Question de M. CHARON Pierre (Paris - Les Républicains) publiée le 15/09/2022

M. Pierre Charon attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la situation des enseignants dont la mutation a été refusée et qui ont du se mettre en position de « disponibilité ».
La rentrée scolaire de septembre 2022 a été marquée par une pénurie de professeurs titulaires qui a conduit l'éducation nationale à recruter, à la hâte, près de 3 000 professeurs contractuels.
Or, selon les chiffres officiels de l'éducation nationale, en 2021, un peu plus de 24 000 professeurs étaient en disponibilité dont 8 000 professeurs qui ont quitté leur ville d'affectation pour suivre leur conjoint.
Un enseignant qui déménage pour des raisons familiales et change de département, notamment pour suivre une mobilité professionnelle de son conjoint, ne peut poursuivre ses fonctions au sein de l'éducation nationale si sa demande de mutation a été refusée. Il doit alors se mettre en disponibilité.
Les récentes politiques d'ouverture de postes à pourvoir d'urgence se sont concentrées sur le recrutement de contractuels non diplômés, non formés alors qu'il existe un vivier de professeurs qui seraient susceptibles d'enseigner.
Dans l'état actuel, une jurisprudence de la cour administrative de décembre 1989 précise qu' « un fonctionnaire qui a été placé en dehors de son administration d'origine, ne peut être recruté par cette dernière, même temporairement ».
Dans son dernier rapport 2021, la médiatrice de l'éducation nationale note : si l'on se place du côté de l'académie ou si l'on considère plus généralement l'intérêt du système éducatif dans son ensemble, les refus de mobilité peuvent apparaître contre-productifs ou stériles. Les enseignants qui sont placés en disponibilité pour suivre leurs conjoints n'exercent, quoi qu'il en soit, pas dans l'académie et se trouvent empêchés d'exercer ailleurs alors qu'il y a des besoins. En outre, ces refus sont en contradiction avec les objectifs de gestion des ressources humaines affichés au niveau de la fonction publique : favoriser la mobilité, enrichir les parcours, limiter les risques psychosociaux. Enfin, ils contribuent à donner une image peu attractive du métier d'enseignant. »
Face à ce constat, il lui demande ses intentions pour permettre enfin aux personnels enseignants en disponibilité de pourvoir, s'ils le souhaitent, aux postes vacants.

