Question de Mme MERCIER Marie (Saône-et-Loire - Les Républicains) publiée le 14/07/2022

Mme Marie Mercier attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur les conséquences dramatiques de la désertification médicale, qui vont jusqu'à entraîner des situations de « non-assistance » de patients en danger. Un témoignage poignant mérite d'être lu : "Je suis l'heureuse maman de 4 grands enfants. Ma fille cadette de 16 ans est lourdement handicapée depuis l'âge de 14 mois suite à une varicelle, elle est sous assistance respiratoire 24h/24 et tétraplégique. Les médecins n'ont jamais pu établir un diagnostic précis et sa prise en charge a été compliquée à cause du manque de visibilité des médecins quant à l'évolution de la maladie, mais également par faute de professionnels de santé sur notre territoire. La situation n'a fait qu'empirer en 20 ans et nous avons assisté impuissants, son père et moi à la dégradation de notre système de santé. Nous avons touché le fond il y a 6 mois quand de graves douleurs l'ont affectée. Nous avons alerté son médecin traitant, puis son médecin réanimateur référent, sans succès, l'un comme l'autre étant débordés et loin de notre domicile. Un traitement anti-douleurs donné par téléphone et une ordonnance pour une échographie, qui a révélé des problèmes rénaux, ont été faits mais sans suite. Les douleurs reprenant par vague, un des deux médecins nous a quand même trouvé un rendez-vous chez un spécialiste en mars à 150 km de notre domicile. Là encore, après 1 heure passée en salle d'attente, 10 minutes ont suffi pour que le médecin nous dise qu'il ne pouvait rien faire sans un scanner. Rendez-vous est donné un mois plus tard, toujours à 150 km, pour l'examen radiologique et un nouveau point avec le spécialiste. Face aux résultats plutôt mauvais, le médecin nous reçoit avec des nouvelles pessimistes mais toujours sans examiner notre fille. Pendant tout ce temps, sa souffrance ne diminue pas et son état ne fait que s'aggraver mais les professionnels ne s'affolent pas. Je vous écris aujourd'hui de la réanimation de Lyon, où ma fille vient d'être admise en urgence car son état est très critique. Ma colère est telle face à cette inertie médicale que je me dois de vous la faire partager. À l'heure où j'écris ces mots, j'attends depuis plus de trois heures dans la salle d'attente qu'un médecin daigne venir me chercher pour enfin pouvoir embrasser ma fille et être sûre qu'elle aille bien. Depuis 20 ans que nous côtoyons le milieu médical, je déplore ce qu'il est devenu. Pour exemple, la petite réflexion de l'interne à notre arrivée en lui donnant le nom de la commune du médecin référent de notre fille : « avec un nom pareil, ça ne m'étonne pas que ce soit un désert médical ! ». Aujourd'hui, si nous arrivons à la ramener à la maison, nous savons que nous serons de nouveau seuls face à la maladie sans médecin de proximité et sans prise en charge adéquate. »
De nombreux maires de son département de Saône-et-Loire déplorent de voir partir le ou les médecins généralistes installés sur leur commune, sans personne pour les remplacer. Des milliers de patients sont laissés sans médecin référent et avec la quasi impossibilité d'en trouver un nouveau. Ces maires font face à de terribles témoignages comme celui exposé plus haut. Ils ne cessent d'alerter les autorités et se démènent pour trouver des solutions, à la recherche active de médecins. La santé des Français doit être une priorité, en milieu rural comme ailleurs. Le temps n'est plus aux simples mesures pour lesquelles il faut parfois attendre des années avant d'en voir apparaître les premiers bénéfices. Aussi, elle souhaite savoir si le Gouvernement compte réagir fortement et prendre des dispositions draconiennes afin de répondre aux graves difficultés rencontrées partout sur notre territoire.

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 03/11/2022

L'accès aux soins, qui ne concerne pas que les territoires ruraux, a été une priorité gouvernementale dès 2017, avec le lancement du plan d'accès aux soins, qui comprend une large palette de solutions adaptables à chaque contexte local, car la réponse aux difficultés démographiques n'est pas unique : - actions au niveau de la formation des professionnels : soutien à la réalisation des stages ambulatoires pour faire découvrir la pratique et « donner envie » d'exercer dans ces territoires ; - actions sur l'attractivité de l'exercice : développement des maisons de santé pluri-professionnelles, centres de santé pluri-professionnels, Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS)… ; - ou encore recours aux transferts de compétences, à la télésanté… Ce plan a été renforcé par la stratégie « Ma Santé 2022 », avec des dispositions à effet de court terme comme la création de postes d'assistants médicaux pour seconder et appuyer les médecins dans un ensemble de tâches administratives et soignantes. Le Ségur de la Santé lancé en juillet 2020 a mis l'accent sur le déploiement de l'exercice coordonné sous toutes ses formes et le recours à la télésanté. L'enjeu aujourd'hui, dans un contexte démographique tendu, et compte tenu des bénéfices décalés de la fin du numérus clausus, est bien de mobiliser tous les leviers existants pour trouver du temps médical et augmenter l'attractivité du territoire. Certaines solutions doivent être accélérées dans leur déploiement. C'est le cas notamment des assistants médicaux, dont la cible a été portée à 10 000 à l'horizon 2025. Les gains estimés étant de 10 % de patients en plus du fait du temps médical gagné. A ce jour 3 500 assistants médicaux sont en poste.  L'accent doit être également mis sur le déploiement de l'exercice coordonné, levier majeur pour attirer les professionnels de santé et les fixer, y compris dans les zones les plus fragiles : les CPTS devront couvrir l'ensemble du territoire d'ici 2023. Celles-ci devront se mobiliser prioritairement sur l'accès à un médecin traitant. Le recours aux consultations avancées de spécialistes ou encore aux transferts de compétences fait aussi partie des leviers à mobiliser. La solution unique n'existe pas. La co-construire au sein de chaque territoire constitue l'un des enjeux du volet santé du Conseil national de la refondation : mettre autour de la table professionnels, patients et élus pour trouver ensemble les solutions les plus adaptées aux besoins des territoires et des populations, en levant les freins et en mobilisant les leviers existants.

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