Question de M. COZIC Thierry (Sarthe - SER) publiée le 22/09/2022

M. Thierry Cozic attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conséquences fiscales de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour les communes de France.

Il rappelle qu'à l'instar de la population, les communes subissent de plein fouet l'inflation (l'énergie, les denrées alimentaires pour la restauration scolaire, le coût de la construction...) et les décisions de l'État (empilement des normes, point d'indice de la fonction publique).

Il attire l'attention sur le fait qu'en considérant que l'inflation augmenterait les coûts de 9 milliards d'euros cette année, la hausse des dépenses de personnels représentera 1,2 milliard d'euros.

Il souligne que sur les dotations de l'État le gel de la dotation globale de fonctionnement (DGF) succède à une baisse de cette même dotation. Cette baisse ayant atteint 11,5 milliards d'euros entre 2014 et 2017, dont 6 milliards pour le bloc communal. Afin de faire face à ces baisses, l'indexation de la DGF sur l'inflation 2023 semble être un dispositif qui doit être discuté au prochain projet de loi de finances pour 2023.
Bien que cela représenterait, avec un taux d'inflation de 4,3 %, une charge de 700 millions d'euros pour l'État, c'est une mesure que l'association des maires de France appelle elle-même de ses vœux.

Il rappelle qu'en l'absence de l'indexation de la DGF et de la revalorisation des bases fiscales, il sera difficile pour les communes de limiter l'augmentation des dépenses de fonctionnement des collectivités de 0,5 % en-dessous de l'inflation.

Il attire l'attention sur le fait qu'avec la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), étalée sur deux ans, le lien fiscal entre les entreprises et les collectivités tend à être rompu. L'autonomie fiscale des collectivités est un enjeu de souveraineté démocratique girondine cardinal pour nos communes.
Il note que le bloc communal a perdu tout pouvoir sur 18 % de ses recettes fiscales depuis la suppression de la taxe d'habitation, un débat clair et démocratique doit être mené sur le front de la fiscalité locale dans ce pays.

Il rappelle que la CVAE atteint 9,5 milliards d'euros, dont 2,5 financés par l'État, de fait le coût de la compensation par l'État atteindra 7 milliards d'euros.

Il lui demande donc quelles mesures concrètes il compte mettre en place afin d'assurer une compensation équitable qui ne déstabilise pas les finances locales des communes déjà fragilisées par les conséquences de l'inflation.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 22/12/2022

