Question de Mme LIENEMANN Marie-Noëlle (Paris - CRCE-R) publiée le 17/12/2020

Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la situation des constructions navales et industrielles de la Méditerranée (CNIM) dans le bassin de La Seyne-sur-Mer. CNIM est un des plus gros employeurs du Var. Il connaît d'importantes difficultés depuis 2019 et la défaillance d'un de ses partenaires britanniques. Fondé en 1856, le groupe héritier des chantiers navals de La Seyne-sur-Mer intervient aujourd'hui dans les domaines de l'environnement, de l'armement, de l'énergie ou des hautes technologies, comme l'illustre sa participation au programme spatial Ariane ou à celui de recherche nucléaire Iter. Il est détenteur de brevets qui attisent bien des convoitises. Le groupe compte 2 613 salariés, dont 1 200 sont basés sur l'aire seynoise.

Il a aujourd'hui la volonté de séparer les deux secteurs d'activité « innovation & systèmes » et « environnement & énergie ». Cette situation représente un grave risque de « vente à la découpe ». La branche « environnement » serait ainsi en passe d'être cédée à une société chinoise. Les offres doivent être remises dans les prochains jours pour un dépouillement d'ici la fin de l'année 2020.

35 millions d'euros doivent être mis à disposition de la société par ses banques pour une durée de 12 mois (prorogeable deux fois pour 6 mois supplémentaires). L'État s'est engagé, lui, à un prêt d'un montant maximum de 8,7 millions d'euros – qui s'ajoutent aux 3 millions déjà accordés en mars dans l'attente de la vente du siège parisien du groupe. Or ce point est un sujet d'inquiétude, car si le protocole permet « d'éviter le dépôt de bilan », il comporte des « conditions très exigeantes » : CNIM devra rembourser plus de 43 millions (les prêts bancaires et celui de l'État) en douze mois, alors que le bénéfice net sur les six dernières années était en moyenne de 30 millions par an. L'effet de ciseau qui en découlerait risque d'être fatal. Il y a un risque fort que les banques imposent au groupe CNIM et à ses salariés des investisseurs de leur choix pour changer la majorité au capital du groupe. Ces nouveaux investisseurs risquent de découper les activités et ne garderont que celles qui jugeront les plus performantes. C'est une casse sociale à moyen terme est à craindre.

Elle lui demande donc quelles mesures compte prendre le Gouvernement pour éviter la « vente à la découpe » du groupe et le maintien d'activités stratégiques et participant à la transition écologique sous pavillon français.
Elle demande également si l'État peut s'engager à un prêt de 50 millions remboursables en 5 à 10 ans, ce qui permettrait à la fois à l'entreprise de rembourser les banques et à sécuriser la composition de l'actionnariat. Dans cette même logique, elle lui demande que le Gouvernement s'engage à une prise de participation partielle – temporaire le cas échéant – au capital de CNIM, ce qui permettrait au groupe de rétablir à moyen et long terme la situation financière, de garder l'intégralité des activités, de préserver les emplois et de garantir la maîtrise sous pavillon français d'activités industrielles stratégiques.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 19/05/2022

Le groupe CNIM connait des difficultés financières majeures depuis 2019. C'est ce qui a conduit l'État, via l'action du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI), à accompagner ce groupe afin de trouver des solutions visant à protéger d'une part les activités et savoir-faire, et d'autre part à préserver le maximum d'emplois. Dans ce cadre, l'État est intervenu financièrement à trois reprises depuis le printemps 2020 notamment sous forme de soutien financier direct via l'octroi de prêts FDES. C'est au total plus de 130 millions d'euros de prêts direct de l'État qui ont été octroyés en complément de la constitution d'un passif public et de garanties de cautions à l'export. Cependant, malgré deux accords signés sous l'impulsion du CIRI avec les partenaires industriels et financiers de CNIM, le groupe n'a pas été en mesure de se redresser. En effet, les dégradations successives des plans d'affaires, de plus de 200 millions d'euros en 2021, ont conduit à la conclusion collective qu'un redressement du Groupe tel qu'il était constitué n'était pas possible. Dans ce cadre, la recherche d'une solution spécifique pour chacune de ses filiales a été recherchée. Ce processus n'est pas encore achevé. Mais cette stratégie permet, d'ores et déjà, d'avoir trouvé une solution favorable pour une très grande partie des activités qui ont été arrimées à des acteurs français ou européens reconnus. Ainsi, les filiales O&M (exploitation et maintenance de centres de valorisation énergétique) et Bertin (développement de systèmes et instruments de pointe dans la défense et du spatial) ont été adossées à des acteurs français, tandis que la filiale Lab (traitement de fumées industrielles) a été reprise par Martin Gmbh, le partenaire industriel historique du groupe. Ce sont ainsi plus de 900 emplois qui ont été repris en intégralité tandis que les activités vont pouvoir – avec leurs nouveaux actionnaires – bénéficier d'une nouvelle dynamique. Concernant spécifiquement l'activité de conception de site de valorisation énergétique (CNIM EPC), les analyses ont conduit à la conclusion que seule une cession sous la protection du tribunal de commerce dans le cadre d'un redressement judiciaire permettrait de trouver des repreneurs. En effet, les contrats en cours se sont révélés trop déficitaires pour pouvoir être intégralement repris par un industriel. Ainsi, à l'issue de la procédure ouverte le 24 janvier 2021, le tribunal a retenu fin mars l'offre de reprise portée par le groupe Paprec. Cela permettra à l'activité de CNIM EPC de se poursuivre à la Seyne-sur-mer en bénéficiant du support d'un nouvel actionnaire qui apportera son soutien financier et sa capacité à aller chercher de nouveaux marchés. Cette reprise permet de sauver plus de 70 % des emplois de cette filiale. S'y ajoutent des offres de reclassement pour les salariés non repris. Enfin, concernant l'activité de production industrielle dans le secteur de la défense (CNIM CSI), située également à la Seyne-sur-mer, une solution d'adossement à un industriel français – suivi de très près par l'État, est en cours d'analyse à un stade avancé. Une issue favorable devrait pouvoir être trouvée dans les prochains mois. Ce sont donc bien l'ensemble des activités et la quasi-totalité des emplois qui, par l'action de l'État, des salariés et avec le soutien de l'ensemble des parties prenantes, seront préservés et pérennisés.

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