Question de Mme LASSARADE Florence (Gironde - Les Républicains) publiée le 25/08/2022

Mme Florence Lassarade appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargée de l'enfance sur la dégradation de la prise en charge de nouveau-nés placés qui, en raison d'un manque de personnel dans les pouponnières, sont confiés à la protection de l'enfance et peuvent demeurer à l'hôpital plusieurs mois. Ces nouveau-nés souffrent d'une forme de dépression, appelée hospitalisme, qui apparaît dans le contexte d'un long séjour à l'hôpital ou d'un placement, et qui peut être imputée à une carence affective ou à l'absence d'une figure d'attachement. L'hospitalisme est un état dépressif avec régression physique et psychique, qui se manifeste chez certains enfants séparés précocement de tout lien d'affection. Ces enfants dépérissent progressivement tant physiquement que psychiquement. Ce trouble affectif a été théorisé dès 1946 par le psychanalyste René Spitz.
Aujourd'hui, en raison de l'augmentation des besoins, on assiste à un déficit de la prise en charge de certains nourrissons avec des conséquences dramatiques pour ces enfants. Les professionnels de la petite enfance tirent la sonnette d'alarme et expliquent cette situation par l'augmentation du nombre de mesures de placement, une crise du recrutement des professionnels conjuguée à une diminution du nombre de familles d'accueil qui, par ailleurs, sont vieillissantes. Ces familles vieillissantes ne souhaitent pas prendre en charge des enfants de moins de trois ans. Dans ce contexte de tension sur les places, des tout petits enfants peuvent être laissés en protection de l'enfance et rester à l'hôpital plusieurs mois, tandis que d'autres sont accueillis dans des pouponnières surchargées. Cette situation inhumaine est parfaitement inacceptable, qui plus est pour des nourrissons qui sont déjà en souffrance.
Elle souhaiterait savoir quels moyens humains et financiers le Gouvernement entend déployer en urgence pour améliorer la prise en charge des nouveau-nés placés.

- page 4260


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la Première ministre, chargé de l'enfance publiée le 26/10/2022

Réponse apportée en séance publique le 25/10/2022

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, auteur de la question n° 122, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargée de l'enfance.

Mme Florence Lassarade. Ma question porte sur la dégradation de la prise en charge des nouveau-nés placés qui, en raison d'un manque de personnel dans les pouponnières, sont confiés à la protection de l'enfance et peuvent demeurer à l'hôpital durant plusieurs mois.

Ces nourrissons souffrent d'une forme de dépression, appelée « hospitalisme », qui apparaît dans le contexte d'un long séjour à l'hôpital ou d'un placement, et qui peut être imputée à une carence affective ou à l'absence d'une figure d'attachement. L'hospitalisme est un état dépressif avec régression physique et psychique, qui se manifeste chez certains enfants privés précocement de tout lien d'affection.

Ces enfants dépérissent progressivement, tant physiquement que psychiquement. Ce trouble affectif a été théorisé dès 1946 par le psychanalyste René Spitz.

Aujourd'hui, en raison de l'augmentation des besoins, on assiste à un déficit de la prise en charge de certains nourrissons emportant des conséquences dramatiques sur leur développement et sur leur vie d'adulte à venir.

Les professionnels de la petite enfance tirent la sonnette d'alarme et expliquent cette situation par l'accroissement du nombre de mesures de placement et la crise de recrutement des professionnels, conjuguée à la diminution du nombre de familles d'accueil. Ces dernières sont par ailleurs vieillissantes et ne souhaitent plus accueillir des enfants de moins de 3 ans.

Dans ce contexte de tension sur les places, de tout petits enfants peuvent être laissés sous la responsabilité de la protection de l'enfance et rester à l'hôpital pendant plusieurs mois, d'autres sont accueillis dans des pouponnières surchargées. Cette situation inhumaine est parfaitement inacceptable, en particulier pour des nourrissons qui sont déjà en souffrance.

Je souhaite savoir quels moyens humains et financiers le Gouvernement entend déployer en urgence pour améliorer la prise en charge des nouveau-nés placés.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargée de l'enfance. Madame la sénatrice Florence Lassarade, la prise en charge des enfants, notamment celle des plus fragiles, est au cœur de ma mission et constitue une priorité pour le Président de la République, le Gouvernement et la majorité présidentielle. Vous évoquez la question des nouveau-nés placés en pouponnières.

Il est vrai que le nombre d'enfants placés en France a augmenté ces dernières années. Ainsi, entre 2015 et 2020, 35 000 enfants de plus se sont trouvés dans cette situation ; votre département, la Gironde, a connu une évolution similaire.

Pour autant, il est difficile de répondre précisément à votre question sur l'évolution du nombre d'enfants en pouponnière, car il n'existe pas, hélas, de statistiques nationales sur ce sujet.

Cette réponse est évidemment insatisfaisante, en particulier si nous entendons avancer avec l'ensemble des acteurs de la protection de l'enfance vers un référentiel commun à partir d'un constat partagé. Je travaille actuellement sur ce sujet des statistiques de prise en charge des enfants avec l'ensemble des pouvoirs publics, afin que ceux-ci disposent, à l'avenir, de chiffres rigoureux. La création du groupement d'intérêt public (GIP) France enfance protégée devrait d'ailleurs nous permettre d'améliorer la situation en la matière.

Je vous rappelle que la protection de l'enfance est une compétence décentralisée. La situation complexe que vous évoquez dans votre importante question n'est donc pas la même d'un département à l'autre, chaque département tentant d'adapter en permanence son offre aux besoins du territoire.

Pour autant, l'État est présent et doit continuer à l'être, notamment en accompagnant les territoires sur le volet de l'attractivité des métiers. Faire face à la crise du recrutement dans tous les métiers du social et de la protection de l'enfance est une de nos priorités, tant cette crise affecte la qualité de la prise en charge de nos enfants. Ce n'est pas uniquement une question de moyens. Comme vous le savez, nous avons étendu les revalorisations salariales issues du Ségur de la santé au secteur de la protection de l'enfance. Les assistants familiaux en ont également bénéficié au 1er septembre. Il s'agit d'une crise de sens, à laquelle nous devons répondre.

S'agissant des moyens financiers, nous avons mis en œuvre la contractualisation. L'État restera engagé au côté des départements et des professionnels pour assurer la protection de nos enfants.

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour la réplique.

Mme Florence Lassarade. Madame la secrétaire d'État, ces nourrissons deviendront des adultes placés et certains d'entre eux termineront leur vie dans des foyers d'accueil médicalisés. Telle est leur destinée et il faut lutter contre cela. Nous devons donner à ces enfants, déjà fragilisés par leur condition sociale et leur situation d'abandon, une chance de vivre normalement et de devenir des adultes aptes à la vie commune.

- page 4176

Page mise à jour le