais le taux de financement n'encourage pas les producteurs à investir. En ce qui concerne l'introduction de drosophiles stériles, force est de constater que cette technique est prometteuse, mais nous n'en sommes qu'au stade des essais en milieu confiné, bien loin des essais en plein champ.

Monsieur le ministre, si cet insecticide venait à être interdit dans les mois à venir, les arboriculteurs de mon département seraient confrontés à la problématique des impasses techniques : on interdit un produit sans que d'autres solutions existent. Or, à plusieurs reprises, le Gouvernement a rappelé qu'il ne laisserait pas les agriculteurs dans une impasse technique ou économique si les options de remplacement non chimiques faisaient défaut.

Aussi, monsieur le ministre, quels moyens le Gouvernement entend-il mobiliser pour obtenir de nos partenaires européens une homologation du phosmet, en attendant une alternative, pour sauver nos cultures de colza, d'olive, de moutarde et de cerise ?

Mme le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Blanc, vous l'avez très bien dit, le phosmet est un sujet européen. Pour être totalement clair avec vous, il y a un très, très large consensus européen pour ne pas renouveler l'homologation de ce produit.

Cela pose un certain nombre de questions pour l'arboriculture, mais également – vous l'avez mentionn頖 pour le colza, puisque, au même moment, l'Europe devient importatrice nette de colza et de soja, issus notamment du continent sud-américain, où les pratiques culturales ne sont en rien comparables à celles qui sont autorisées en Europe ; mais c'est ainsi, la discussion relève de la compétence européenne.

Toutefois, ce que la France a demandé, à cet échelon, c'est un « délai de grâce », comme on dit dans ces instances, qui permette à la filière de s'adapter ; nous n'avons pas encore de réponse sur la durée de ce délai de grâce.

Troisième point que je voulais aborder : la question des substitutions. Vous avez évoqué le rôle du plan de relance pour un certain nombre de dispositifs et je vous en remercie. Nous sommes également en train de travailler ardemment avec la profession sur d'autres intrants qui pourraient être utilisés et qui n'ont pas les mêmes caractéristiques que le phosmet, auquel ils pourraient se substituer, en tout cas pour un certain nombre de cultures.

Ainsi, nous sommes confrontés à un sujet évidemment complexe, il ne faut pas le nier, et traité à l'échelon européen ; la France n'est donc pas « souveraine » sur ce sujet.

Mon approche consiste à « pousser » sur le délai de grâce, mais je ne sais de combien de temps il sera, et de mettre tout en œuvre pour trouver des solutions de remplacement. Vous l'avez indiqué, et je crois l'avoir montré depuis que je suis ministre, c'est-à-dire depuis un peu moins d'un an, mon objectif consiste chaque fois à mener les transitions sans laisser personne sans solution, surtout si la solution consiste à importer d'Amérique du Sud.

Mme le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour la réplique.

M. Jean-Baptiste Blanc. En attendant ces techniques de substitution, monsieur le ministre – nous le savons, vous suivez tout cela de très près –, ce délai de grâce serait une chance pour nos producteurs. Donc, de grâce, obtenez ce délai de grâce ! (Sourires.)

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