Les impôts de production demeurent plus élevés en France que chez la plupart de ses voisins européens, limitant la compétitivité des entreprises, notamment industrielles, ainsi que l'attractivité du territoire. La suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) vise donc à poursuivre l'allègement des impôts de production initié en 2021. L'objectif de cette réforme est aussi de soutenir l'activité économique et la reconquête industrielle, afin d'atteindre le plein emploi. En cohérence avec les objectifs de maîtrise des finances publiques fixés pour les années 2022-2027, la suppression de la CVAE s'effectuera en deux temps : la cotisation due par les entreprises redevables sera diminuée de moitié en 2023, avant de disparaître en 2024. Parallèlement, la perte de recettes induite par cette réforme sera compensée aux collectivités locales à travers l'affectation, à compter de 2023, d'une fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) permettant, à l'instar de toutes les réformes de la fiscalité locale intervenues depuis 2017, une compensation à l'euro près, pérenne et dynamique. Le montant de la compensation revenant aux collectivités et groupements concernés sera ainsi déterminé sur la base d'une moyenne quadriennale de leurs recettes de CVAE (années 2020, 2021, 2022 et 2023). La CVAE étant variable d'une année sur l'autre, cette période de référence étendue se justifie notamment en raison du dynamisme attendu des recettes pour 2023 par rapport aux années précédentes marquées par la crise sanitaire. Le montant de la somme de la CVAE collectée en 2022 et des dégrèvements barémiques est estimé à 11,16 Mds €. Ainsi, au total, les collectivités bénéficieront d'une ressource globale en hausse, entre 2022 et 2023, de plus de 19,5 % par rapport au montant total dont elles ont bénéficié en 2022, leur garantissant un niveau particulièrement élevé de compensation. Une fraction de TVA sera allouée chaque année en fonction de la perte de référence subie. En outre, afin de maintenir l'incitation pour les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre à attirer de nouvelles activités économiques sur leur territoire, la dynamique (positive) de la TVA sera affectée à un fonds national d'attractivité économique des territoires. Les critères de distribution du fonds feront l'objet d'une concertation avec les associations d'élus et viseront à tenir compte du dynamisme relatif des territoires en matière d'implantation d'entreprises, notamment à travers la prise en compte de la valeur locative de cotisation foncière des entreprises sur les territoires des collectivités concernées. Enfin, concernant la situation financière des communes, le Gouvernement est tout à fait conscient des effets de l'inflation sur les budgets locaux.  Le Gouvernement a déployé toute une politique de protection des collectivités locales avec notamment un bouclier tarifaire limitant la hausse des tarifs réglementés de l'électricité à 4 % en moyenne pour les collectivités de moins de 10 salariés et 2 millions d'euros de recettes réelles de fonctionnement, baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité de 22,5 € / MWh à 0,5 € / MWh jusqu'au 31 janvier 2023, augmentation du volume de l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique en 2022. Le Gouvernement est conscient des conséquences de plus long terme pour les communes des effets de l'inflation sur les dépenses de fonctionnement (électricité, gaz, produits alimentaires etc.) de certains de leurs équipements publics (cantines, piscines…) et de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique découlant de la mise en œuvre du décret du 7 juillet 2022 portant majoration de la rémunération des personnels civils et militaires de l'État, des personnels des collectivités territoriales et des établissements publics d'hospitalisation. C'est pourquoi l'article 14 de la loi de finances rectificative du 16 août 2022 instaure un dispositif de soutien budgétaire pour accompagner les communes et leurs groupements. Ainsi, les communes qui réunissent les trois critères suivants seront éligibles à ce mécanisme de soutien : si elles avaient un taux d'épargne brute (épargne brute / recettes réelles de fonctionnement) inférieur à 22 % en 2021 ; si leur potentiel financier est inférieur au double de la moyenne des communes de leur strate démographique ; si elles perdent au moins 25 % de leur épargne brute en 2022, du fait principalement de ces hausses de dépenses. Pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale éligibles, l'État leur versera une compensation égale à la somme des deux termes suivants : 70 % de la hausse des dépenses constatées en 2022 au titre des achats d'énergie, d'électricité, de chauffage urbain et de produits alimentaires ; 50 % de la hausse des dépenses constatées en 2022 du fait de la revalorisation du point d'indice. Le soutien budgétaire de l'État est estimé à 430 millions d'euros, mais dépendra de l'évolution effective de l'épargne brute des communes et de leurs groupements en 2022. Le décret n° 2022-1314 du 13 octobre 2022 est venu préciser le fonctionnement de la dotation. Celle-ci sera attribuée automatiquement aux communes en 2023. Elles peuvent en outre solliciter un acompte de 50 % de son montant avant le 15 novembre 2022. Au-delà de ce soutien budgétaire spécifique, toutes les communes bénéficient de la revalorisation forfaitaire des bases d'imposition, indexée sur l'inflation. En 2022, cette revalorisation forfaitaire des bases sera de 3,4 %, soit le taux le plus élevé depuis plus de 30 ans. À elle seule, cette revalorisation forfaitaire devrait permettre d'augmenter de plus de 1,2 milliard d'euros les recettes de fiscalité locale des communes et de leurs groupements en 2022. Cette même mécanique de revalorisation s'appliquera pour 2023. Enfin, dans le cadre des discussions en cours sur le projet de loi de finances pour 2023 la Première ministre a annoncé la mise en place d'un « amortisseur électricité » pour les TPE qui ne bénéficient pas du bouclier tarifaire, les PME et toutes les collectivités publiques. Concrètement, l'Etat prendra en charge 50 % du surcoût au-delà d'un prix de référence de 325 euros par MWh. La baisse du prix apparaîtra directement sur la facture, et une compensation financière sera versée par l'Etat aux fournisseurs d'énergie, via les charges de service public de l'énergie. Même si les recettes fiscales des collectivités devraient rester dynamiques en 2023, avec une revalorisation des bases locatives prévues à +7 %, une dyamique de la TVA pour les régions, départements, et EPCI à +5,1 %, et une compensation de la suppression de la CVAE en hausse de +19,5 % par rapport à la CVAE perçue en 2022, le Gouvernement fait le choix de prolonger et d'amplifier le filet de sécurité 2022 pour les collectivités, en triplant l'enveloppe (1,5 Md€ vs 430 M€) et en l'élargissant aux départements et aux régions. Ce filet interviendra après l'amortisseur électricité et comme en 2022 atténuera les surcoûts liés à l'ensemble des dépenses énergétiques, gaz et fioul compris, pour les collectivités trop fortement impactées. Plusieurs mesures sont par ailleurs actuellement soumises au vote des parlementaires, dont une augmentation de la dotation globale de fonctionnement, inédite depuis treize ans, ainsi qu'un fonds vert doté de 2 milliards d'euros pour 2023. Ce fonds visera notamment à soutenir la performance environnementale des collectivités (rénovation des bâtiments publics des collectivités, modernisation de l'éclairage public, valorisation des biodéchets, etc.), l'adaptation des territoires au changement climatique (risques naturels, renaturation) et l'amélioration du cadre de vie (friches, mise en place des zones à faible émission, etc.). Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour protéger les collectivités et plus largement les Français, de la hausse du coût de l'énergie, de l'inflation.

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