Question de Mme MORIN-DESAILLY Catherine (Seine-Maritime - UC) publiée le 20/01/2022

Question posée en séance publique le 19/01/2022

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Catherine Morin-Desailly. Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé, que mon groupe interrogeait déjà en juillet 2020 sur le projet de plateforme des données de santé des Français, le Health Data Hub, censé regrouper à terme toutes nos données, jusqu'à celles des programmes de séquençage de notre ADN.

La question que je lui avais soumise portait sur l'attribution de la gestion de cette plateforme à la multinationale américaine Microsoft, choix imposé par son collègue Cédric O, sans appel d'offres spécifique, au prétexte incroyable qu'il n'existerait aucune entreprise française ou européenne capable !

J'alertais sur les risques pour nos libertés publiques d'un tel choix, la crise sanitaire ayant, en plus, mis une loupe sur ce sujet hypersensible des données de santé.

Récemment, nous apprenions le retrait en rase campagne de ce projet encore en gestation, puisqu'il n'y aura pas de demande d'habilitation auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

Peut-on espérer la remise à plat complète du projet ? Ou le Gouvernement fait-il le dos rond le temps de la campagne électorale, une sorte de « pause » pour arranger par la suite un appel d'offres, qui irait toujours à Microsoft via le consortium Bleu constitué avec Orange et Capgemini, sur l'invitation de Cédric O ?

Quel est le bilan de cette opération ? Je pense surtout à son coût – on parle de 80 millions d'euros, tout de même. Au vu du coup d'arrêt opéré, on peut comprendre que les Français se posent des questions : ce sont leurs données personnelles, mais ce sont aussi leurs impôts et leurs cotisations ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)


Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 20/01/2022

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2022

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Madame la sénatrice Catherine Morin-Desailly, la sécurisation des données et la confiance – j'insiste sur ce point – sont essentielles au développement de la plateforme des données de santé, dite Health Data Hub.

Depuis sa création par la loi de juillet 2019, les équipes de plateforme sont pleinement mobilisées pour accompagner les projets de recherche, notamment sur sa plateforme technologique.

En accord avec le ministère, le Health Data Hub a retiré provisoirement sa demande d'autorisation pour héberger la base principale du système national des données de santé.

Cette décision est prise dans un contexte où la CNIL a commencé à instruire l'arrêté définissant la composition de ces bases de données, sensibles par essence. Cette instruction, une fois finalisée, consolidera l'ensemble du dispositif de mise à disposition des données, comme prévu par le décret de juin 2021.

Nous souhaitons assurer notre souveraineté sur les données de santé des Français et nous poursuivrons ce déploiement à compter du moment où ces conditions de confiance et de sécurité seront réunies.

Entre-temps, nous mobilisons tous les leviers disponibles pour avancer. Le ministère a demandé à l'assurance maladie, en lien avec cette plateforme, d'élaborer un plan d'action pour accélérer la fourniture des données liées au système national concerné.

Les premiers résultats sont déjà là, avec une centaine de projets pour 2021, témoignant à la fois de la très forte demande et de l'utilisation croissante des données.

Notre objectif, qui sera précisé au cours du mois de janvier, est de doubler le volume de données mises à disposition pour les projets de recherche, afin de concilier les attentes des porteurs de projets.

Le Health Data Hub se met donc bien en place ; il n'est pas à l'arrêt et porte ses premiers fruits. Mais ces avancées sont réalisées dans un cadre légal sécurisé et renforcé par les avis de la CNIL, avec le soutien constant du Gouvernement.

Nous ne faisons pas de pari sur les données de santé des Français. Nous voulons des résultats tangibles pour notre recherche, dans un cadre sécurisé et de confiance. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour la réplique.

Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la ministre, vous ne m'avez pas répondu sur la question financière, qui est très importante. Quel est le coût de cette plateforme, censée permettre à terme des économies ?

Nous venons d'apprendre que l'assurance maladie refusait de verser sa quote-part de 11,5 millions d'euros pour alimenter le budget de 2022, car elle se pose de nombreuses questions sur la mise à l'arrêt du projet.

Je veux rappeler au Gouvernement que, si la souveraineté est bien son objectif, les données de santé des Français représentent un actif stratégique majeur, donc très convoité par les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). Or il leur confie tout ou presque sans état d'âme. Les affaires, avant tout !

Dès lors, et je pense que tous mes collègues ici présents se joindront à moi, nous exigeons désormais la plus grande transparence et la plus grande rigueur dans tout projet d'utilisation de nos données, indépendamment du ministère ou de l'organisme concerné.

Nous exigeons aussi le stockage et le traitement de nos données sur le sol européen par des entreprises européennes, qui respectent notre législation et protègent nos libertés fondamentales. Le projet actuel de Health Data Hub ne respecte pas ces conditions.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Catherine Morin-Desailly. Enfin, nous exigeons une refondation complète de ce projet, s'il devait se poursuivre. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)

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