Question de M. ÉBLÉ Vincent (Seine-et-Marne - SER) publiée le 21/10/2021

Question posée en séance publique le 20/10/2021

M. le président. La parole est à M. Vincent Éblé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Vincent Éblé. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, à la fin de la semaine dernière, France Stratégie, organisme placé sous l'autorité de Matignon, a confirmé dans une étude détaillée que la réforme de la fiscalité du patrimoine lancée en 2018 n'avait pas produit les effets escomptés. Nous l'avions affirmé dans un rapport parlementaire que j'avais signé, avec le rapporteur général de la commission des finances de l'époque, dès 2019.

Non, réduire fortement la contribution des foyers fiscaux les plus riches aux charges de l'État – un cadeau de 1,5 million d'euros par an pour les cent ménages français les plus fortunés, tout de même ! – n'a produit aucun effet sur les dynamiques économiques de nos entreprises : pas de soutien à l'investissement, pas de croissance supplémentaire, pas d'effet bénéfique, pas ce prétendu ruissellement auquel ne croyaient que les crédules par intérêt.

En revanche, on observe une forte croissance de la richesse et des dividendes distribués aux plus riches. Ceux-là, qui représentent 0,1 % des contribuables, soit 38 000 foyers fiscaux, récoltent désormais les deux tiers des dividendes distribués par nos entreprises, alors qu'ils n'en touchaient que 50 % avant la réforme.

Allez-vous enfin reconnaître l'échec de cette politique de cadeau fiscal aux plus riches et réintroduire un peu de justice et de progressivité à l'heure où les plus modestes de nos concitoyens payent à la pompe et par leur consommation des contributions croissantes aux charges de l'État ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Comptes publics publiée le 21/10/2021

Réponse apportée en séance publique le 20/10/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur, vous faites mention du rapport de France Stratégie, qui, comme vous l'avez noté, étudie les effets de la politique fiscale du Gouvernement jusqu'à l'année 2019 ; il faudra prendre le temps d'examiner dans quelques mois les résultats pour les années 2020 et 2021 et de suivre les recommandations de ce même rapport, selon lesquelles il faut un certain délai pour mesurer les effets les plus immédiats de toute réforme en matière de fiscalité.

Au-delà de ce rapport de France Stratégie, qui, par ailleurs, pointe un certain nombre d'aspects extrêmement positifs de la politique économique du Gouvernement, je vous invite à lire le rapport économique, social et financier de la direction du Trésor, qui est placée sous l'autorité du ministère de l'économie et des finances. Ce document pointe un certain nombre d'éléments qui vont à contre-courant de tout ce que vous avez affirmé dans votre question.

Tout d'abord, sur la question du pouvoir d'achat, il relève que, au cours de ce quinquennat, le pouvoir d'achat des ménages de toutes les classes sociales du pays aura augmenté en moyenne de 1,7 % par an, soit deux fois plus vite qu'au cours des dernières années et cinq fois plus vite qu'au cours de la période 2012-2017.

Ce rapport, dont la presse s'est fait l'écho, indique également que le pouvoir d'achat des 10 % des ménages les plus défavorisés augmente deux fois plus vite en pourcentage que le pouvoir d'achat des 10 % des ménages les plus favorisés dans notre pays.

Enfin, la politique fiscale que nous avons mise en place permet à notre pays d'être, pour la troisième année consécutive, le premier pays de la zone euro en termes d'attractivité pour les investissements étrangers.

Nous sommes cette année le premier pays en termes de croissance économique et, depuis quelques semaines, nous connaissons un taux de chômage qui est l'équivalent de celui de la fin de 2007, c'est-à-dire le plus bas depuis quinze ans. C'est le signe de la réussite économique, parce que la meilleure façon de lutter contre la pauvreté et de rétablir l'égalité que vous appelez de vos vœux, c'est de permettre à chacun d'avoir un travail et un revenu.

La politique économique que nous menons est efficace : elle l'a montré à l'aune de la crise, elle le montre encore à l'aune de la relance. Nous continuerons évidemment à appuyer sur les mêmes fondamentaux pour faire en sorte que notre pays se redresse et que, ensuite, nous puissions construire l'économie de la France de 2030. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Éblé, pour la réplique.

M. Vincent Éblé. Monsieur le secrétaire d'État, le prétendu ruissellement, même le président Biden a reconnu qu'il n'existait pas !

Vous nous dites réduire les impôts de tous, mais la réforme de la taxe d'habitation est un cadeau payé par les collectivités. Ceux qui l'acquittent ne peuvent ni frauder ni délocaliser, ce dont ne se privent pas les évadés fiscaux. Je vous invite à consulter les Pandora Papers : les sommes en jeu représentent au total plus de 11 000 milliards d'euros, soit l'équivalent de vingt-quatre fois la dette de notre pays !

Vous nous dites avoir tout bien fait et vous n'écoutez ni nos rapports ni nos amendements. Je comprends mieux pourquoi le Président de la République propose de réduire les pouvoirs du Parlement en la matière ! (M. François Patriat manifeste son agacement.)

Monsieur le ministre, il est temps de cesser de masquer la réalité en essayant de rendre invisibles les évidences. Les contribuables français modestes savent compter et ne sont pas dupes des jeux de bonneteau dans lesquels l'on reprend d'une main le double de ce que l'on a donné de l'autre ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)

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