Question de Mme LOISIER Anne-Catherine (Côte-d'Or - UC-R) publiée le 25/03/2021

Question posée en séance publique le 24/03/2021

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Anne-Catherine Loisier. Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, vous affichez régulièrement votre attachement aux éleveurs.

Vous rendez, à juste titre, hommage à ceux qui travaillent 70 heures par semaine pour nourrir les Français, tout en vivant avec quelques centaines d'euros par mois.

Vous dites votre fierté du modèle d'élevage bovin « à la française », extensif, familial, herbager, reconnu comme le plus durable au monde, bien loin des feedlots canadiens ou brésiliens, qui concentrent des milliers d'animaux élevés aux antibiotiques, mais qui pénètrent toujours plus les marchés européen et français par le cheval de Troie que constituent les traités commerciaux.

Monsieur le ministre, votre soutien est précieux, mais vos actes sont déterminants.

Aujourd'hui, la situation des éleveurs, notamment des 80 000 éleveurs bovins, continue de se dégrader. Ils s'enfoncent dans la pauvreté et le désespoir, jusqu'à l'acte ultime, comme l'analyse le rapport de nos collègues Françoise Férat et Henri Cabanel, qui vous a été remis, me semble-t-il, ce matin.

Trois ans après son vote, la loi Égalim (loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous) se révèle impuissante à garantir à ces éleveurs des prix couvrant leurs coûts de production. « La faute de la filière qui n'arrive pas à s'organiser », selon vous, ou « à l'Europe qui empêche la France d'imposer les coûts de production comme socle des négociations commerciales ».

Pourtant, dans les débats qui s'engagent sur la politique agricole commune, la PAC, il semblerait que vous vous apprêtiez à priver ces éleveurs de près de 250 millions d'euros d'aides selon la filière, oubliant ainsi vos promesses de redistribution vers les agriculteurs les plus démunis, vers les zones à faibles rendements, qui n'ont pas ou peu d'autres options et qui sont déjà les mal-lotis des PAC antérieures. C'est la triple peine !

Ce choix n'est ni celui de la filière ni celui de l'Europe. Est-il donc le vôtre, monsieur le ministre ? En avez-vous mesuré les conséquences humaines, économiques et sociales ? Au-delà, quelle est finalement votre vision de l'avenir de l'élevage en France ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 25/03/2021

Réponse apportée en séance publique le 24/03/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Madame la sénatrice Loisier, vous m'interrogez sur ma vision de l'élevage en France. Vous la savez, ma vision de l'agriculture française est une vision de souveraineté : il n'y a pas de pays fort sans une agriculture forte. Et parmi les pans de notre agriculture, il y a l'élevage.

Aujourd'hui, nous sommes face à de nombreux défis, dont le premier est celui de la création de valeur au sein de la filière de l'élevage. Vous avez évoqué les filières et les débouchés, un sujet dont nous avons souvent discuté : de nombreux éleveurs sont dépendants de marchés à l'international, comme le marché italien.

Face à ces défis, le plan de relance prévoit non seulement des financements importants – on pourrait citer les 50 millions d'euros pour la création de valeur par les filières –, mais également des aides conjoncturelles. Avec le Premier ministre, je me suis rendu dans la Creuse, il y a quelques semaines, pour annoncer une aide de 60 millions d'euros destinée à nos éleveurs.

Au-delà de ces aides conjoncturelles, la question est de réussir à mieux structurer sur le long terme. Je ne reviens pas sur ce point que j'ai évoqué précédemment, mais la mère des batailles, c'est la loi Égalim, que vous avez citée.

Or ce sujet dépend non pas de l'Europe, mais des moyens que la France peut déployer au niveau national pour aller plus loin et arrêter le jeu de dupes, mortifère, pratiqué par certains pour empêcher une montée en qualité, tout en menant une guerre des prix. La responsabilité est entre nos mains : à nous de faire bouger les lignes. C'est ce que je veux faire sur la base des propositions que me remettra Serge Papin demain.

Toujours d'un point de vue structurel, se pose ensuite la question de la politique agricole commune : quelle sera notre agriculture en 2027 ? La PAC doit accompagner la volonté de souveraineté et la création de valeur par les filières que j'évoquais, en prenant en compte la réalité de notre territoire.

Vous venez, madame la sénatrice, d'un territoire situé dans une de ces zones intermédiaires que nous avons souvent évoquées, pour lesquelles je connais votre engagement et qu'il faut absolument préserver. La réalité de nos territoires, ce sont aussi les zones difficiles ou les zones de montagne.

M. le président. Il faut conclure.

M. Julien Denormandie, ministre. Les négociations, les discussions et les consultations sur cette politique agricole commune sont aujourd'hui toujours en cours. Nous allons les mener à terme, pour aboutir à une PAC souveraine, plus juste et qui tienne compte des réalités de nos territoires. (M. François Patriat applaudit.)

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