Question de M. OUZOULIAS Pierre (Hauts-de-Seine - CRCE) publiée le 22/09/2022

M. Pierre Ouzoulias interroge Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères au sujet de la provenance du pétrole exporté par l'Azerbaïdjan.

Le 18 juillet 2022, au terme d'une rencontre avec le Président de la République d'Azerbaïdjan, la présidente de la Commission européenne déclarait : « l'Union européenne et l'Azerbaïdjan ouvrent un nouveau chapitre dans le domaine de l'énergie : la coopération. L'Azerbaïdjan est un partenaire clé dans les efforts de l'Union européenne pour s'éloigner des combustibles fossiles russes ».

Motivé par les risques de pénuries énergétiques qui pèsent sur le vieux continent à l'aube de l'hiver, l'accord conclu entre l'Union européenne et l'Azerbaïdjan a d'ores et déjà produit ses premiers effets : Bakou a ainsi augmenté de 30 % ses importations de gaz vers les pays de l'Union européenne.

Si la Commission européenne a justifié cette nouvelle entente par les impératifs liés à la guerre en Ukraine et les sanctions prises contre la Russie, cet accord n'est pas sans poser problème à toutes celles et tous ceux qui demeurent attachés aux droits de l'homme et au respect du droit international. Il rappelle qu'à l'automne 2020, l'Azerbaïdjan, bien aidé par la Turquie, a mené une guerre terrible de 44 jours contre la République d'Artsakh, provoquant la mort de milliers de soldats arméniens et l'annexion d'une large partie du territoire de la République d'Artsakh. Il rappelle en outre que le 13 septembre 2022, l'Azerbaïdjan a une nouvelle fois violé le droit international, en procédant à une offensive militaire contre l'Arménie, pays ami de la France, causant la mort de près de 170 personnes.

Dans ce contexte, nul ne peut contester que l'accord intervenu entre l'Union européenne et l'Azerbaïdjan permettra au pouvoir azéri de disposer d'une manne financière propice à la conduite d'une guerre contre la République d'Arménie, dont la sécurité est plus que jamais menacée. Mais la réflexion géopolitique ne se limite pas à la seule question du gaz. Il s'interroge également sur la spectaculaire augmentation des exportations de pétrole azéries constatée ces derniers mois.

En effet, les exportations azéries de pétrole brut, par l'oléoduc (BTC) qui relie les installations de Bakou au port turc de la Méditerranée de Ceyhan, sont passées d'une moyenne de 413 000 barils par jour, de janvier à mars 2022, à une moyenne de 610 000 barils par jour, d'avril à juillet 2022, soit une augmentation de près de 50 % sur cette courte période. Or, durant la même période, il est avéré que la production pétrolière de l'Azerbaïdjan a baissé d'environ 45 000 barils par jour.

Cette contradiction entre la baisse de la production pétrolière azérie et l'augmentation de ses exportations pourrait trouver son explication dans la capacité de l'Azerbaïdjan d'exporter du pétrole extrait par la Russie. Les infrastructures pétrolières de Bakou sont en effet reliées à celles de la Russie par un oléoduc passant par Makhachkala, Grozny et Tikhoretsk. Après la mise en service de l'oléoduc BTC, le 10 mai 2006, du pétrole venant de Russie a déjà transité par Bakou pour être exporté ensuite depuis le port turc de Ceyhan.

Aussi, il lui demande quelles sont les garanties dont disposent l'Union européenne et la France pour être assurées de la provenance du pétrole exporté par l'Azerbaïdjan. Autrement dit, il souhaite savoir si la France a la certitude que l'Azerbaïdjan n'apporte pas à la Russie des moyens techniques pour lui permettre de contourner les sanctions économiques sur ces exportations pétrolières.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 01/12/2022

La production pétrolière d'Azrbaïdjan n'a chuté en réalité que de 27 000 barils/jour entre le 1er trimestre 2022 (693 000 barils/jour en moyenne) et les quatre mois suivants (665 000 barils/jour). Cette baisse, d'un peu moins de 4%, est liée aux engagements pris par l'Azerbaïdjan dans le cadre des décisions de production de l'OPEP+ dont le pays est membre. Les exportations azerbaïdjanaises de pétrole n'ont par ailleurs pas augmenté de 50% entre ces deux périodes, mais elles ont légèrement diminué, passant de 533 000 à 530 000 barils/jour ce qui correspond à une baisse de 0,5%. Ce résultat ne reflète pas la baisse de la production de 4% mentionnée ci-dessus et il faudra attendre les données consolidées pour les mois d'août et septembre pour qu'elle se répercute effectivement sur les exportations (-8% à 480 000 barils/jour). Il n'y a donc pas de brusque décrochage entre la production et les exportations de pétrole azerbaïdjanais en 2022 qui permettrait de laisser un espace pour des fournitures de pétrole étranger. Il convient par ailleurs de rappeler que la France n'était, sur la période janvier-août 2022 et selon les douanes azerbaïdjanaises, que le 24e client pour le pétrole de l'Azerbaïdjan (0,26% de l'ensemble des exportations azerbaïdjanaises), et le 11e au sein de l'UE. La France n'importe en outre pas de gaz depuis l'Azerbaïdjan.

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