Question de M. REGNARD Damien (Français établis hors de France - Les Républicains-R) publiée le 21/07/2022

Question posée en séance publique le 20/07/2022

M. le président. La parole est à M. Damien Regnard, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Damien Regnard. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

C'est par un décret pris en catimini, au cœur de l'été 2018 – le 3 août, précisément –, que le poison a commencé lentement à se répandre.

Ce poison, c'est celui de la République des copains, qui permet à un romancier contemplateur du couple présidentiel, Philippe Besson, d'être nommé consul général à Los Angeles, en lieu et place d'une personne dont le métier est de représenter la France et nos compatriotes à l'étranger.

Depuis lors, madame la ministre, ce poison n'a eu de cesse de miner notre diplomatie, qui pâtit d'une absence de vision, de consultation et de concertation.

Depuis le début de l'année, je me suis rendu dans près de trente pays, soit autant de rencontres avec nos postes diplomatiques. Partout, la même inquiétude monte face à une réforme à la fois injuste et incompréhensible.

Vous avez pris la décision de supprimer le corps diplomatique. Après cinq ans d'une politique d'improvisation constante, vous avez décidé qu'il était désormais possible de s'improviser aussi diplomate. Or on ne s'improvise pas diplomate : c'est une vocation, une carrière que l'on construit au fil des expériences.

Oui, l'inquiétude monte face au manque de considération pour nos diplomates, dont plusieurs dizaines attendent encore leur affectation pour la rentrée. Lorsque vous agissez ainsi, c'est l'image de la France qui est abîmée et la voix de la France qui est affaiblie.

Oui, la France peut se targuer de bénéficier d'un solide réseau, qui a su s'ouvrir largement et se diversifier depuis plusieurs années.

Oui, la France est riche de ce corps diplomatique, de son savoir-faire et de son expertise respectée partout dans le monde. Et si ce corps doit évoluer, cela doit se faire dans l'écoute, le respect et la concertation, sans esprit partisan, mais certainement pas à travers un décret pris discrètement entre les deux tours de l'élection présidentielle.

Madame la ministre, avez-vous conscience de l'image désastreuse que cette réforme injuste renvoie en France comme à l'étranger ? Que comptez-vous faire pour permettre à notre diplomatie de poursuivre sa mission de manière professionnelle et sereine ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)


Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 21/07/2022

Réponse apportée en séance publique le 20/07/2022

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Regnard, merci d'avoir rendu hommage aux agents du Quai d'Orsay, qui le méritent. (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.) Tous statuts confondus, ces agents ont le sens du service public chevillé au corps, comme vous l'avez souligné.

Leur mobilisation au service de nos compatriotes et de notre pays est connue. Elle a tout particulièrement été appréciée lors des crises récentes – pandémie, Afghanistan, Ukraine… –, lorsqu'il s'est agi de protéger nos compatriotes.

Nous avons tous relevé qu'une partie de ces agents a fait grève, le 2 juin dernier, dans un ministère qui n'est pas coutumier du fait.

M. Rachid Temal. C'est même historique !

Mme Catherine Colonna, ministre. Ma responsabilité est d'en tenir compte. Je vais agir dans trois directions.

Je vais tout d'abord mettre en œuvre la réforme de la haute fonction publique, qui ne concerne pas que le Quai d'Orsay. Je l'expliquerai mieux, en montrant les opportunités qu'elle représente en termes de mobilité interministérielle, en consolidant les garanties obtenues par mon prédécesseur, Jean-Yves Le Drian, et en démontrant que quelques contre-vérités n'ont plus lieu de courir.

La mise en extinction des corps des ministres plénipotentiaires et des conseillers des affaires étrangères ne signifie pas, monsieur le sénateur, l'extinction ni des métiers ni des carrières diplomatiques. Le Quai d'Orsay continuera de recruter les meilleurs profils et les diplomates pourront y dérouler des carrières sur la durée.

M. Jacques Grosperrin. Les amis, oui !

Mme Catherine Colonna, ministre. Je compte ensuite examiner la question des missions et des moyens, à la fois budgétaires et en emplois, dans un contexte international où les missions n'ont cessé de croître – climat, santé, biens publics mondiaux, protection des Français…

Enfin, je lancerai une concertation sur l'avenir de notre diplomatie pour réfléchir, notamment avec vous, à l'outil diplomatique dont l'État et les Français ont besoin. Il s'agira d'un exercice important. Nous aurons besoin de vous, de votre regard, de vos idées et de votre exigence pour réussir cette concertation que je souhaite inclusive et positive. (M. Alain Richard applaudit. – Applaudissements sur des travées du groupe INDEP.)

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