Question de M. MOUILLER Philippe (Deux-Sèvres - Les Républicains) publiée le 04/11/2021

M. Philippe Mouiller attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur la très grande inquiétude suscitée par les réformes en cours concernant les fauteuils roulants. La question des aides à la mobilité, notamment des fauteuils roulants pour les personnes en situation de handicap, est un sujet qui fait l'objet d'une extrême attention de la part des associations représentatives des personnes en situation de handicap ayant un handicap moteur ou un polyhandicap ou des handicaps associés, dont un grand nombre des adhérents se déplacent en fauteuil roulant. Les réformes présentées par la direction de la sécurité sociale (DSS), même si elles ont évolué au fur et à mesure des échanges avec les acteurs concernés, suscitent une très grande préoccupation et pourraient même développer une forte colère de la part des personnes concernées.
Les questions essentielles, relatives au libre choix des aides à la mobilité les plus adaptées à la situation singulière de chaque utilisateur, sont, dans ce projet, fortement remises en cause par des modalités d'acquisition imposées pour certains véhicules pour les personnes en situation de handicap (VPH), les délais imposés de renouvellement, les limitations de cumul d'acquisition, des modalités de « restitution » du VPH, les impacts sur le parc de VPH et sur les innovations etc.
Or, il est essentiel que chaque personne utilisatrice d'un fauteuil roulant puisse bénéficier du fauteuil roulant (dispositif médical) le plus adapté à sa situation et ses besoins et ceci au risque, si le fauteuil roulant ne lui convient pas, de graves conséquences sur son état de santé, sur sa sécurité, sur son confort et ses habitudes de vie. Il est un fait que les prix des aides techniques, notamment des aides à la mobilité sont parfois prohibitifs, mais il est également vrai que les niveaux de remboursements (sécurité sociale, prestation de compensation du handicap (PCH) notamment) sont très insuffisants, ce qui occasionne de lourds restes à charge ou des parcours de recherches de financements tellement contraignants que beaucoup d'utilisateurs renoncent à l'acquisition du fauteuil roulant le plus adapté à leurs besoins.
S'il est important de réformer, il ne semble pas opportun d'engager des réformes dans le but de faire baisser les prix des aides techniques, au détriment des utilisateurs. Par ailleurs, concernant les tarifications des prises en charge dans le cadre de cette réforme, celles-ci n'étant pas encore engagées, il n'est pas possible d'avoir une vue réelle sur la nature et la hauteur des réformes proposées. Enfin, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, ne figurent aucune indication ni aucune programmation budgétaire relative à ces réformes pourtant majeures et qui ne pourront certainement pas se mener à budget constant.
Il lui demande de bien vouloir lui apporter des réponses aux inquiétudes, chaque jour de plus en plus importantes, des personnes en situation de handicap et de leurs familles.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du Premier ministre, chargé des personnes handicapées publiée le 15/12/2021

Réponse apportée en séance publique le 14/12/2021

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 1909, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.

M. Philippe Mouiller. La question des aides à la mobilité pour les personnes en situation de handicap est un sujet extrêmement sensible.

Il est effectivement essentiel que chaque personne utilisatrice d'un fauteuil roulant puisse bénéficier d'un moyen adapté à sa situation et à ses besoins. Sans cela, les conséquences peuvent être graves, sur son état de santé, sur sa sécurité, sur son confort ou sur ses habitudes de vie.

C'est pourquoi les réformes présentées par la direction de la sécurité sociale (DSS) suscitent une très grande inquiétude parmi les personnes concernées.

Ce projet semble remettre fortement en cause les questions essentielles relatives au libre choix des aides à la mobilité les plus adaptées à la situation singulière de chaque utilisateur, notamment par l'imposition de modalités d'acquisition pour certains véhicules pour personnes en situation de handicap et de délais de renouvellement, par des limitations de cumul d'acquisition, par les modalités de « restitution » des véhicules, par les impacts sur le parc et sur les innovations.

