Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 29/09/2022

M. Fabien Gay attire l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur l'impact des dépenses énergétiques sur le budget de fonctionnement des collectivités territoriales dans un contexte inflationniste.

Si la mise en place d'un bouclier tarifaire a pu limiter l'impact de la hausse des prix de l'énergie sur les particuliers, les collectivités territoriales se trouvent en revanche pour l'essentiel d'entre elles confrontées à leurs propres moyens. En effet, alors que l'augmentation de leurs factures d'énergie est comprise entre 30 et 300 % en moyenne, celles-ci se trouvent aujourd'hui contraintes d'arbitrer entre le maintien de leurs services publics locaux, le financement d'équipements publics et d'investissements majeurs (notamment en matière de transition énergétique) ou l'augmentation des impôts locaux.

Cette situation expose les collectivités territoriales à une grande vulnérabilité, dans un contexte de reprise post-crise sanitaire qui les avait déjà grandement fragilisées. Si leurs capacités d'autofinancement semblaient être en voie de consolidation au 1er janvier 2022, il convient néanmoins d'analyser cette tendance en prenant en compte les nombreux effets de décalage.

En effet, certaines dépenses ne se répercuteront sur les finances locales qu'en 2023, telles que les dépenses énergétiques des établissements scolaires ou encore les interventions de soutien aux délégataires de services publics qui sont de plus en plus nombreux à rencontrer des difficultés de paiement liées aux prix de l'énergie.

Au regard de ces prévisions, les collectivités territoriales devront diriger la majorité de leurs efforts vers l'absorption de l'inflation, tout en composant avec la suppression à venir de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui pèsera sur leurs recettes fiscales. Enfin, peu de collectivités territoriales pourront compter sur leur épargne brute structurelle et elles devront, pour la plupart, faire face à une réduction de leur capacité d'autofinancement pouvant aller jusqu'à 50 %.

Au regard de ce constat, l'annonce d'un bouclier tarifaire exclusivement ciblé sur les collectivités employant moins de dix personnes ne semble apporter qu'une réponse très partielle à ces difficultés pourtant généralisées. Le fonds vert d'1,5 milliard d'euros annoncé par le Gouvernement n'est, pour sa part, pas en capacité de répondre à l'immédiateté des besoins (son versement devant intervenir à l'automne 2023). D'autre part, les critères d'attribution semblent à ce jour s'orienter vers une sélection des collectivités faisant preuve d'une « bonne gestion » ce qui, de toute évidence, se distingue d'une aide construite sur la base des urgences et des besoins constatés.

Dans un contexte inflationniste appelé à durer, le rétablissement de l'accès aux tarifs réglementés de vente (TRV) sur l'énergie pour toutes les collectivités territoriales apparaît être le dispositif le plus efficace, comme en témoigne la protection qu'il garantit actuellement aux communes de moins de 10 agents.

Par ailleurs, alors que se multiplient les défaillances des fournisseurs alternatifs d'énergie et que la variabilité des prix de l'énergie reste forte, les TRV sont un moyen de garantir stabilité et prévisibilité dans les budgets de fonctionnement des collectivités territoriales.

Il souhaite ainsi savoir si le Gouvernement envisage de rétablir l'accès aux TRV à toutes les collectivités territoriales afin de leur permettre d'amortir les effets actuels et à venir de l'inflation sur leurs budgets de fonctionnement.

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Réponse du Ministère de la transition énergétique publiée le 13/10/2022

