Question de Mme JOSEPH Else (Ardennes - Les Républicains) publiée le 07/07/2022

Mme Else Joseph interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la multiplication des dégradations, provocations, vols et incidents qui ont eu lieu dans plusieurs églises de France. En effet, au cours de ces derniers mois, on a pu constater de véritables atteintes à la dignité de ce patrimoine culturel, historique, mais aussi spirituel, choquant tout le monde, croyants et incroyants, qui suscitent également des inquiétudes pour les élus locaux. Ainsi, dans une église, la diffusion d'une vidéo de personnes se livrant à des poses significatives et suggestives a pu faire le tour des réseaux sociaux. Si la vidéo a été supprimée, elle a pu réapparaître sous un autre format et l'un de ses auteurs a même récidivé dans le même lieu sans exprimer de regrets sur l'action commise, ni même être inquiété. Dans d'autres situations, on assiste à la dégradation d'objets religieux, comme ces statues brisées ou ces troncs arrachés. Dans certains cas, les connotations sont inquiétantes avec la décapitation de santons, ce qui constituerait une allusion aux pratiques de l'islamisme radical. À cet égard, on a pu entendre des cris de fidèles d'une autre religion faire irruption dans une église avant que les auteurs ne prennent rapidement la fuite. Dans d'autres situations, ce sont des inscriptions grossières et des tags qui sont effectués dans les églises. Enfin, des vols ont eu lieu, qu'il s'agisse d'objets spécifiquement religieux (tabernacles) ou de matériels affectés au culte (sonorisation, par exemple). Or, si le vol dans les églises n'est pas nouveau, il tend à revêtir des motivations étranges dans la mesure où certains de ces objets ne sont visiblement pas pris au hasard (vols de ciboires avec hosties consacrées). Il existe donc une véritable insécurité qui affecte les églises de notre pays. Ces situations sont franchement inquiétantes, car elles risquent d'encourager par leur multiplication de nouvelles actions qui bénéficieront d'une impunité. Leur répétition ne peut être qu'un message désastreux. Elle lui demande ce qu'il envisage pour que ces atteintes, provocations ou ces vols soient évités et comment nos églises peuvent être protégées de manière plus efficace. Elle aimerait également savoir si cette protection, qui devient urgente, est une préoccupation des pouvoirs publics.

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 01/12/2022

Les services du ministère de l'intérieur et des outre-mer sont particulièrement vigilants à l'égard de l'évolution de la délinquance touchant les communautés religieuses. Le suivi statistique et l'analyse de ce phénomène sont assurés au plan national par le service central du renseignement territorial (SCRT). Tout acte pénalement répréhensible fait par ailleurs systématiquement l'objet d'une enquête judiciaire diligentée par les services de police ou de gendarmerie territorialement compétents. S'agissant des faits impactant la communauté chrétienne, 857 faits ont été recensés en 2021, contre 813 faits en 2020, soit une hausse de 6 %. Cependant, par rapport à l'année 2019, qui reste l'année de référence d'avant la crise sanitaire (Covid-19), la tendance est à la baisse en 2021 (- 18,5 % pour 1052 faits enregistrés). Ces faits anti-chrétiens se répartissent en 773 « actions » (incendies, dégradations, violences, voies de fait…) et 84 « menaces » (propos et gestes menaçants, inscriptions, tracts, courriers…). La quasi-totalité des atteintes antichrétiennes concerne des atteintes aux biens (92 %, contre 8 % pour les atteintes aux personnes). Malgré une diminution relative par rapport à 2019 et 2020, la part des faits antichrétiens représente toujours une large majorité des faits antireligieux recensés par le SCRT (52 % en 2021, contre 59 % en 2020, et 56 % en 2019). Cette prééminence des faits antichrétiens doit cependant être relativisée dans la mesure où le christianisme compte de très nombreux lieux de culte sur l'ensemble du territoire national. S'agissant des cinq premiers mois de l'année 2022, après avoir connu une relative période d'accalmie en 2020 et 2021, les faits visant la communauté chrétienne sont en augmentation avec 400 faits, contre 320 sur la même période en 2021 (+ 25 %), 293 en 2020 et 562 en 2019. À titre de comparaison, la part des faits antisémites représente 25 % de l'ensemble des faits antireligieux sur les cinq premiers mois de l'année, tandis que celle des faits antimusulmans s'établit à 13 %. De même, 374 atteintes aux lieux de culte et cimetières chrétiens ont été répertoriées de janvier à mai 2022 contre 290 en 2021 (+ 29 %). Elles représentaient 272 faits en 2020 et 500 en 2019. Afin de neutraliser cette menace, des instructions sont systématiquement transmises aux services de police et de gendarmerie auxquels il est demandé de porter une attention particulière au traitement des atteintes aux communautés religieuses. En parallèle, et sur un plan préventif, l'État poursuit ses efforts en matière de sécurisation des lieux religieux, via le dispositif « Sentinelle » et la mise en place de patrouilles dynamiques et statiques, composées de policiers ou de gendarmes. Au plan budgétaire, il abonde, chaque année de manière substantielle, le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) et finance pour une large part, les travaux de sécurisation des sites religieux (dispositifs de vidéoprotection, installation de protections mécaniques, de systèmes d'alarme, de portails, etc.). À titre d'exemple, une enveloppe de 825 000 euros a été mobilisée en 2021 pour financer 54 projets présentés par des associations cultuelles chrétiennes aux fins de sécuriser leurs sites. Pour le premier semestre 2022, ce sont d'ores et déjà près de 341 000 euros qui ont été débloqués afin de participer au financement de 19 projets. Par ailleurs, le dialogue mis en place en 2015 au ministère de l'intérieur  et des outre-mer avec l'ensemble des représentants de la communauté chrétienne (catholiques, protestants, orthodoxes) se poursuit sous l'égide de la DPSIS et donne lieu à des échanges constructifs et réguliers. Les services du ministère de l'intérieur et des outre-mer, dont les services opérationnels (DGPN/Préfecture de Police/DGGN) se mobilisent afin de prendre en compte les attentes de la communauté chrétienne, mettent en œuvre des plans d'action adaptés, en liaison avec les préfets de région et de département compétents. Enfin et de manière récurrente, la sécurisation des fêtes chrétiennes donne lieu, comme celles propres aux autres cultes, à des instructions particulières du ministre de l'intérieur et des outre mer adressées aux préfets afin d'accroître la vigilance et la réactivité des forces de sécurité de l'État.

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