Question de M. MICHAU Jean-Jacques (Ariège - SER) publiée le 25/11/2021

M. Jean-Jacques Michau attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics sur une problématique spécifique concernant la taxation des sites de gestion des déchets sur nos territoires.

La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) concerne l'ensemble des sites qui ont à gérer des déchets polluants. Or, dans la pratique, cette non-différenciation entre type de sites donne lieu à de nombreuses interrogations. Ainsi, l'exemple du site d'enfouissement des déchets inertes départemental de Berbiac en Ariège est tout à fait parlant.

Le choix de ce site et le principe de l'enfouissement ont été courageusement retenus par les élus au début des années 2000, pour traiter du mieux possible les déchets ménagers et éviter les principales pollutions, notamment celles liées à l'incinération.

Cette installation, comme d'autres sur le même modèle, a représenté un investissement important pour les collectivités locales, de l'ordre de 10 millions d'euros. Exploitée depuis 2015, elle a fait l'objet d'un arrêté préfectoral en décembre 2019 qui a permis aux services de l'État de vérifier et de valider, très récemment, l'efficience de ce système.

En effet, un processus de veille et de suivi environnemental particulièrement efficace, piloté par les riverains et des experts indépendants, sous contrôle de la préfecture, s'assure en permanence de l'absence de conséquences sur la faune et la flore.

Ces quelques précisions sont utiles afin de rappeler que cette installation de stockage de déchets non dangereux est particulièrement vertueuse et ne peut être assimilée à une simple décharge.

À ce titre, il paraît donc peu compréhensible que cette installation soit taxée au taux maximum de la TGAP, de la même manière que d'autres bien plus polluantes. S'il n'est pas question de remettre en cause le principe même de la TGAP qui vise à infléchir durablement les comportements, il s'avère néanmoins injuste de taxer à un tel niveau un système de traitement choisi par des élus locaux, en accord avec les services de l'État.

D'autant plus que ce niveau de taxe instauré en cours d'exploitation du site remet en cause le modèle économique et met en péril le service public de collecte et de traitement des déchets en Ariège, comme dans de nombreux autres départements ruraux.

Il souhaiterait savoir comment peuvent être prises en compte ces difficultés et quelle réforme pourrait être engagée afin de réduire le taux de TGAP pour ces installations, qui pourrait rejoindre celui des installations d'incinération par exemple.

Par ailleurs, pour limiter les graves conséquences sur les collectivités, il souhaite savoir s'il est prévu de mettre en place un dispositif de rétrocession à l'exploitant de la plus grande partie du produit de cette taxe sous forme d'un fonds de compensation de la TGAP en recette d'investissement, comme c'est le cas pour la FCTVA.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès des ministres de l'économie, des finances et de la relance, et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques publiée le 01/12/2021

Réponse apportée en séance publique le 30/11/2021

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, auteur de la question n° 1945, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.

M. Jean-Jacques Michau. Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi de revenir sur la taxation des sites de gestion des déchets, qui constitue une problématique bien spécifique.

La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) frappe l'ensemble des sites où l'on gère des déchets polluants. Or, dans la pratique, cette absence de différenciation entre types de sites suscite de nombreuses interrogations.

L'exemple du site d'enfouissement des déchets inertes de Berbiac, dans la commune de Manses, en Ariège, est tout à fait parlant.

Cette installation, où les déchets font l'objet d'une valorisation énergétique par bioréacteur, comme dans d'autres installations conçues sur le même modèle, a nécessité pour les collectivités territoriales un investissement important, de l'ordre de 10 millions d'euros. Exploitée depuis quelques années, elle a fait l'objet en décembre 2019 d'un arrêté préfectoral qui a permis aux services de l'État de vérifier et de valider l'efficience du système.

De plus, un processus de veille et de suivi environnemental particulièrement efficace, piloté par les riverains et des experts indépendants, sous contrôle de la préfecture, permet de s'assurer en permanence de l'absence de conséquences sur la faune et la flore.

Il paraît donc peu compréhensible que cette installation soit taxée au taux maximum de TGAP, de la même manière que d'autres sites bien plus polluants. Nous trouvons injuste de taxer à un tel niveau un système de traitement choisi par des élus locaux en accord avec les services de l'État.

Comment ces difficultés pourraient-elles être prises en compte ? Quelle réforme pourrait être engagée, afin de réduire le taux de TGAP pour ces installations ? Ce taux pourrait rejoindre celui qui frappe les installations d'incinération, par exemple.

Par ailleurs, pour limiter les graves conséquences de cette taxe sur les collectivités territoriales, le Gouvernement compte-t-il mettre en place un dispositif de rétrocession à l'exploitant de la plus grande partie de son produit ? Ce dispositif pourrait prendre la forme d'un fonds de compensation de la TGAP en recettes d'investissement, similaire au fonds de compensation de la TVA (FCTVA).

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Jean-Jacques Michau, la composante de la TGAP portant sur les déchets constitue un axe important de la politique environnementale du Gouvernement. En effet, elle contribue au respect de la hiérarchie de traitement des déchets en incitant à leur valorisation, préférable à leur élimination par incinération ou par stockage.

Elle incite ainsi à la réduction des mises en décharge, ce qui est rendu nécessaire par le coût de celles-ci comme par la saturation des installations de stockage.

Dans ce cadre, conformément à la feuille de route de l'économie circulaire, la loi de finances pour 2019 a rationalisé et renforcé les taux de TGAP, avec pour objectif que le stockage et l'incinération ne soient en aucune circonstance moins onéreux que le recyclage des déchets. La réintroduction de différenciations dans les taux au bénéfice de certaines installations serait donc directement contradictoire avec cette démarche.

Toutefois, le Gouvernement ne méconnaît pas l'impact budgétaire que la TGAP peut avoir sur les collectivités territoriales. C'est pourquoi il a soutenu la mise en œuvre de mesures d'accompagnement financier.

Ainsi, parallèlement au renforcement de la TGAP par la loi de finances pour 2019, le législateur a ramené le taux de TVA à 5,5 % pour les opérations de prévention ou celles de collecte des déchets. Il a également fait passer de 8 % à 3 % les frais de gestion perçus par l'État sur la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour les cinq premières années au cours desquelles la part incitative est mise en œuvre. Des dispositifs budgétaires permettent également d'accompagner les collectivités territoriales dans leur transition écologique.

En outre, la création de nouvelles filières de responsabilité élargie du producteur, prévue par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite « loi AGEC », permet de transférer la charge de la gestion de certaines catégories de déchets vers les acteurs économiques qui les ont produits.

De même, la mise en place de modes de gestion des déchets plus favorables à l'environnement, comme l'extension du tri des emballages ou le déploiement du tri des biodéchets, est soutenue par le fonds « économie circulaire » de l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, dite Agence de la transition écologique), dans le cadre du plan de relance.

Enfin, la mise en place d'un fonds de compensation de la TGAP, sur le modèle du FCTVA, ne ferait pas de sens. En effet, en compensant de manière forfaitaire la TVA que les collectivités territoriales ont acquittée sur leurs dépenses d'investissement et certaines de leurs dépenses d'entretien, et qu'elles ne peuvent pas, à la différence des entreprises, récupérer par la voie fiscale, le FCTVA encourage un comportement vertueux en faveur de l'investissement.

À l'inverse, un dispositif similaire de récupération de la TGAP conduirait à abonder les installations les moins vertueuses, à rebours du principe pollueur-payeur qui sous-tend cette taxe.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour la réplique.

M. Jean-Jacques Michau. Je regrette cette décision, qui pénalise les collectivités territoriales, monsieur le secrétaire d'État.

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