Question de Mme DARCOS Laure (Essonne - Les Républicains) publiée le 07/07/2022

Mme Laure Darcos appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, sur la vive inquiétude que suscite la révision des valeurs locatives des locaux professionnels. Depuis le 1er janvier 2017, chaque local professionnel entrant dans le champ de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels dispose d'une nouvelle valeur locative révisée égale au produit de sa surface pondérée par le tarif au mètre carré de la catégorie du local dans son secteur d'évaluation, éventuellement ajusté d'un coefficient de localisation. Conformément à l'article 1518 ter du code général des impôts, les tarifs catégoriels sont mis à jour chaque année et les coefficients de localisation sont revus tous les deux ans. L'ensemble des paramètres collectifs d'évaluation (secteurs d'évaluation, tarifs par catégorie de locaux et coefficients de localisation) est actualisé tous les six ans et pour la première fois en 2022, pour une intégration dans les bases d'imposition 2023. Or, contrairement à la réforme de 2017 qui avait prévu des dispositifs spécifiques destinés à rendre la réforme soutenable (dispositifs de neutralisation, de planchonnement et de lissage sur dix ans), le décret du 5 février 2022 précisant la méthode applicable pour l'actualisation des paramètres collectifs d'évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels ne prévoit aucun amortisseur. Cette situation est d'autant plus regrettable et incompréhensible que la période de lissage de dix ans continue de courir jusqu'en 2026 et qu'in fine un certain nombre de contribuables subira une augmentation conséquente de son imposition dès 2023. Après avoir été fortement affectés par la crise sanitaire, les acteurs économiques locaux sont aujourd'hui confrontés à une crise géopolitique majeure dont les conséquences sont très significatives. L'évolution parfois importante de certains tarifs au mètre carré envisagée en Essonne dans le cadre de l'actualisation en cours des paramètres d'évaluation concernerait en particulier les commerces de centre-ville et n'affecterait pas les très grandes surfaces, ce qui serait en contradiction totale avec la politique de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs menée actuellement par les pouvoirs publics. Aussi, elle lui demande de bien vouloir surseoir à la révision des valeurs locatives afin de permettre aux entreprises d'assurer la pérennité de leurs activités et de garantir l'équité de la réforme.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications publiée le 13/01/2023

Réponse apportée en séance publique le 12/01/2023

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, auteure de la question n° 015, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics.

Mme Laure Darcos. Monsieur le ministre délégué, l'actualisation des paramètres d'évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels, qui servent d'assiette pour l'établissement des impôts directs locaux, a suscité, l'année dernière, la vive inquiétude des élus et des chefs d'entreprise.

Dans mon département de l'Essonne, les commissions intercommunales des impôts directs s'étaient très vite trouvées dans l'impossibilité de rendre un avis éclairé dans le délai de deux mois qui leur était légalement imparti.

De nombreux maires nous avaient par ailleurs signalé la probabilité de fortes augmentations de la fiscalité locale. Ces augmentations étaient d'autant moins compréhensibles qu'elles concernaient en premier lieu les commerces de centre-ville ou de centre-bourg, que nos municipalités s'efforcent de préserver coûte que coûte.

La loi de finances pour 2023 a tiré les leçons des difficultés rencontrées par les commissions locales pour mener à bien leurs travaux et a prévu le report à 2025 de l'entrée en vigueur des nouvelles bases d'imposition au titre des impôts locaux payés par les entreprises.

Indéniablement, ce report était nécessaire au regard du caractère extrêmement parcellaire des données utilisées pour l'actualisation des paramètres collectifs d'évaluation et du besoin, pour les commissions départementales des valeurs locatives, d'une plus forte visibilité sur les conséquences de leurs décisions.

Il s'agit à présent de définir les modalités selon lesquelles les travaux d'actualisation pourront être poursuivis, dans la perspective de leur intégration aux bases d'imposition pour l'année 2025.

En tout état de cause, il sera nécessaire d'associer étroitement les élus locaux et les entreprises contribuables dans le cadre de cette démarche.

Pourriez-vous, monsieur le ministre délégué, m'apporter toutes les précisions utiles sur le calendrier et la méthodologie envisagés ? Vous comprendrez parfaitement que nous devons aux élus et aux entreprises de nos territoires la plus grande transparence et les informations les plus exactes possible. C'est la condition sine qua non du consentement à l'impôt. Ma question n'est donc pas obsolète par rapport aux mesures du dernier projet de loi de finances.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question, qui permet de mettre en lumière l'un des choix que le Gouvernement et le Parlement ont faits cet automne sur ce sujet important non seulement pour les finances des collectivités, mais aussi pour celles des entreprises.

L'Assemblée nationale et le Sénat ont en effet décidé, en loi de finances pour 2023, d'un report de deux ans de l'actualisation des valeurs locatives des locaux professionnels, qui devait entrer en vigueur au 1er janvier 2023.

Je tiens à rappeler que ces valeurs locatives ont été révisées en 2017, afin que les impôts fonciers soient établis au plus près du marché locatif.

Il s'agit d'un succès important, et l'actualisation régulière de ces bases révisées est l'un des éléments fondamentaux qui pourront garantir que les impôts fonciers sont répartis équitablement entre les entreprises.

Comme vous le rappelez, la révision de 2017 a été accompagnée par plusieurs mécanismes destinés à en juguler les effets.

Tout d'abord, le dispositif dit de « neutralisation » a assuré que la révision s'effectue à niveau de recettes constant pour chaque commune et établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et chaque impôt. Il a ainsi assuré que la révision ne se traduise pas par une augmentation généralisée de la pression fiscale sur les entreprises.

Puis, pour lisser les évolutions individuelles, l'augmentation brute des bases a été réduite par l'application d'un mécanisme appelé « planchonnement », applicable jusqu'en 2025, tandis que l'augmentation d'impôt elle-même a été lissée sur une période de dix ans.

L'ensemble de ces mécanismes, compte tenu de leur incidence sur le montant de l'impôt, relèvent de la loi. C'est pourquoi, eu égard à la décision du Gouvernement de reporter l'entrée en vigueur de cette actualisation, de tels mécanismes n'ont pas été de nouveau proposés au législateur.

Sur ce point, je tiens à rappeler que le choix du Gouvernement découle notamment des alertes émises par nombre d'élus sur les conséquences potentiellement importantes de cette actualisation dans une période de forte tension économique ainsi que sur le manque de visibilité laissé aux commissions locales des impôts, chargées de se prononcer sur les nouvelles valeurs locatives. Les craintes que vous exprimez ont donc été, madame la sénatrice, largement entendues.

Au vu de cette expérience, le Gouvernement a annoncé lors des débats sur la loi de finances pour 2023 que toute avancée sur ce sujet devrait prendre la forme d'une concertation approfondie, au cours de l'année 2023, avec les entreprises et les collectivités, qui partagent l'objectif d'une meilleure répartition des impôts fonciers.

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour la réplique.

Mme Laure Darcos. Nous serons très vigilants, en effet. Les directions des finances publiques, dans nos départements, ont besoin aussi d'avoir un calendrier, afin qu'on ne se retrouve pas de nouveau au pied du mur.

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