S'il est important de réformer – l'attente en ce domaine était collective –, notamment de maîtriser au mieux le prix des aides techniques, cela ne peut se faire au détriment de la qualité offerte aux utilisateurs.

De plus, s'agissant de l'évolution des tarifications de prise en charge, il n'est pas possible d'avoir une vue réelle sur la nature et l'ampleur des réformes proposées.

Enfin, nous sommes très inquiets, en tant que législateurs, de constater que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 ne fait apparaître aucune indication ni aucune programmation budgétaire relative à ces réformes, pourtant majeures, qui ne pourront certainement pas se mener à budget constant.

Aussi, madame la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, je vous remercie des réponses qu'il vous sera possible d'apporter face aux inquiétudes des personnes en situation de handicap et de leurs familles.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Vous m'interrogez au sujet de la réforme que nous portons, monsieur le sénateur Mouiller, vous dont je connais l'implication forte auprès des personnes en situation de handicap.

Permettez-moi en premier lieu de rappeler les difficultés majeures qui nous ont conduits à proposer cette réforme, très attendue : le frein financier, bien sûr, en raison de prix parfois exorbitants et non justifiés – ils sont parmi les plus élevés en Europe ; le délai d'accès trop long, qui découle directement des difficultés de financement pour certains besoins très spécifiques et nécessite le recours à plusieurs modalités de financement, dont le financement par les complémentaires santé ou par la prestation de compensation du handicap.

L'axe principal de la réforme porte sur la révision de la nomenclature et des conditions tarifaires de prise en charge des fauteuils roulants. Le panier de soins actuellement couvert est obsolète et nécessite d'être révisé, comme vous le soulignez très justement.

Le projet vise donc plusieurs objectifs.

Le premier consiste à permettre un accès simplifié et plus rapide à des fauteuils roulants de qualité.

Le deuxième, et je m'engage formellement sur cet objectif, consiste à garantir que chaque personne puisse bénéficier du fauteuil roulant le plus adapté à sa situation et à ses besoins, en respectant son libre choix. Cela passe par le renforcement des exigences sur le parcours de prescription, le développement d'essais systématiques en condition de vie réelle. C'est ce que nous faisons en déployant l'expérimentation d'équipes locales d'accompagnement aux aides techniques, plébiscitée par tous.

Le troisième consiste à faire évoluer la tarification pour réduire, voire supprimer le reste à charge, par un encadrement des prix et par une amélioration du remboursement de l'assurance maladie.

Cette réforme, nous la menons dans un dialogue étroit avec les associations représentatives. J'ai moi-même eu l'occasion de réunir les administrations et l'association APF France handicap jeudi dernier, pour apporter des clarifications attendues sur le sujet du renouvellement du fauteuil, qui s'effectuera évidemment au regard de l'évolution de la pathologie et de l'état d'usure du matériel.

S'agissant du cumul d'acquisition, une personne pourra toujours bénéficier de plusieurs fauteuils si le besoin est identifié et objectivé par l'équipe médicale : fauteuil manuel et électrique, fauteuil adapté à une activité sportive, etc.

Ce qui nous guide ici, je le répète, c'est bien de faire en sorte que nul n'ait à attendre plusieurs mois ou à demander le soutien financier de ses proches pour être autonome. C'est à la solidarité nationale de le garantir.

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.

M. Philippe Mouiller. Je vous remercie de vos précisions, madame la secrétaire d'État. Je ne puis que partager l'objectif de cette réforme, que nous connaissions, et bien évidemment saluer vos intentions.

Il n'empêche que, même si vous avez apporté un certain nombre de réponses lors de la dernière réunion avec les associations, il reste clairement des interrogations d'ordre budgétaire, et certaines inquiétudes ne sont pas levées, notamment autour du libre choix.

La volonté que vous affichez est certainement réelle, mais la traduction technique est absente. Nous avons donc encore beaucoup de sujets à mettre sur la table pour rassurer tout le monde.

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