Question de M. BABARY Serge (Indre-et-Loire - Les Républicains) publiée le 25/03/2021

M. Serge Babary attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la situation de binationaux franco-américains nés aux États-Unis et qui ont la nationalité américaine en raison de la règle du droit du sol applicable dans ce pays.

Depuis l'entrée en vigueur du « foreign account tax compliance act » (FATCA) et de l'accord franco-américain de 2013, les établissements financiers doivent, sous peine de sanction, transmettre au fisc américain l'identité de leurs clients ayant des indices d'américanité, ainsi que l'ensemble des données patrimoniales les concernant.

La transmission de ces informations à l'administration fiscale américaine peut donner lieu, le cas échéant, à l'acquittement d'impôts supplémentaires aux États-Unis.

Certaines banques françaises, qui doivent se plier aux exigences fiscales américaines, préfèrent bien souvent fermer les comptes de ces ressortissants franco-américains, ou refuser d'en ouvrir, plutôt que de se mettre en conformité avec la nouvelle législation.

Face à cette situation, le Sénat a le 15 mai 2018 adopté à l'unanimité une résolution encourageant le Gouvernement à « veiller à ce que soit prise en compte la situation des "Américains accidentels" et à adopter des mesures répondant à leurs attentes notamment en ce qui concerne leur droit au compte bancaire ; la garantie de la fin des différences de traitement par les banques françaises ; la réciprocité dans la mise en œuvre de l'accord bilatéral relatif au FATCA ; l'information des Français vivant aux États-Unis des conséquences fiscales attachées à leur expatriation ; la mise en œuvre d'une action diplomatique tendant à obtenir un traitement dérogatoire pour les "Américains accidentels" leur permettant, soit de renoncer à la citoyenneté américaine par une procédure simple et gratuite, soit d'être exonérés d'obligations fiscales américaines ; la réciprocité d'application de l'accord franco-américain du 14 novembre 2013. »

Si depuis lors quelques avancées ont bien été obtenues, les Américains accidentels se voient toujours discriminés dans l'accès aux services financiers.

Par ailleurs, la fermeture depuis mars 2020 de l'ambassade américaine au public en raison de la pandémie rend impossible, pour les Américains accidentels, de satisfaire aux exigences requises par la législation extraterritoriale américaine FATCA : obtenir un « social security number » ou fournir un certificat de perte de nationalité américaine.

Aussi, il souhaiterait connaître les mesures qui sont envisagées pour faire cesser les discriminations dont sont victimes les « Américains accidentels » de la part des établissements financiers, mais aussi savoir si de nouvelles négociations bilatérales avec les États-Unis sont pourraient être engagées pour apporter des réponses à leur situation et, à tout le moins, permettre une réouverture rapide de l'Ambassade américaine.





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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 10/06/2021

Le Gouvernement est conscient des difficultés auxquelles peut être confrontée la population des « Américains accidentels », c'est-à-dire des citoyens ayant également la nationalité américaine, notamment du fait de leur naissance sur le sol américain, mais n'ayant pas de liens particuliers avec les États-Unis. Il convient de rappeler que le 14 novembre 2013, la France a signé un l'accord intergouvernemental, dit accord « Fatca » (Foreign Account Tax Compliance Act), relatif au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers. Entré en vigueur le 14 octobre 2014, cet accord fixe un cadre pour l'échange automatique d'informations fiscales avec les États-Unis. Il a été conclu, à la suite de la loi du même nom, qui a été adoptée par les États-Unis en 2010 et qui institue une obligation, pour tous les établissements financiers, de transmettre à l'administration fiscale américaine des informations détaillées sur les comptes détenus directement ou indirectement par des contribuables américains. L'accord permet d'éviter une telle transmission directe, puisqu'il charge la direction générale des Finances publiques (DGFiP) de la réception de ces données auprès des établissements financiers, puis de leur envoi à l'Internal Revenue Service (IRS), l'agence fédérale américaine chargée du recouvrement de l'impôt. Cet accord bilatéral permet également de recevoir en retour des informations sur les comptes bancaires détenus aux États-Unis. La réciprocité en matière d'échanges automatiques de renseignements est donc déjà effective, même si elle demeure perfectible. Cet accord est identique à ceux signés par les autres États avec les États-Unis, au titre des échanges automatiques sur les comptes bancaires. A la suite des sollicitations de la France et de ses partenaires, l'IRS a également publié le 15 octobre 2019 des compléments à ses instructions existantes, pour préciser les obligations des institutions financières en matière de collecte et de transmission du numéro d'identification fiscale (Tax identification number – TIN) auprès de leurs clients détenant la nationalité américaine. Ces instructions amendées sécurisent les établissements bancaires et leurs clients, vis-à-vis du risque de sanctions financières, puisque la mise en place de ces procédures leur permet d'attester de leur bonne foi et des difficultés pratiques rencontrées. Grâce à ces précisions, l'administration française n'a pas eu connaissance – sinon de manière très résiduelle – de cas de clôtures de comptes détenus par des « Américains accidentels » de la part de leurs établissements bancaires, même si des complications administratives peuvent subsister pour cette population. Dernièrement, la France a également obtenu de la part de l'IRS l'utilisation de codes, par les établissements financiers, pour les résidents fiscaux américains qui ne bénéficient pas de numéro d'identification fiscale, destinés à mieux caractériser les différents motifs de non-collecte du TIN ou de non-déclaration. Enfin, le Gouvernement a plaidé auprès des autorités américaines en faveur d'une renonciation facilitée à la nationalité américaine pour les « Américains accidentels ». Ces demandes, relayées à de nombreuses reprises par le Gouvernement français, qui a également mobilisé les autres États européens dans le même sens, ont abouti à des avancées significatives. Sur le plan administratif, les services de l'Ambassade et des consulats des États-Unis en France ont mis en place un guichet spécial et une page internet dédiée en langue française. Des informations sont également disponibles sur le site de l'ambassade de France aux États-Unis. Bien qu'une redevance de 2 350 dollars reste due en cas de renonciation à la nationalité américaine, la procédure a été allégée ; l'obtention d'un numéro de sécurité sociale n'est ainsi plus nécessaire. La France a, par ailleurs, attiré l'attention des autorités américaines sur la nécessité d'une réouverture prochaine des services consulaires de son ambassade en France, mais une telle décision appartient souverainement à celles-ci. Sur le plan fiscal, l'IRS a présenté le 6 septembre 2019 une procédure d'amnistie particulière. Compte tenu des seuils élevés qui s'appliquent en termes de niveau de revenus et de patrimoine, de nombreux binationaux décidant de renoncer à leur nationalité américaine pourront échapper aux arriérés d'impôts américains. La France, ainsi que les autres États membres de l'Union européenne, reste mobilisée pour poursuivre et approfondir le dialogue avec la nouvelle administration américaine, en vue d'obtenir des réponses concrètes complémentaires de la part de celle-ci, y compris sur le terrain de la réciprocité des échanges. Ce dossier a fait l'objet d'un débat politique lors de la réunion du conseil Ecofin de février dernier, et s'est poursuivi par des discussions techniques avec l'IRS, sous l'égide de la présidence portugaise du Conseil de l'Union. De telles discussions, qui vont continuer dans les prochains mois, devraient contribuer à sécuriser davantage la situation des institutions financières étrangères soumises à la législation « Fatca », dans les diligences qu'elles ont à mener vis-à-vis de leurs clients, de manière à prévenir plus efficacement encore toute éventualité de fermeture de compte.

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