Question de M. BOURGI Hussein (Hérault - SER) publiée le 13/01/2022

Question posée en séance publique le 12/01/2022

M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Hussein Bourgi. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

Monsieur le ministre, depuis dix jours, la communauté éducative est confrontée à une situation particulièrement préoccupante et éprouvante, qui découle de la multiplication de protocoles visant à gérer la crise sanitaire. Ce qui pose problème, c'est certes la propagation du virus mais aussi le caractère tardif de vos instructions et de vos revirements. La conséquence en est qu'une grève, qui s'annonce particulièrement suivie, aura lieu demain.

Pouvez-vous nous dire quelle est la genèse de cette situation chaotique, à laquelle les élèves, les parents, les enseignants et les élus locaux sont confrontés ?

Pouvez-vous nous indiquer quelles sont les réponses à ces inquiétudes légitimes et à ce mécontentement réel, lesquels vont s'exprimer demain pour dénoncer l'inadéquation de protocoles qui épuisent les enseignants comme les familles ?

Pouvez-vous nous dire, enfin, ce que vous comptez faire pour restaurer la sérénité dans ce climat particulièrement anxiogène et préjudiciable pour les enfants comme pour les enseignants ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE.)


Réponse du Premier ministre publiée le 13/01/2022

Réponse apportée en séance publique le 12/01/2022

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Je vous remercie, monsieur le sénateur, pour votre question, qui me donne l'occasion de revenir sur la gestion de la crise sanitaire, en général, et sur la situation en milieu scolaire, en particulier, laquelle doit évidemment mobiliser toute notre attention.

Permettez-moi, monsieur le président, de préciser la situation qui nous a conduits à prendre nos décisions concernant l'école. Je veux le faire avec le maximum de sérénité possible.

Cela a été dit à l'occasion de la précédente question d'actualité, la France, l'Europe, le monde sont confrontés à un nouveau variant, omicron, qui a des caractéristiques spécifiques. En effet, on sait désormais qu'il est beaucoup plus contagieux que le variant delta, qu'il a en grande partie remplacé, mais pas encore complètement. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)

La première des réponses, vous le savez, est plus que jamais la vaccination. Nous savons tous – mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes parfaitement au courant – qu'avec un schéma vaccinal complet et la dose de rappel on peut contracter omicron, mais que l'on est cependant moins contagieux, et surtout que l'on a infiniment moins de chances (« De risques ! » sur des travées des groupes UC et Les Républicains.) – oui, de risques, vous avez raison ! – de développer des formes graves du covid. (Brouhaha réprobateur à droite) Il faut le répéter à nos concitoyens !

La vaccination demeure l'arme centrale. Vous me permettrez à cet égard, monsieur le président, de rappeler l'importance de l'adoption du texte relatif au passe vaccinal, dont débat actuellement la Haute Assemblée. (Le brouhaha s'intensifie.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Ce n'est pas l'Assemblée nationale ici ; nous ne sommes pas des amateurs !

M. Jean Castex, Premier ministre. Nous avons dû aussi, et c'est la source des difficultés que nous avons, adapter notre politique de dépistage, de tests, laquelle repose depuis le début de la pandémie sur les avis des autorités scientifiques et sanitaires, et c'est d'ailleurs heureux !

M. Bernard Jomier. C'est faux !

M. Jean Castex, Premier ministre. S'agissant de l'évolution principale de la doctrine de dépistage, ces autorités se sont prononcées – c'est comme ça ! – le 31 décembre 2021.

Pourquoi cette date ? Je vous répondrai que le virus ne connaît ni les vacances ni les fêtes, et ces autorités non plus ! Ces dernières avaient besoin de prendre du recul par rapport à la situation dans les pays qui étaient en avance de phase, notamment dans le sud de l'Afrique et en Grande-Bretagne. Ensuite, elles nous ont adressé un protocole sanitaire.

Ce que vous appelez les atermoiements du Gouvernement, et qui n'en sont pas, correspondent en fait à l'évolution de la doctrine sanitaire, élaborée par les autorités habilitées.

Aux termes de cette doctrine, il est dit depuis le début de la crise – c'est assez logique et cela n'a pas chang頖 qu'une personne testée positive au covid doit s'isoler. Mais, compte tenu des caractéristiques d'omicron, et parce que notre politique vise à distinguer ceux qui sont vaccinés de ceux qui ne le sont pas, ce qui est une bonne chose, la durée de l'isolement se trouve réduite pour ceux dont le schéma vaccinal est complet.

Par ailleurs, et c'est une innovation, les cas contacts, qu'il s'agisse d'enfants ou d'adultes, disposant d'un schéma vaccinal, doivent non plus s'isoler mais se soumettre davantage aux tests. Là où il fallait un test, il en faut désormais trois. (Rires moqueurs sur les travées du groupe Les Républicains) Si cela vous fait sourire, c'est votre affaire…

C'est d'ailleurs le cas dans tous les pays qui nous entourent.

M. Bernard Jomier. Ce n'est pas vrai !

M. Rachid Temal. Quel échec !

M. Jean Castex, Premier ministre. Voilà quelle politique nous appliquons, mesdames, messieurs les sénateurs, à l'école comme ailleurs.

