Question de M. SUEUR Jean-Pierre (Loiret - SER) publiée le 14/07/2022

M. Jean-Pierre Sueur appelle l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur la situation difficile – voire inextricable – dans laquelle se trouvent certains salariés protégés dont l'entreprise est placée en liquidation judiciaire. Les articles L. 2411-1 à L. 2411-3 du code du travail stipulent que le licenciement d'un salarié protégé ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque l'entreprise n'exerce plus aucune activité de production, que le matériel a été vendu et que l'autorisation de licenciement des travailleurs protégés a été refusée à juste titre par l'inspecteur du travail en raison, notamment, de l'existence de vices de procédure, ces salariés se retrouvent injustement pénalisés. Tout en conservant le statut de salarié, ils sont en effet confrontés à des difficultés quant au versement de tout ou partie de leur salaire chaque mois par le liquidateur judiciaire en charge du dossier et ne bénéficient d'aucun droit – indemnités de chômage, aides à la reconversion, dispositifs de retour à l'emploi tel que le contrat de sécurisation professionnelle – avant qu'une nouvelle autorisation de licenciement soit accordée ou qu'une nouvelle autorisation de licenciement soit prononcée par le juge. Ils ont, certes, la possibilité d'obtenir soit une résiliation judiciaire de leur contrat de travail par un jugement du Conseil de prud'hommes, soit de contester la décision prise par l'inspecteur du travail en formant un recours hiérarchique auprès du ministre du travail. Ces deux procédures ne répondent cependant pas, à court terme, à la situation inextricable dans laquelle ils se trouvent puisqu'en dépit du fait qu'ils sont « protégés », leur sort est beaucoup plus précaire que celui des salariés qui ne sont pas « protégés » et qu'ils sont concrètement victimes de préjudices plus lourds que ces derniers, ce qui est, en l'espèce, contraire à l'esprit de la loi. Il lui demande en conséquence quelles dispositions il compte prendre pour mettre fin à de telles situations.

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Réponse du Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion publiée le 15/12/2022

En premier lieu, s'agissant des créances nées de la rupture du contrat de travail et conformément aux dispositions de l'article L. 3253-9 du code du travail, celles-ci sont couvertes par l'association pour la gestion du régime d'assurance des créances des salaires (AGS) dès lors que le liquidateur a manifesté son intention de rompre le contrat de travail dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation ou pendant le maintien provisoire de l'activité autorisé par le jugement de liquidation judiciaire ou dans les quinze jours suivant la fin de ce maintien de l'activité. Ces délais sont portés à vingt et un jours au lieu de quinze lorsqu'un plan de sauvegarde de l'emploi est élaboré. Cette intention de rompre le contrat peut être matérialisée notamment par l'envoi d'une lettre de convocation à l'entretien préalable (Cass. soc. 23 févr.2005, n° 03-41.466 ; Cass. soc., 8 févr. 2012, n° 10-12.906), de la convocation du comité social et économique ou de la saisine de l'inspecteur du travail. Dès lors, même si le licenciement n'est notifié qu'après la fin d'une de ces périodes, du fait des délais entraînés par la procédure protectrice, le salarié protégé bénéficie néanmoins de la garantie de paiement par l'AGS (Cass. soc., 2 oct. 2001, n° 99-45.346, Bull. V n° 295 ; Cass. soc., 4 juill. 2006, n° 04-45.930 ; Cass. soc., 12 sept. 2018, n° 17-12.604) ). En second lieu, s'agissant des salaires dus entre le jugement prononçant la liquidation judiciaire et le licenciement du salarié, les règles de droit commun prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail s'appliquent. Sont ainsi couvertes dans la limite d'un mois et demi de travail les sommes dues au titre des quinze jours suivant le jugement de liquidation, au titre de la période d'activité provisoire et au cours des quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu'un plan de sauvegarde de l'emploi est élaboré, suivant cette période. Concernant plus particulièrement le représentant des salariés, sont couvertes dans la limite d'un mois et demi de travail les sommes dues au titre du mois suivant le jugement de liquidation, au titre de la période d'activité provisoire et au cours des quinze jours ou vingt et un jours si un plan de sauvegarde de l'emploi a été élaboré suivant cette période. Il s'ensuit que ne sont pas couverts les salaires pour une période postérieure à celles énoncées précédemment. Néanmoins, lorsque l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement d'un salarié protégé motif pris de l'existence d'une irrégularité de procédure, le liquidateur judiciaire peut régulariser la procédure et saisir à nouveau l'autorité administrative, particulièrement diligente lorsqu'elle est saisie dans le cadre d'une liquidation judiciaire.

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