Question de M. MILON Alain (Vaucluse - Les Républicains) publiée le 04/11/2021

Question posée en séance publique le 03/11/2021

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Milon. Ma question s'adresse à Mme Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie.

J'ai lu, comme certains d'entre nous, madame la ministre, le livre de Daniel Rosenweg sur les organismes de complémentaire santé, communément appelés mutuelles. L'auteur en dénonce les « dérives, les défaillances et les dysfonctionnements ». En dix ans, les tarifs de ces organismes ont augmenté de 45 %. Actuellement, près de 11 millions de nos concitoyens doivent avoir recours à l'aide de l'État pour s'offrir une complémentaire santé. C'est devenu un produit de luxe. Pire, en 2020 et 2021, alors que la pandémie a réduit les dépenses de santé des mutuelles de 2,8 milliards d'euros, ces dernières n'ont rien restitué à leurs cotisants.

La loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, dite loi Touraine, a entraîné une inégalité entre, d'un côté, les salariés, qui bénéficient de contrats négociés, et, de l'autre, les retraités et les indépendants, qui payent très cher des contrats individuels tout en étant moins bien couverts.

Une fois encore, les frais de gestion sont pointés du doigt. À 21 %, ils représentent quand même 8 milliards d'euros. Ils atteignent 40 % dans certains contrats. Ainsi, sur 1 000 euros cotisés, 400 partent en frais administratifs. Est-ce normal d'investir dans des courses de voile, dans des concerts, des vignobles, des marathons et autres publicités télévisuelles ?

Que comptez-vous faire, madame la ministre, pour assainir cette situation, intolérable quand il s'agit de santé ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et RDSE. – M. Daniel Salmon applaudit également.)


Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 04/11/2021

Réponse apportée en séance publique le 03/11/2021

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Monsieur le sénateur Alain Milon, comme vous le savez, grâce à la double couverture permise par les assurances maladie obligatoire et complémentaire, les Français ont le niveau de frais de santé restant à leur charge le moins élevé des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Je pense que nous pouvons tous nous en réjouir.

Toutefois, les tarifs des complémentaires santé ne cessent d'augmenter, vous l'avez dit et nous le constatons. Ils augmentent plus vite que les prestations qu'elles prennent en charge. Nous sommes soucieux des tarifs payés par les plus fragiles, notamment les seniors. C'est d'ailleurs ce qui nous a conduits à mettre en œuvre des réformes telles que la complémentaire santé solidaire ou le « 100 % santé », qui ont des impacts concrets sur le coût des soins assumé par nos concitoyens.

Dans notre pays, chaque personne peut désormais bénéficier d'une solution dentaire, auditive ou visuelle adaptée, sans frais ; plus personne n'a à choisir entre bien voir ou bien entendre. C'est un progrès social majeur, une avancée décisive, notamment pour nos concitoyens les plus modestes.

Pour autant, dans ce contexte, nous pouvons aussi nous interroger sur l'impact des frais de gestion des mutuelles, qui évoluent à la hausse quand ceux de l'assurance maladie sont en baisse, ou en tout cas stables. La crise a d'ailleurs révélé que seule une intervention publique permettrait la prise en charge rapide à 100 %, en tiers payant, des dépistages de la vaccination et des téléconsultations.

Ces constats doivent nous interroger sur l'articulation la plus efficiente entre assurance maladie obligatoire et complémentaire. Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie expertise, en ce moment même, différents scénarios d'évolution, dont l'un d'entre eux consiste à créer une grande « Sécu », qui couvrirait de manière simple et lisible, intégralement d'ailleurs, le panier de soins.

Il s'agit là de travaux qui n'engagent pas le Gouvernement, je veux le dire clairement, mais qui seront rendus publics lorsqu'ils seront aboutis, et alimenteront nos débats sur ce sujet d'importance. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.

M. Alain Milon. Je vous remercie, madame la ministre.

Si vous voulez véritablement une égalité de nos concitoyens, il faudrait carrément supprimer l'accord national interprofessionnel (ANI), de sorte que les assurés puissent avoir la liberté de choix et que l'iniquité entre salariés et non-salariés prenne fin.

Puisque vous avez fait allusion à la « grande Sécu », une expression que l'on emploie beaucoup actuellement dans la presse locale, je voudrais vous dire qu'ici, au Sénat, notamment à la commission des affaires sociales, on en parle depuis 2014. Or cette grande réforme de la sécurité sociale ne peut pas se faire sans réformer l'organisation des soins, la gouvernance, en particulier au niveau du ministère, la prise en compte des comportements individuels et les modes de paiement. Sinon, rien ne changera ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

- page 9851

Page mise à jour le