Question de M. KAROUTCHI Roger (Hauts-de-Seine - Les Républicains) publiée le 10/12/2020

Question posée en séance publique le 09/12/2020

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Roger Karoutchi. Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : quelle conception le Gouvernement a-t-il de l'unité de la Nation dans notre République indivisible ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Marques de surprise sur de nombreuses travées.)


Réponse du Premier ministre publiée le 10/12/2020

Réponse apportée en séance publique le 09/12/2020

Mme la présidente. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Roger Karoutchi, voilà une question courte qui, si j'osais, pourrait donner lieu à une réponse de quarante-cinq minutes, voire de deux heures, tant elle est fondatrice et importante !

M. Marc-Philippe Daubresse. Nous avons le temps… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean Castex, Premier ministre. Je vais faire le lien, si vous me le permettez, entre cette question et le projet de loi que le conseil des ministres a adopté ce matin et qui vise précisément, vous le savez, à conforter l'unité de la République.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Mais sans nommer l'ennemi !

M. Jean Castex, Premier ministre. La République – ai-je besoin de le dire ? –, c'est notre bien collectif le plus précieux.

M. François Bonhomme. Oui !

M. Jean Castex, Premier ministre. Hélas, certains – ils sont divers et nombreux – non seulement n'ont pas la même conception de l'unité de la République que nous, mais surtout, et c'est bien plus grave, cherchent à porter atteinte à ses valeurs fondatrices.

Ils le font éventuellement – c'est le pire – en recourant à la violence, voire au crime ; ils le font également d'un point de vue idéologique, en s'en prenant à nos valeurs et en distrayant des enfants de leur obligation scolaire, afin de leur inculquer des principes totalement contraires à nos fondements républicains.

Ils le font encore en excipant de la belle loi de 1901, c'est-à-dire en recourant au tissu associatif, pour s'adonner, derrière le paravent que constitue ce texte, à des actions visant à détacher de la République les plus jeunes de nos enfants.

S'en prennent aussi à la République et à son unité, monsieur le sénateur, tous ceux qui, lors de manifestations, troublent le droit de manifester – c'est un droit républicain –, en s'adonnant à des violences parfaitement inadmissibles, que l'unité de la République ne saurait tolérer.

Aussi, monsieur le sénateur, notre conception de l'unité de la République est faite à la fois d'intransigeance et de grande fermeté ; les dispositions législatives que nous allons proposer, qui sont en cours de préparation et qui seront prochainement discutées par la Haute Assemblée, porteront témoignage de cet engagement tout à fait résolu à préserver, à conforter et à défendre nos valeurs républicaines.

Je précise toutefois que notre conception de l'unité de la République est une conception émancipatrice, une conception de progrès ; elle s'appuie, d'un côté, sur l'indispensable fermeté, et même sur la nécessaire répression, mais aussi, d'un autre côté, sur l'éducation, sur l'habitat et sur l'ensemble des politiques publiques qui font le lien entre tous les citoyens.

Notre conception de la République et de son unité exige donc la cohérence dans les politiques publiques, et c'est bien à cette cohérence que travaille ardemment mon gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour la réplique.

M. Roger Karoutchi. Monsieur le Premier ministre, je ne doute pas du tout de vos intentions, mais je voulais insister sur le fait que, pour nous, la Nation n'est pas un agrégat de communautés.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Bravo !

M. Roger Karoutchi. C'est un creuset, dans lequel tout le monde se retrouve.

Je vous entends bien, monsieur le Premier ministre, mais j'ai également entendu le Président de la République dire qu'il fallait constituer une liste de 300 à 500 personnes issues de la diversité, afin de donner à ces dernières des noms de rue et des statues…

Or, je vous le dis sincèrement, monsieur le Premier ministre, Félix Éboué n'a pas eu besoin d'une telle liste pour être au Panthéon ni pour être l'honneur de la résistance, et Gaston Monnerville, qui a présidé cette noble assemblée, n'en a pas eu davantage besoin, non plus que Manouchian.

M. Sébastien Meurant. Exactement !

M. Roger Karoutchi. Tous ceux auxquels, en raison de leur valeur personnelle, la République doit sa reconnaissance doivent l'obtenir, mais les inscrire sur une telle liste reviendrait à réduire leurs mérites. Ils n'ont pas à être reconnus parce qu'ils représentent la diversité ; ils doivent l'être pour leur valeur personnelle.

M. Christian Cambon. Très bien !

M. Roger Karoutchi. Le creuset de la Nation, de la République, c'est évidemment l'intégration, ce que d'autres appelleraient l'assimilation du passé.

C'est cela, créer une Nation qui ait un avenir commun et qui se sente unie dans la difficulté et dans les crises. Cela ne consiste pas à dire que les gens auront notre reconnaissance parce qu'ils appartiennent à telle ou telle catégorie ! Nombre de sénateurs, ici, ont des origines ou des religions diverses, mais tous sont des Français qui servent la République.

Monsieur le Premier ministre, faites en sorte que l'État défende la République et la Nation une et indivisible. (Bravo ! et applaudissements prolongés sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

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