Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 24/12/2020

M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la récente publication de trois décrets au Journal officiel permettant d'élargir le champ des informations contenues dans trois fichiers de police et de gendarmerie sur les personnes soupçonnées « d'atteinte à la sûreté de l'État ».

Dans le détail, les décrets portent sur trois fichiers : le Pasp (prévention des atteintes à la sécurité publique), tenu par la police ; le Gipasp (gestion de l'information et prévention des atteintes à la sécurité publique), géré par les gendarmes, et l'EASP (enquêtes administratives liées à la sécurité publique), utilisé avant le recrutement de fonctionnaires sur des postes sensibles.

Outre leurs activités, leurs opinions politiques, philosophiques, religieuses ou encore leur appartenance syndicale pourraient désormais figurer dans ces recueils… Ces derniers ne concerneraient plus seulement les personnes ciblées, mais aussi leurs amis, famille et leurs enfants, avec recueil de photos ou encore extrait de commentaires postés sur les réseaux sociaux.

Ces textes, qui provoquent évidemment l'inquiétude des défenseurs des libertés publiques, soulèvent aussi des réserves de la part de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Auparavant, seul le fait de militer pour une cause pouvait être inscrit sur une fiche de police, alors qu'il suffit aujourd'hui d'en être sympathisant.

En 2008 déjà, le Gouvernement de l'époque avait par décret tenter d'imposer un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « EDVIGE » (Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale. Ce fichier prévoyait de collecter - déjà - des informations sur les opinions des personnes fichées. Il s'en était déjà alarmé… (question écrite n° 05156 publiée dans le Journal officiel des questions du Sénat du 17 juillet 2008) Des mobilisations citoyennes avaient permis de modifier la donne et le gouvernement avait autorisé le recueil de fichier uniquement sur les activités politiques des personnes et non plus leurs opinions.

Alors que le projet de loi « sécurité globale » en cours d'examen vise à autoriser des techniques de captation d'informations en masse (drones et caméras piétons), ces trois nouveaux décrets qui traitent au final de la manière dont ces informations pourraient être exploitées et conservées posent un certain nombre de questions…

Considérant qu'il a été annoncé la tenue prochaine d'un « Beauvau de la sécurité », il lui demande de suspendre ces textes et de prendre le temps de la concertation et de l'échange avec l'ensemble des parties prenantes sur ce sujet délicat qui semble ouvrir la porte au fichage massif de toutes les personnes qui participent à des manifestations, y compris celles qui n'ont rien à voir avec des activités violentes.

- page 6167

Transmise au Ministère de l'intérieur


La question est caduque

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