Question de Mme GUILLOTIN Véronique (Meurthe-et-Moselle - RDSE) publiée le 20/01/2022

Mme Véronique Guillotin attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation des personnels hospitalo-universitaires, qui subissent du retard dans l'accès aux postes titulaires malgré un investissement personnel particulièrement important. Le travail de recherche, effectué en dehors des heures de présence à l'hôpital, et nécessitant souvent une mobilité à l'étranger, est peu valorisé dans le cadre de l'avancement de carrière. Le retard salarial est évalué pour les hospitalo-universitaires à 280 000 euros à 40 ans, en comparaison avec les autres praticiens hospitaliers. Ce manque de reconnaissance aboutit à une désaffection pour cette pratique et à une fuite des cerveaux, à l'étranger ou dans le privé. Aussi, elle lui demande s'il est envisageable de valoriser les engagements préalables (recherche, mobilité à l'étranger) des praticiens lorsqu'ils sont titularisés, afin de combler en partie le différentiel de salaire et de reconnaissance.

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Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 16/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2022

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, auteure de la question n° 2089, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Véronique Guillotin. Ma question porte sur les carrières hospitalo-universitaires, filières d'excellence mal reconnues.

Fers de lance de la recherche biomédicale française et gages de la qualité des soins dans nos CHU, ces carrières souffrent d'une nette désaffection. En témoignent les nombreuses démissions et les difficultés rencontrées pour combler les postes vacants.

Ce recul ne surprend personne dans le milieu. Ces carrières sont exigeantes et demandent un investissement personnel sur le long terme, avec un temps de travail plus important, et souvent une mobilité à l'étranger. Le retard salarial accumulé est évalué à près de 300 000 euros à l'âge de 40 ans, avec un accès inférieur aux congés et à la retraite.

Je suis autorisée à vous présenter un exemple concret, celui de Thomas, jeune membre de la très active Association Médecine/Pharmacie-Sciences, qui écoutera d'ailleurs votre réponse avec attention. Après une thèse de neurosciences à l'université d'Oxford, Thomas a débuté son internat à 30 ans, avec un salaire de moins de 2 000 euros pendant quatre ans. Il occupe aujourd'hui l'un des quatre postes de chef de clinique-recherche promus par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Sa situation reste néanmoins peu enviable : jeune père en CDD, son salaire ne lui permet même pas d'emprunter pour acheter un logement.

Vous comprendrez que cette situation soit peu attractive. Ils sont ainsi nombreux à se tourner vers des postes similaires à l'étranger ou vers des postes mieux rémunérés en France, mais sans la valence recherche.

Il existe toutefois des solutions très concrètes pour revaloriser ces postes d'excellence. Leur accès étant particulièrement retardé par rapport aux autres, il serait logique, et souhaitable, de valoriser les engagements préalables, en prenant en compte les années de recherche et de mobilité internationale dans le calcul de l'ancienneté.

J'aimerais connaître la position de votre ministère sur cette proposition, qui permettrait de relancer l'attractivité de ces carrières et de lutter contre cette fuite des cerveaux, qui nuit à la qualité de la médecine française.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Madame la sénatrice Véronique Guillotin, l'accord du Ségur de la santé, signé le 13 juillet 2020, prévoyait une réflexion sur le réaménagement des grilles hospitalières des personnels enseignants et hospitaliers.

Un groupe de travail a donc été mis en place dès novembre 2020 et vingt-quatre mesures issues de ses travaux ont été actées et présentées par le Gouvernement le 12 juillet 2021. L'une d'entre elles comporte la revalorisation des émoluments hospitaliers des maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers (MCU-PH) et des professeurs des universités-praticiens hospitaliers (PU-PH). Cette revalorisation est intervenue le 1er janvier 2022 avec un réaménagement des grilles dès la nomination dans leur corps.

En parallèle, il est prévu de créer en 2022 une prime d'enseignement supérieur et de recherche pour reconnaître et valoriser l'investissement des personnels enseignants et hospitaliers.

Par ailleurs, le décret relatif au personnel enseignant et hospitalier exerçant en CHU, pris en décembre dernier, rénove le statut des personnels enseignants et hospitaliers et concrétise des mesures importantes pour l'attractivité de ces carrières.

Cela passe tout d'abord par la prise en compte, sous la forme d'une bonification d'un an, des diplômes de thèse de médecine, d'odontologie et de pharmacie. D'autres mesures issues du groupe de travail consacré à l'attractivité des carrières hospitalo-universitaires entreront aussi en vigueur dans les prochains mois.

Nous souhaitons notamment faciliter la préparation des concours et l'entrée en carrière hospitalo-universitaire. Pour ce faire, nous pourrons prendre en compte les mobilités effectuées lors du deuxième cycle de ces études pour valider les conditions à remplir pour se présenter aux concours de MCU-PH et de PU-PH et nous renforcerons le dispositif de l'« année-recherche ».

Enfin, nous assouplirons les dispositifs de mission temporaire et de délégation pour améliorer l'accompagnement des jeunes praticiens en parcours hospitalo-universitaire.

L'ensemble de ces mesures, proposées par ce groupe de travail particulièrement concerné, permettront d'œuvrer au renforcement de l'attractivité des carrières hospitalo-universitaires.

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