Question de M. BOUAD Denis (Gard - SER) publiée le 15/04/2021

Question posée en séance publique le 14/04/2021

M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Denis Bouad. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Alors que la détresse psychologique est toujours très présente dans nos campagnes, les premières nuits d'avril furent dramatiques pour bon nombre de paysans français. Aujourd'hui, la solidarité nationale s'impose. Les réponses qui seront apportées ne devront laisser aucun agriculteur sur le côté.

Face à ce gel généralisé, répondre à l'urgence sur le terrain doit être notre priorité. Pour autant, cela ne doit pas nous empêcher d'apporter des solutions pérennes pour éviter ces catastrophes économiques et humaines.

Du fait du dérèglement climatique, ces aléas – gel, grêle, sécheresse, excès d'eau… – sont de plus en plus fréquents et de plus en plus intenses, alors que seuls 30 % de la ferme France sont assurés.

Monsieur le ministre, le temps est venu de repenser l'assurance récolte sur l'ensemble du territoire, et bien entendu de la rendre accessible à tous nos agriculteurs. Pour cela, il nous faut abaisser la franchise à 20 % et relever le niveau de subvention à 70 %, comme le prévoit le règlement européen Omnibus.

D'autres propositions innovantes pourraient être mises sur la table. Je pense, par exemple, au pool de réassurances pratiqué en Espagne, qui permet de mutualiser les risques.

Dans son allocution du 12 mars 2020, le Président de la République déclarait que déléguer notre alimentation à d'autres était une folie. Oui, protéger notre agriculture, c'est protéger notre souveraineté ! C'est bien là le rôle et la place de l'État.

Je suis persuadé que, comme pour les catastrophes naturelles, les Français sont prêts à faire preuve de solidarité pour défendre notre agriculture et notre souveraineté alimentaire.

En ce sens, monsieur le ministre, êtes-vous prêt à mettre sur la table la question de l'assurance agricole, notamment les sujets centraux que sont l'assurance obligatoire et la réassurance d'État ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 15/04/2021

Réponse apportée en séance publique le 14/04/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur, je suis tout à fait prêt à mettre ce sujet sur la table. Pour tout vous dire, cela fait de longs mois que j'y travaille.

Veuillez m'excuser d'évoquer certains aspects techniques, soulevés par votre question. Vous considérez qu'une piste d'amélioration concerne le niveau de la franchise, qui est aujourd'hui fixé à 30 % et qui pourrait être réglementairement fixé à 20 %. Vous évoquez également la part du budget subventionné dans le coût de la police d'assurance : elle est aujourd'hui de 65 % et pourrait passer à 70 %.

Je suis totalement favorable à ces deux dispositions, mais la question n'est pas là. La vraie question est la suivante : qui paye ce surcoût ? S'il est acquitté par la politique agricole commune, cela reviendra à faire payer par le monde agricole une assurance sur des risques qui, en réalité, ne sont pas assurables.

Ayons l'humilité et le courage de dire que ces éléments climatiques ne peuvent être assurés par le monde agricole, qui n'en a pas la capacité.

Ainsi, le coût de l'assurance de votre voiture dépend de votre comportement au cours des cinq dernières années. Quant au coût de l'assurance récolte, il dépend du climat des cinq dernières années. Pourtant, vous n'y êtes pour rien !

La véritable question posée met en jeu des sommes très importantes et relève donc d'un véritable choix démocratique : comment la solidarité nationale doit-elle accompagner nos agriculteurs face à des aléas climatiques dont ils n'ont pas la responsabilité, mais dont ils sont les premières victimes ?

Permettez-moi de rebondir, monsieur le sénateur, sur ce que disait M. Alain Duffourg tout à l'heure. Il affirmait en effet qu'aucune aide n'avait été versée, ce qui est strictement faux. Dans le cas de la grippe aviaire, précisément parce que ce gouvernement a décidé de fournir des acomptes, nous avions déjà versé, au 9 avril dernier, 11,5 millions d'euros. Et 7,5 millions d'euros étaient en cours de versement.

Certes, nous pouvons ne pas être d'accord sur certains points. Mais je trouve scandaleux que l'on véhicule des suspicions, alors que nous agissons. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, pour la réplique.

M. Denis Bouad. Monsieur le ministre, je partage une partie de vos propos. N'oubliez pas toutefois que l'ensemble des agriculteurs français vit tous les jours dans l'angoisse des aléas climatiques.

Aujourd'hui, le risque climatique n'est plus aléatoire : il est certain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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