Question de M. BRISSON Max (Pyrénées-Atlantiques - Les Républicains) publiée le 29/09/2022

M. Max Brisson appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires à propos des conséquences des dernières dispositions législatives relatives à la taxe d'aménagement sur les communes.

Actuellement, la taxe d'aménagement est exigible à la date de délivrance de l'autorisation d'urbanisme et le versement peut s'effectuer en deux échéances : à 12 mois d'abord, puis à 24 mois ensuite après la délivrance de l'autorisation.

Néanmoins, l'article 155 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a posé le cadre du transfert de la gestion de la taxe d'aménagement de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) à la direction départementale des finances publiques. Il découle alors de cette disposition législative une modification de la date d'exigibilité de la taxe d'aménagement qui, à compter de 2023, sera la date d'achèvement des opérations imposables, c'est-à-dire à compter de la déclaration des propriétaires à l'administration dans les quatre-vingt-dix jours de leur réalisation définitive des constructions nouvelles.

De ce fait, le versement de la taxe s'effectuera à compter des quatre-vingt-dix jours après la date d'exigibilité et six mois après afin de, selon les arguments de l'État, renforcer les synergies avec les impôts fonciers en calquant la déclaration de la taxe d'aménagement sur des conditions identiques à celles des déclarations des changements fonciers.

Cependant, cette réforme requiert nécessairement un renforcement des contrôles et, par voie de conséquence, une augmentation conséquente des moyens humains des services fiscaux puisque, déjà, à ce jour, les géomètres ont une activité relativement importante qui ne leur permet plus de prendre part aux commissions communales des impôts directs, par manque de temps.

En outre, la modification de la date d'exigibilité affecte directement les budgets des collectivités locales qui vont devoir endurer un décalage dans le versement de la taxe d'aménagement. Ainsi, à titre d'exemple, pour la commune de Gan dans les Pyrénées-Atlantiques, en 2022, il est attendu la somme de 168 000 euros, selon la DDTM. Toutefois, il s'agit là d'une recette d'investissement fondamentale qui pourrait être réduite de 66 %.
Enfin, s'ajoute à cette réforme la modification des modalités de répartition de la taxe d'aménagement entre les communes et les établissements publics de coopération intercommunale. En effet, l'article 109 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 impose aux communes ayant institué une taxe d'aménagement d'en reverser une fraction à leur intercommunalité, mettant ainsi un terme au caractère facultatif de cette démarche.

En conséquence, il existe la crainte pour les communes d'assister impuissantes au transfert progressif de la totalité de la taxe d'aménagement aux intercommunalités et du pouvoir d'instruire les autorisations d'urbanisme. De plus, il en ressort également le sentiment que la recette fiscale de la taxe d'aménagement risque de disparaitre à terme du budget communal.

Aussi, pour répondre à l'inquiétude formulée par les maires, il souhaiterait savoir si le Gouvernement prévoit de tenir compte des remontées du terrain en revenant sur la modification de la date d'exigibilité de la taxe d'aménagement et s'il envisage de renforcer les moyens humains alloués aux services fiscaux pour assurer un renforcement des contrôles.

En outre, il interroge le Gouvernement quant à la possibilité de rétablir le caractère facultatif du reversement d'une fraction de la taxe d'aménagement à l'intercommunalité par la commune afin de garantir son inscription dans les budgets communaux.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie publiée le 07/10/2022

Réponse apportée en séance publique le 06/10/2022

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 168, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie.

M. Max Brisson. Monsieur le ministre, ma question, qui s'inscrit dans le prolongement de celle de Pierre Louault, s'adressait aussi initialement à Mme Cayeux.

Actuellement, la taxe d'aménagement est exigible à la date de délivrance de l'autorisation d'urbanisme. Son versement peut s'effectuer en deux échéances : à douze mois, puis à vingt-quatre mois, soit au début du projet.

La loi de finances pour 2021 a modifié ce calendrier. C'est désormais la date d'achèvement des opérations qui s'impose, c'est-à-dire à la fin des travaux.

