Question de Mme LASSARADE Florence (Gironde - Les Républicains) publiée le 22/04/2021

Mme Florence Lassarade attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le sauvetage de l'ensemble des exploitations viticoles gravement touchées par le gel. 80 % du vignoble aurait gelé de 50 à 100 %. Déjà mise à mal par la crise liée au Covid-19, l'assise financière des vignobles va être amputée proportionnellement à la perte de récolte. Afin de soutenir ces exploitations, plusieurs demandes ont été formulées par les professionnels du secteur.
Concernant le volet social, les exploitants demandent des exonérations des charges sociales pour l'année 2022 et une exonération des cotisations patronales des salariés pour l'année 2022. Concernant le volet bancaire, ils souhaiteraient d'obtenir le report de tous les prêts en cours sans aucun coût pour les entreprises par la prise en charge par l'État des intérêts de l'année, soit une année blanche sur les remboursements bancaires, automatique et à coût nul.
D'autre part, ils souhaiteraient que le mécanisme de remboursement du prêt garanti par l'État (PGE) puisse être adapté aux besoins de leurs entreprises ; leur demande principale consiste en la possibilité d'allonger la durée du remboursement des PGE au-delà du cadre des 6 ans. D'autres mesures supplémentaires pourraient être envisagées telles que : l'exonération de la taxe sur le foncier non bâti, le renforcement des contrôles sur les vins importés en 2022, la possibilité de plafonner le fermage, un assouplissement dans l'utilisation de l'épargne de précaution ou l'assouplissement de l'étiquetage des millésimes.
Enfin, concernant le dispositif d'assurance climatique, il est essentiel de modifier les règles d'établissement du rendement de référence par le calcul de la moyenne olympique, car cette moyenne olympique conduit année après année à une diminution de l'intérêt de l'assurance. Elle souhaiterait savoir quelles suites le Gouvernement entend donner à ces demandes qui visent à soutenir les viticulteurs après cet épisode de gel absolument dramatique.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 05/05/2022