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 08/12/2022

Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse (MENJ) favorise la mobilité géographique et fonctionnelle de l'ensemble de ses personnels en leur offrant la possibilité de parcours diversifiés tout en veillant au respect des enjeux de continuité et de qualité du service public de l'enseignement. Cette politique de mobilité contribue notamment à mettre en œuvre le plan d'action ministériel relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, la diversité et la lutte contre les discriminations. Les lignes directrices de gestion du ministère définissent les procédures de gestion des demandes individuelles de mobilité. Les différents processus de mobilité s'articulent autour de principes communs : transparence des procédures, traitement équitable des candidatures, prise en compte des priorités légales de mutation, recherche de l'adéquation entre les exigences des postes et les profils et compétences des candidats. La politique de mobilité du MENJ a pour objectif de favoriser la meilleure adéquation possible entre la construction de parcours professionnels tout en répondant aux besoins en enseignement des académies. A cette fin, le ministère propose une offre de services aux enseignants, qu'il s'agisse de l'accueil proposé par les DRH de proximité et conseillers RH de proximité ou des outils d'aide à la décision en ligne, pour mieux construire leur projet professionnel (le comparateur de mobilité sur le site www.education.gouv.fr permet de simuler son barème et estimer ses perspectives de mutation vers un département ou une académie). Le ministère attribue les capacités d'accueil à l'ensemble des académies en fonction des moyens qui lui sont octroyés et des besoins exprimés par les services déconcentrés. Il veille à assurer, dans ce cadre, une répartition équilibrée des personnels entre les académies et les départements. Le système d'affectation des enseignants doit permettre la couverture la plus complète des besoins d'enseignement de toutes les académies et de tous les départements. Ainsi, le ministère porte une attention particulière aux zones ou territoires connaissant des difficultés de recrutement (éducation prioritaire, postes difficiles et peu attractifs, rural isolé, montagne…). Ces opérations ont, in fine, pour ambition de permettre à chaque académie d'assurer un enseignement de qualité à chaque élève, dans le respect des plafonds d'emplois et de la masse salariale notifiés par le directeur de programme, en veillant notamment à une répartition équilibrée entre enseignants expérimentés et enseignants en début de carrière. Pour autant, cette répartition équilibrée des moyens d'enseignement ne permet pas de couvrir tous les besoins des académies, même ceux des académies les plus attractives. Le recours à des contractuels permet donc de couvrir, après les opérations du mouvement, ces postes restés vacants à la rentrée scolaire ou qui le deviennent en cours d'année. Si chaque poste vacant devait correspondre à une capacité d'accueil, l'impact sur le mouvement pourrait être très important. Le taux de mutation des titulaires chuterait progressivement car les académies attractives combleraient rapidement tous leurs besoins. Le ministère gère l'importante volumétrie des demandes et garantit le respect des priorités légales de mutation dans le cadre de la campagne annuelle de mutation s'effectuant au moyen d'un barème. Les priorités de traitement des demandes de mobilité sont accordées au titre des articles L. 512-18, L. 512-19, L. 512-21 et L. 512-22 du code général de la fonction publique. Pour mémoire, ces priorités sont : - le rapprochement de conjoints ou de partenaires liés par un Pacs ; - la prise en compte du handicap ; - l'exercice dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles ; - la prise en compte du centre des intérêts matériels et moraux (Cimm) ; - la prise en compte de la situation du fonctionnaire, y compris d'une autre administration, dont l'emploi est supprimé et qui ne peut être réaffecté sur un emploi correspondant à son grade dans son service ; - la prise en compte de la situation du fonctionnaire dont l'emploi est supprimé dans le cadre d'une restructuration de service. Outre les priorités légales mentionnées ci-dessus, les barèmes des mouvements des personnels traduisent également celles du décret du 25 avril 2018 relatif aux priorités d'affectation des membres de certains corps mentionnés à l'article 10 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 : - agents touchés par des mesures de carte scolaire ; - agents sollicitant un rapprochement avec le détenteur de l'autorité parentale conjointe dans l'intérêt de l'enfant ; - agents exerçant dans un territoire ou une zone rencontrant des difficultés particulières de recrutement ; - agents formulant chaque année une même demande de mutation, ancienneté de la demande ; - agents justifiant d'une expérience et d'un parcours professionnel. Un agent candidat à une mutation peut relever d'une seule ou de plusieurs priorités légales. Néanmoins, ces éléments n'ont qu'un caractère indicatif. L'administration conserve son pouvoir d'appréciation en fonction des situations individuelles, des besoins du service ou de tout autre motif d'intérêt général. S'agissant du recours aux personnels en disponibilité pour effectuer des remplacements, la jurisprudence est claire : un fonctionnaire titularisé dans son grade ne peut légalement, tant qu'il n'a pas perdu sa qualité de fonctionnaire titulaire, être recruté par son administration comme agent contractuel (Conseil d'État, 13 novembre 1981, requête n° 11564 ; 23 février 1966, demoiselle Brillé, requête n° 64259 et Cour administrative d'appel de Lyon, 20 décembre 1989, n° 89LY00486). Cette règle s'applique à toute la fonction publique. Le MENJ ne peut seul y déroger. La modification de cette règle est donc un enjeu interministériel. Par ailleurs, affecter un agent en disponibilité dans son académie de résidence au motif que des postes y seraient budgétairement vacants contreviendrait, notamment, au principe de l'équité de traitement des agents et pourrait être considéré comme un moyen de contournement des règles de la mobilité et notamment des priorités légales et réglementaires susmentionnées. En conclusion, le ministère ne méconnaît pas les critiques dont ce dispositif de gestion des mutations peut faire l'objet. Il entend bien poursuivre les réflexions pour l'optimiser. Ainsi dans le cadre d'une procédure de recours, tout agent a la possibilité de faire valoir une situation familiale particulièrement difficile. L'administration veillera dans la mesure du possible à y donner suite.

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