Voix à gauche. Le ministre, le ministre !

M. Bernard Jomier. Il a déjà démissionné…

M. Jean Castex, Premier ministre. J'entends dire qu'il faudrait réduire le nombre de tests. Ceux qui demandent cela sont d'ailleurs les mêmes qui disaient avant Noël qu'il fallait les rendre gratuits et augmenter leur nombre ! (Exclamations à droite comme à gauche.)

Il ne faut pas réduire le nombre de tests ! Je veux vous donner un chiffre. Je vous ai dit que la France figurait parmi les pays qui testaient le plus au monde : c'est encore plus vrai cette semaine – grâce en soit rendue à tous ceux qui concourent à cet effort collectif ! –, au cours de laquelle le nombre de tests a augmenté de 27 %, avec une moyenne hebdomadaire de 12,1 millions. C'est inédit, et nous pouvons rendre hommage aux laboratoires, aux pharmaciens, à tous les professionnels qui testent les enfants comme les adultes.

Je profite de cette occasion pour ajouter un point devant la Haute Assemblée – vous y serez sensible, monsieur le président !

Comme je l'ai annoncé lors d'un déplacement à Rosny-sous-Bois à la fin de la semaine dernière, après avoir vu la longueur des files d'attente pour les tests – rien d'étonnant à cela puisqu'il faut beaucoup tester ! –, nous avons décidé d'accroître la fourniture en tests et autotests – un marché sur lequel il existe une tension au niveau mondial.

Ce sont 11 millions de kits d'autotests qui sont en cours de livraison dans nos pharmacies.

M. Rachid Temal. Ça marche comment ?

M. Jean Castex, Premier ministre. On est d'ailleurs confronté davantage à un problème de manutention que de produits…

Je l'ai dit la semaine dernière, nous encourageons les initiatives prises par les maires et les élus locaux qui, mobilisés pour la vaccination, rouvrent des centres de tests, notamment à proximité des écoles, comme en Seine-Saint-Denis. (Murmures appuyés puis brouhaha sur des nombreuses travées.)

M. Rachid Temal. On ne comprend rien !

M. Jean Castex, Premier ministre. Je veux le dire devant la Haute Assemblée, non seulement nous favorisons ces démarches, mais nous débloquerons tous les moyens financiers nécessaires pour accompagner ce mouvement de déploiement de centres de tests. (Protestations sur de nombreuses travées. – La voix de M. le Premier ministre se perd dans le brouhaha.) Que ce soit clair ! (« La question ! » sur les travées du groupe SER.)

M. Rachid Temal. Où est le ministre ? Blanquer ! Blanquer ! (M. Rachid Temal martèle son pupitre.)

M. Jean Castex, Premier ministre. Cela concerne les écoles ! (Exclamations continues sur de nombreuses travées.)

Car ce qui pose question s'agissant de l'école, outre le protocole sanitaire, dont j'ai annoncé l'allégement, ce sont aussi les files d'attente d'enfants et de parents devant les pharmacies. Nous devions résoudre ce problème ! (Brouhaha.)

Mesdames, messieurs les sénateurs, écoutez-moi, je sais bien que l'heure est aux polémiques… J'ai l'habitude, rassurez-vous !

Notre politique est la suivante : on vaccine et on teste ! L'alternative, ce serait la fermeture des écoles et de l'économie : cela, je suis bien certain que, de façon unanime, nous n'en voulons pas ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Protestations sur diverses autres travées.)

M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour la réplique.

M. Hussein Bourgi. Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de m'avoir fait l'honneur de répondre à ma question ! (Rires.) C'est toujours avec beaucoup d'intérêt et de respect que je vous écoute, même lorsque vous me tournez le dos… (Rires redoublés.)

Les propos que vous venez de tenir sont les mêmes que ceux que vous avez prononcés hier à l'Assemblée nationale, et que j'ai écoutés avec tout autant d'intérêt.

Je regrette que vous n'ayez pas mesuré la gravité de la situation.

M. Jean Castex, Premier ministre. Si !

M. Hussein Bourgi. Je regrette que vous donniez le sentiment d'être déconnecté des réalités et dépassé par les événements. (Exclamations sur les travées du groupe RDPI.)

Je regrette aussi cette réalité qui s'affiche, au travers de votre réponse, devant les Françaises et les Français : le ministre de l'éducation nationale a rendu les armes devant le virus.

Je voudrais vous répondre sur les différents points que vous avez abordés.

Tout d'abord, vous nous avez indiqué que la première réponse à la pandémie était la vaccination. Or le groupe socialiste propose depuis plusieurs mois l'obligation vaccinale ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Ensuite, vous avez évoqué le dépistage. Pour développer celui-ci, je vous propose de mobiliser les forces de la sécurité civile afin qu'elles aillent dans les écoles épauler les équipes éducatives.

Enfin, le troisième élément de ma réplique sera une question : le Gouvernement lutte-t-il contre l'épidémie, ou pour la gestion de la diffusion du virus via l'immunité collective ? Le jour où vous aurez répondu à cette question, peut-être serez-vous davantage écoutés et compris par les parlementaires et par les Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mmes Cathy Apourceau-Poly et Christine Herzog applaudissent également.)

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