Nous faisons actuellement face à la plus grave crise énergétique depuis les chocs pétroliers de 1970 en raison du conflit ukrainien. Elle a des conséquences directes sur nos approvisionnements énergétiques et sur les coûts de l'énergie. Les prix de l'énergie expliquent à eux seuls 60 % de l'inflation actuelle. Le Gouvernement mesure bien les effets sur le porte-feuille des Français, sur les finances des collectivités locales et sur la compétitivité des entreprises. Face à cette situation, le Gouvernement agit pour assurer les stocks d'énergies pour cet hiver, pour faire baisser les prix sur les marchés et pour soutenir les Français, les collectivités locales et les entreprises qui subissent la hausse des prix, notamment en raison de spéculations sur les marchés de l'énergie. Plusieurs leviers sont mobilisés pour soutenir les collectivités locales : - les petites collectivités, de moins de 10 employés et moins de 2 M€ de recettes, sont éligibles aux tarifs réglementés de vente d'électricité. La majorité des communes peut donc bénéficier du bouclier tarifaire qui limite la hausse de leur facture d'électricité en moyenne à 4 % TTC ; - toutes les collectivités, éligibles ou non aux tarifs réglementés de vente d'électricité, bénéficient de deux mesures du bouclier tarifaire : - la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) à son minimum depuis le 1er février 2022, passant de 22,5€/MWh à 0,5 €/MWh. Cette réduction fiscale est un effort particulièrement important de l'État à hauteur de 8 milliards d'euros en 2022, représentant un gain pour le bloc communal de 400M€ ; - l'augmentation du volume de l'ARENH (Accès régulé à l'électricité nucléaire historique) à titre exceptionnel pour l'année 2022 qui a permis de réduire de moitié la hausse des prix, de 40 % à 20 %, pour les collectivités. Le Gouvernement et la Commission de régulation de l'énergie sont particulièrement vigilants à la répercussion de l'ARENH par les fournisseurs à leurs clients. Si le Gouvernement n'avait pas pris ces mesures, la hausse des prix aurait été de 35 % TTC pour une commune de taille intermédiaire. Les collectivités bénéficient également de la remise exceptionnelle sur les carburants, relevée à 30 centimes d'euros TTC par litre de carburant jusqu'au 31 octobre 2022, pour leurs flottes de véhicules. Le Gouvernement a renforcé ces aides spécifiques avec le vote d'un filet de sécurité de 568 millions d'euros dans la loi de finances rectificative pour 2022 afin de soutenir les collectivités territoriales dans le contexte inflationniste actuel. 430 M€ seront mobilisés dans ce cadre pour aider le bloc communal à faire face à l'inflation, en particulier des prix de l'énergie (430 M€). Des acomptes pourront être demandés et versés aux collectivités concernées dès cet automne. Le Gouvernement continue par ailleurs de largement mobiliser le levier des dotations d'investissement. La dotation rénovation énergétique qui comprend la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et la dotation de soutien à l'investissement des départements (DSID) a ainsi mobilisé 942 millions d'euros en 2021 en faveur du bloc communal et des départements. De plus, dans le cadre du plan de relance, 950 millions d'euros de DSIL exceptionnelle ont été engagés en faveur du bloc communal, notamment pour soutenir des opérations en faveur de transition écologique. Pour 2022, les dotations d'investissement aux collectivités territoriales sont maintenues à un niveau historiquement élevé, avec notamment plus d'un milliard d'euros de Dotation d'équipement des territoires ruraux et 873 millions d'euros de DSIL. De plus, la dynamique des recettes fiscales des collectivités liées à l'évolution des bases locatives va générer des recettes fiscales supplémentaires dans les budgets locaux. Cette dynamique très favorable et la situation financière globale positive des collectivités ont été soulignées par la Cour des comptes dans son rapport présenté en juillet dernier. Si les aides massives exposées plus haut sont mobilisées pour faire face à la conjoncture actuelle, le Gouvernement accompagne également les collectivités dans leurs projets de rénovation énergétique des bâtiments afin de faire baisser structurellement les coûts de l'énergie grâce à l'efficacité énergétique. Cela sera d'ailleurs l'un des axe structurant du futur « fonds vert » dans le cadre duquel l'État mobilisera au total 1,5 Md€ de crédits pour financer des projets portés dans les territoires. Cela complète l'action des dispositifs portés par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) dont certains, à l'instar du fonds chaleur, peuvent bénéficier aux collectivités. Par ailleurs, le dispositif des certificats d'économies d'énergie (CEE) prévoit des bonifications via le « Coup de pouce chauffage des bâtiments tertiaires » pour le remplacement des équipements de chauffage ou de production d'eau chaude sanitaire utilisant des énergies fossiles par des dispositifs plus efficaces énergétiquement et utilisant des énergies renouvelables. Celui-ci est en place depuis 2020 et jusqu'à fin 2025. Plus d'une cinquantaine d'offres existent au 1er trimestre 2022. Le Gouvernement mène une action résolue pour faire face à cette crise énergétique et engager les actions nécessaires pour atteindre nos objectifs ambitieux de neutralité carbone d'ici 2050. Ce défi collectif sera relevé grâce à un partenariat entre l'État et les collectivités territoriales sur les politiques de transition énergétique. 

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