Après avoir subi des pertes de débouchés sans précédent en raison des surtaxes américaines et des restrictions sanitaires, la filière viticole doit désormais faire face à de nouvelles difficultés en raison des différents épisodes de gel de début avril qui ont provoqué des dégâts d'une ampleur exceptionnelle sur l'ensemble du territoire. La quasi-totalité des bassins de production viticole ont été touchés, affectant fortement le potentiel de récolte 2021. Face à cette catastrophe, survenue dans un contexte où l'équilibre économique de nombreuses exploitations est fragilisé par les conséquences de la crise de la covid-19, une série de mesures a été annoncée par le Premier ministre dès le 17 avril 2021, pour un montant de près d'un milliard d'euros. Des mesures d'urgence ont tout d'abord été annoncées et mises en œuvre. Un « fonds d'urgence » de 20 millions d'euros (M€) a été institué, ces crédits ayant été mis à la disposition des préfets dès le 6 mai afin d'accompagner au plus vite les entreprises les plus fragilisées, par des aides forfaitaires de maximum 5 000 €. Cette enveloppe de 20 M€ a été répartie entre les régions selon le taux de dommages recensé par les services de l'État. Un dispositif exceptionnel de prise en charge des cotisations sociales est mis en œuvre afin de soulager la trésorerie des agriculteurs les plus touchés, avec une prise en charge au moyen d'une enveloppe exceptionnelle de 170 M€, après validation de la notification du dispositif par la Commission européenne. Un dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties a  bénéficié à hauteur de 63 M€ aux départements les plus touchés, tandis que les dispositifs existants en matière d'activité partielle et de prêt garanti par l'État (PGE) sont mobilisés, ce dernier ayant été prolongé jusque fin d'année 2021. L'ouverture du PGE saison au secteur agricole a également été accepté par la Commission européenne. Par ailleurs, les mesures de compensation des pertes sont adaptées ou mises en œuvre de façon ad hoc. Le régime des calamités agricoles a en particulier été adapté pour répondre au mieux, de manière accélérée et amplifiée, à cet événement. Ainsi le calendrier du comité national de gestion des risques en agriculture a été modifié pour permettre une reconnaissance anticipée, avant la fin de campagne de production, des dommages provoqués par le gel et permettre un traitement accéléré des demandes d'indemnisations, avec des paiements pouvant intervenir dès que possible après la fin de la campagne de la production sinistrée, soit six mois plus tôt que lors d'un traitement « classique ». En complément, a été mis en place un dispositif d'aide sous forme d'avance remboursable. Elle sera remboursée par les exploitants par déduction automatique sur les paiements qui leur seront versés au titre des calamités agricoles. Certaines cultures aujourd'hui exclues du dispositif en raison d'un taux jugé relativement élevé de pénétration de l'assurance, en particulier la viticulture, seront prises en compte dans le dispositif de façon dérogatoire et exceptionnelle pour les dommages liés au gel intervenu du 4 au 14 avril 2021. Les taux d'indemnisation ont été revus à la hausse, en particulier pour les plus fortes pertes en arboriculture et en viticulture, pour lesquelles ils ont été portés au maximum réglementaire de 40 %. Les calamités agricoles n'étant ouvertes qu'aux agriculteurs n'ayant pas souscrit d'assurance privée contre le gel, subventionnable ou non, des dispositions seront également prises pour soutenir les agriculteurs assurés. Ainsi, un dispositif de complément d'indemnisation versée aux assurés a été notifié et vient d'être approuvé par la Commission européenne. D'autre part, un dispositif d'aide exceptionnel pour les entreprises de l'aval permet la prise en charge partielle des pertes d'excédent brut d'exploitation pour les entreprises les plus dépendantes des territoires touchés par le gel. Ce dispositif a été approuvé par la Commission européenne. En termes de mesures plus structurelles, l'enveloppe du plan de Relance dédiée à la lutte contre les événements climatiques défavorables, aujourd'hui de 100 M€, a été doublée. En particulier, le guichet pour la protection individuelle des cultures face aux événements climatiques défavorables a été abondé de 60 M€ et les modalités d'accès à l'aide élargies en concertation avec les représentants professionnels. Le Gouvernement, conscient des impacts économiques pour l'ensemble des filières agricoles, reste pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation, et maintient des échanges réguliers avec les représentants des filières. En ce qui concerne la location des terres, en application du statut du fermage, les prix de fermage sont compris entre un minimum et un maximum fixés par département, et sont donc plafonnés. S'agissant du dispositif de déduction pour épargne de précaution (DEP), mis en place par la loi de finances pour 2019, l'article 73 du code général des impôts dispose que les professionnels éligibles ont vocation à s'inscrire dans le dispositif sous réserve d'un plafond, fixé par exercice de douze mois, en fonction du bénéfice imposable. La déduction est en outre plafonnée en fonction du montant des déductions antérieurement pratiquées et non encore rapportées au résultat imposable. Pour les exploitants individuels, le plafond est égal à la différence positive entre 150 000 € et le montant de ces déductions. Pour les groupements agricoles d'exploitation en commun et les exploitations agricoles à responsabilité limitée, la somme de 150 000 € est multipliée par le nombre d'associés exploitants, dans la limite de quatre associés. Ces plafonds ont été fixés en cohérence avec l'objectif de la DEP, qui n'a pas vocation à se substituer aux dispositifs assurantiels nécessaires à la gestion des risques de forte ampleur, ni à répondre aux variations de gestion courantes. La déduction vise ainsi à répondre aux variations de l'ordre de 10 à 30 % des revenus. La déduction est donc un dispositif complémentaire à l'assurance. Enfin, la DEP étant une déduction qui doit être réintégrée, s'il peut être tentant de diminuer fortement son bénéfice imposable une année donnée, il ne faut pas perdre de vue que celle-ci n'est que provisoire et implique de fait un pilotage particulièrement fin quant à sa réintégration. Cela dit, la déduction actuelle étant mise en place pour les exercices clos du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2022, une réflexion sur son éventuelle adaptation aurait vocation à s'inscrire dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, une fois que le ministère chargé de l'agriculture disposera de suffisamment de recul sur la réforme de 2019 pour procéder à une évaluation précise du dispositif. Concernant la moyenne quinquennale utilisée dans le cadre de l'assurance multirisque climatique, des événements climatiques défavorables répétés peuvent conduire à une réduction de la production historique, référence prise en compte dans le cadre de l'assurance. La France ne peut pas déroger à l'application de cette moyenne quinquennale établie par la réglementation européenne. Cette règle, perçue comme contraignante, s'explique par la nécessité de comparer l'impact de l'événement à un potentiel de production historique réaliste tenant compte de l'effet du changement climatique, et non pas à des rendements espérés qui ne seraient plus accessibles. Enfin, le Président de la République a annoncé, le 10 septembre 2021, une refondation de l'assurance récolte et des calamités agricoles faisant suite aux travaux remis dans le cadre du Varenne de l'eau et de l'adaptation au changement climatique, afin d'adapter l'assurance récolte aux cultures les moins assurées et à la multiplication des aléas climatiques. Celle-ci est mise en oeuvre par la loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 d'orientation relative à une meilleure diffusion de l'assurance récolte en agriculture, et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture.

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