Question de Mme FÉRAT Françoise (Marne - UC) publiée le 18/11/2021

Mme Françoise Férat attire l'attention de Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion sur les nécessaires dérogations au temps de travail des travailleurs saisonniers employés par des entreprises agricoles et viticoles.

Concernant les entreprises agricoles et en vertu des dispositions du code rural et de la pêche maritime, la durée maximale hebdomadaire de travail est fixée à 48 heures et à 44 heures en moyenne sur une période de douze mois consécutives.

Si le code du travail permet de solliciter une dérogation à hauteur de 60 heures maximum (article L. 3121-21 du code du travail), les dispositions du code rural et de la pêche maritime permettent de solliciter une dérogation à hauteur de 72 heures hebdomadaires au maximum (article L.713-13 du code rural et de la pêche maritime). En effet, conscient de la particularité du domaine agricole, le législateur a pris soin d'intégrer des dispositions propres à ce secteur.
C'est dans ce contexte que les organismes professionnels sollicitent chaque année une dérogation collective au temps de travail auprès des services de la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS). Ces demandes de dérogation sont indispensables pour les récoltes des denrées périssables sur un laps de temps impératif.

Depuis 2017, il résulte une volonté du ministère du travail d'harmoniser progressivement les dérogations à la durée maximale hebdomadaire pour tendre vers 60 heures et ne plus accorder de dérogation de précaution. Les exploitants agricoles et viticoles témoignent de la complexification d'octroi des dérogations conformément aux besoins des exploitations, indispensables et adaptées selon les filières.
Ensuite, une homogénéisation des quantums d'heures dans le cadre des dérogations n'est pas envisageable du fait notamment des contraintes climatiques et naturelles inhérentes à chaque forme de culture. Si le code rural et de la pêche maritime prévoit des dispositions spéciales en la matière, c'est bel et bien parce que le monde agricole nécessite de tels aménagements.

Elle lui demande si le Gouvernement entend prendre en compte de manière pérenne ces dérogations inhérentes au travail saisonnier que constituent le travail des cultures et les récoltes.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion - Insertion publiée le 15/12/2021

Réponse apportée en séance publique le 14/12/2021

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 1926, adressée à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Mme Françoise Férat. Madame la ministre, ma question concerne les nécessaires dérogations au temps de travail des saisonniers employés par des entreprises agricoles et viticoles.

Pour ces personnels, aujourd'hui, la durée maximale de travail est fixée à 48 heures par semaine.

Si le code du travail permet de solliciter une dérogation à hauteur de 60 heures maximum, le code rural autorise, quant à lui, à demander une dérogation jusqu'à 72 heures. Ces dérogations sont indispensables pour les récoltes de denrées périssables dans un laps de temps impératif.

Depuis 2017, le ministère du travail a la volonté d'harmoniser les dérogations à 60 heures et de ne plus accorder de dérogation de précaution. Homogénéiser ou réduire ces heures n'est pourtant pas envisageable, en raison des contraintes climatiques et naturelles inhérentes à chaque forme de culture.

Le monde agricole nécessite de tels aménagements. Le Gouvernement va-t-il soutenir le travail manuel et saisonnier ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'insertion.

Mme Brigitte Klinkert, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, chargée de l'insertion. Madame la sénatrice Férat, je comprends l'impératif pour les viticulteurs et les agriculteurs de pouvoir aménager leur temps de travail à certains moments de l'année, notamment lors des vendanges, pendant lesquelles les besoins de main-d'œuvre sont accrus.

L'inspection du travail considère toutefois que les vendanges ne constituent pas, à elles seules, une circonstance exceptionnelle susceptible de justifier légalement le recours à la suspension du repos hebdomadaire. Cette position se justifie, puisque, si une dérogation est demandée chaque année, on ne peut logiquement plus arguer du caractère exceptionnel et imprévisible de la demande.

Je voudrais toutefois vous rassurer : la réglementation en vigueur offre beaucoup de souplesse aux viticulteurs, afin de leur permettre d'adapter leur temps de travail au rythme des vendanges.

En effet, le code rural et de la pêche maritime leur permet déjà de déroger au repos dominical. Ainsi, sur deux semaines, un viticulteur pourra être en mesure de travailler jusqu'à douze jours consécutifs, s'il prend son repos le lundi de la première semaine et le dimanche de la semaine suivante.

Par ailleurs, les viticulteurs peuvent solliciter une dérogation aux durées maximales journalières et hebdomadaires ; la durée quotidienne peut être portée à 12 heures et la durée hebdomadaire à 60 heures, voire à 72 heures. Ainsi, notre droit permet bien à la filière viticole d'aménager la durée du travail au rythme des vendanges.

Cependant, il n'est pas souhaitable, pour la santé d'un viticulteur, de suspendre le repos hebdomadaire après avoir travaillé dans les vignes 132 heures pendant douze jours consécutifs. C'est là une question de santé à laquelle nous ne pouvons déroger.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour la réplique.

Mme Françoise Férat. Et si, pour une fois, on faisait preuve d'un peu de bon sens, dans ce pays, madame la ministre ? Cela nous conduirait à homogénéiser agriculture et viticulture.

Faut-il rappeler que nous avons vécu une année marquée par des aléas climatiques d'une ampleur inédite ? Les moissons ont été particulièrement difficiles et se sont étalées dans le temps.

Vous me faites part d'une position sur la viticulture. Les vendanges sont-elles, pour autant, une période durant laquelle se produisent plus d'accidents qu'à d'autres moments ? Sûrement pas ! Je n'ai, en outre, pas le sentiment que les viticulteurs sont des négriers acharnés à faire travailler les gens plus qu'il n'est nécessaire.

Nous avons la chance d'avoir un ministre de l'agriculture qui œuvre au quotidien pour le bien-être des agriculteurs, dans un état d'esprit positif. Ne pourrait-on pas le prendre un peu en compte ?

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Françoise Férat. Il s'agit là, une fois encore, d'une occasion manquée, celle de pérenniser une position qui pourrait être tout à fait intéressante.

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