Question de M. LE NAY Jacques (Morbihan - UC) publiée le 16/12/2021

M. Jacques Le Nay attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'applicabilité de l'article 322-4-1 du code pénal, issue de la loi n° 2018-957 du 7 novembre 2018 relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites.
Concrètement, et malgré l'existence de cette disposition légale, les gendarmes ne disposent pas de cette procédure dans leur terminal de procès-verbal électronique (PVE), alors qu'une telle possibilité constituerait un moyen de pression non négligeable pour lutter contre ce genre d'installations.
Il a été annoncé par le ministère de l'intérieur que les travaux relatifs à sa mise en place sont toujours en cours et devraient aboutir à l'automne 2021. Or les installations illicites de gens du voyage s'intensifient, en particulier sur les zones littorales, notamment dans le département du Morbihan pendant la saison estivale marquée tous les ans par de grands rassemblements évangéliques.
Il lui demande de bien vouloir lui indiquer si le Gouvernement entend accélérer la prise des mesures règlementaires nécessaire à l'application concrète des amendes forfaitaires délictuelles prévues à l'article 322-4-1 du code pénal.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité publiée le 04/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 03/02/2022

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Nay, auteur de la question n° 2005, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jacques Le Nay. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur l'applicabilité de l'article 322-4-1 du code pénal portant sur l'amende forfaitaire délictuelle, issu de la loi du 7 novembre 2018 relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites.

Concrètement, et malgré l'article de loi que je viens de citer, tous les gendarmes ne disposent pas de cette procédure dans leur terminal de procès-verbal électronique, alors qu'une telle possibilité constituerait un moyen de pression non négligeable pour lutter contre ce genre d'installations.

Par ailleurs, lors de son intervention devant les maires de Haute-Savoie réunis en congrès le 6 novembre dernier, le Premier ministre a annoncé que ce département serait inclus dans les territoires expérimentaux de l'amende forfaitaire délictuelle.

Si je connais les difficultés spécifiques à la Haute-Savoie et l'engagement sur ce sujet de notre collègue Loïc Hervé, qui est à l'origine de cette disposition légale, je souhaiterais également vous faire part des inquiétudes des élus locaux du Morbihan ; selon moi, ce département devrait rejoindre l'expérimentation menée.

Les installations illicites des gens du voyage se multiplient et rythment malheureusement l'actualité estivale du Morbihan depuis de trop nombreuses années. Ce phénomène a même conduit près de deux cents élus, agriculteurs et riverains à manifester le 28 juillet dans la commune de Merlevenez.

L'an dernier, le ministre de l'intérieur Gérald Darmanin indiquait dans un courrier que les travaux relatifs à la mise en place de l'amende forfaitaire délictuelle étaient toujours en cours et devaient aboutir à l'automne 2021.

Je l'ai interpellé depuis plusieurs mois à ce sujet, d'abord par l'intermédiaire d'un courrier le 1er juin, puis via une question écrite le 5 août dernier. Ces interventions sont demeurées sans réponse ; c'est pourquoi je vous interroge aujourd'hui dans l'hémicycle.

Entendez-vous accélérer la prise des mesures réglementaires nécessaires à l'application concrète des amendes forfaitaires délictuelles prévues à l'article 322-4-1 du code pénal ? Si l'expérimentation devait être prolongée, envisagez-vous d'inclure dans son périmètre d'autres départements – le Morbihan en particulier ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Joël Giraud, secrétaire d'État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Le Nay, comme toute infraction prévue par le code pénal, l'occupation illicite de terrains peut être relevée par les forces de sécurité intérieure, puis poursuivie par l'autorité judiciaire, selon de multiples modalités inscrites dans le code de procédure pénale.

Les ministères de la justice et de l'intérieur ont engagé une démarche de simplification de la procédure pénale afin de permettre aux forces de sécurité intérieure de recentrer leurs actions et leurs missions.

Les travaux conduits lors du Beauvau de la sécurité ont d'ailleurs rappelé qu'il s'agit d'une attente très forte des gendarmes et des policiers. À ce titre, il est apparu essentiel de faciliter les constatations des infractions et leur poursuite par l'autorité judiciaire, pour entraîner un cercle vertueux de respect de la loi.

À cet égard, comme pour les délits routiers et l'usage de stupéfiants, l'amende forfaitaire délictuelle, créée par la loi du 7 novembre 2018, consiste à apporter une réponse immédiate sur le terrain face aux campements illégaux, à laquelle sont confrontés les communes et les propriétaires privés. En l'espèce, l'installation illicite sur le terrain d'autrui est punie d'une amende de 500 euros, dont le montant peut être minoré à 400 euros ou majoré à 1 000 euros. De manière générale, ces amendes contribuent également à désengorger les tribunaux et offrent ainsi une réponse pénale rapide, efficace et dissuasive.

Par ailleurs, un travail interministériel, conduit par l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions, a été réalisé afin de décliner le dispositif des amendes forfaitaires délictuelles pour installation et occupations illicites sur le plan opérationnel. Monsieur le sénateur, vous citiez l'expérimentation lancée depuis la mi-octobre 2021 : celle-ci a été lancée initialement dans six ressorts de tribunaux judiciaires – Créteil, Foix, Lille, Marseille, Reims et Rennes. Depuis le 30 novembre 2021, elle a été étendue à trois ressorts judiciaires supplémentaires de Haute-Savoie – Annecy, Bonneville et Thonon-les-Bains – à la suite des annonces du Premier ministre.

Cette première expérimentation se poursuit actuellement avant que les conclusions de l'étude d'impact, permettant d'envisager ensuite une généralisation à l'ensemble du territoire, ne soient diffusées.

En tout état de cause, même en dehors de cette procédure, l'infraction peut toujours être relevée par les forces de sécurité intérieure selon la procédure classique.

Je peux vous affirmer que le Gouvernement demeure engagé dans la lutte contre les installations illicites et qu'il est mobilisé quant aux conditions d'accueil proposées par les communes ou les EPCI. Les ministres de l'intérieur et du logement ont d'ailleurs adressé une circulaire aux préfets leur demandant de relancer la réalisation des schémas départementaux qui constituent l'une des réponses non pas pénales, mais préventives, à ce problème.

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