Ainsi, les collectivités territoriales se voient imposer un décalage dans le versement d'un impôt qui constituait jusqu'alors une recette d'investissement appréciable, car versée au moment où la collectivité supportait le coût des travaux d'aménagement.

De plus, si la loi laissait jusqu'alors la commune libre de reverser ou non une fraction du produit de la taxe d'aménagement à l'intercommunalité, la réforme rend désormais ce reversement obligatoire pour l'ensemble des communes ayant institué une taxe d'aménagement.

Face à ces mesures de calendrier et de reversement, les maires manifestent un sentiment d'incompréhension. Ils craignent d'assister au transfert progressif de la totalité du produit de cette taxe à l'intercommunalité et donc la disparition de cette recette de leur budget communal. Beaucoup nous disent y voir là le décalage entre un discours qui porte les maires aux nues et une réalité : un coup de canif supplémentaire sur les ressources des collectivités.

Monsieur le ministre, ma question est double : ne serait-ce pas un signe fort adressé aux collectivités locales que de rétablir le calendrier initial ou, a minima, d'établir une compensation pour que les collectivités puissent faire face à ce décalage dans le recouvrement de la taxe d'aménagement ? Ne serait-ce pas un signe fort adressé aux communes et aux maires que de rétablir le caractère facultatif du reversement d'une fraction de cet impôt à l'intercommunalité ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie. Monsieur le sénateur Brisson, même motif, même punition : vous parlez fiscalité, vous avez Bercy ; vous rêviez de Mme Cayeux, c'est avec moi que vous allez devoir composer. (Sourires.)

Vous craignez tout d'abord un décalage dans la perception des recettes des taxes d'urbanisme en raison du report de l'exigibilité des taxes à l'achèvement des travaux.

Je tiens à vous rassurer : les études réalisées en vue de cette réforme ont démontré l'absence de conséquences du décalage de l'exigibilité sur la trésorerie des collectivités locales pour près des trois quarts des montants recouvrés, compte tenu de l'accélération du recouvrement induit.

En effet, l'achèvement des projets de faible ampleur intervient majoritairement en moins de vingt-quatre mois, c'est-à-dire avant l'émission du second titre de perception dans le système antérieur.

Par ailleurs, le transfert permet une optimisation des modalités de liquidation des taxes en sus d'une dématérialisation du processus déclaratif, de la création d'un référentiel des délibérations des collectivités et de l'automatisation du calcul des taxes.

Toutefois, il est effectivement possible, en cas de très grands projets immobiliers s'étalant sur plusieurs années, que le reversement aux collectivités fasse l'objet d'un décalage. Pour cette raison, l'ordonnance du 14 juin dernier, relative au transfert à la direction générale des finances publiques (DGFiP) de la gestion de la taxe d'aménagement et de la part logement de la redevance d'archéologie préventive, crée, pour les constructions dont la surface est supérieure à 5 000 mètres carrés, un système d'acompte permettant de neutraliser ces effets.

Vous craignez enfin que la taxe d'aménagement soit insuffisamment contrôlée par les services de la DGFiP. Là aussi, soyez rassuré : les effectifs de la DGFiP ont été renforcés – 290 agents supplémentaires, issus des directions départementales, rejoindront ses services entre le 1er septembre 2022 et le 1er septembre 2024.

Le processus mis en œuvre pour la liquidation et le contrôle des taxes est particulièrement robuste. Il s'appuie sur l'unification des obligations déclaratives fiscales en matière de taxes d'urbanisme avec celles en vigueur en matière de taxes foncières, ce qui permet de profiter de l'expérience acquise pour la surveillance et la relance des redevables. La DGFiP s'appuiera également sur de nouveaux outils de vérification et de contrôle.

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.

M. Max Brisson. Monsieur le ministre, vous vous appuyez sur des études de Bercy, nous nous appuyons sur le ressenti des maires, en particulier ceux des petites communes. Ce décalage les inquiète. Ils espèrent que ce reversement pourra redevenir facultatif et expriment leurs doutes sur la capacité de contrôle de la DGFiP.

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