Question de Mme MULLER-BRONN Laurence (Bas-Rhin - Les Républicains-A) publiée le 06/10/2022

Mme Laurence Muller-Bronn interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les moyens insuffisants dont disposent les collectivités pour lutter contre les installations illicites. En effet, elle est alertée par les communes d'Hindisheim et de Roeschwoog (Bas-Rhin), qui subissent de façon régulière les occupations illégales (terrain de football, terrains privés et agricoles) de gens du voyage, alors qu'elles ont investi dans la mise aux normes d'aires de grand passage, -à hauteur de 600 000 euros pour la communauté de communes du canton d'Erstein et 500 000 euros pour la communauté de communes du Pays-Rhénan- et que des places sont disponibles sur ces aires.
Malgré le recours aux forces de l'ordre pour raisonner ces groupes, afin qu'ils déménagent sur les sites dédiés, les propositions sont souvent refusées et les arrêtés préfectoraux d'expulsion sont contestés par des recours suspensifs au tribunal administratif d'une durée de 72 heures.
La communauté des gens du voyage utilise la procédure en toute mauvaise foi, puisqu'après le délai de 48 heures pour notifier la mise en demeure de quitter les lieux, la saisine du tribunal administratif au moyen d'un formulaire type retarde encore leur expulsion de 72 heures. De plus, les gens du voyage ne s'acquittent pas de leurs factures d'eau et d'électricité, les compteurs étant en effet vandalisés dans ce but.

Cette impunité est légitimement très mal vécue par la population et par les maires qui sont démunis alors même que les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) répondent aux exigences légales de mise en place des équipements d'accueils requis, conformément au schéma départemental d'accueil des gens du voyage (SDAGDV).

Pour toutes ces raisons, elle lui demande ce que le Gouvernement envisage pour renforcer le respect des modalités d'accueil et d'évacuation des gens du voyage, comme par exemple une procédure d'expulsion d'urgence facilitant l'enlèvement et la saisie rapide de leurs véhicules. Ceci permettrait notamment de décourager les installations illicites des gens du voyage.

- page 4720


Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 28/09/2023

Le régime applicable en matière de stationnement des gens du voyage est prévu par la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 modifiée relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage. Il établit un équilibre entre, d'une part, la liberté d'aller et venir et l'aspiration des gens du voyage à pouvoir stationner dans des conditions décentes, et d'autre part, le souci des élus locaux d'éviter des installations illicites susceptibles de porter atteinte au droit de propriété et d'occasionner des troubles à l'ordre public. Les schémas départementaux d'accueil des gens du voyage formalisent l'obligation pour les communes de plus de 5 000 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de créer, d'aménager et d'entretenir des aires d'accueil réservées aux gens du voyage. Lorsque la commune ou l'EPCI se sont dotés d'aires et terrains conformes à ce schéma, le maire ou le président de cet EPCI peut interdire le stationnement des gens du voyage en dehors des aires aménagées et, en cas de violation de cette interdiction, peut demander au préfet de département de mettre en demeure les gens du voyage de quitter les lieux. Lorsque cette mise en demeure n'a pas été suivie d'effets, l'évacuation forcée des résidences mobiles peut alors intervenir dans un délai de 24 heures sous réserve de l'absence de recours devant le juge administratif. La mise en demeure reste par ailleurs applicable pendant un délai de sept jours et peut donc servir de fondement juridique à une nouvelle mesure d'évacuation forcée lorsque la résidence mobile se retrouve à nouveau en situation de stationnement illicite. Ces outils permettent donc d'améliorer la réponse administrative à des stationnements illicites, qui peuvent également être sanctionnés pénalement, l'article 322-4-1 du Code pénal réprimant le délit d'installation illicite en réunion sur un terrain communal ou privé et la loi du 7 novembre 2018 ayant augmenté les sanctions correspondantes, qui sont désormais d'un an d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. De ce point de vue, la création d'une éventuelle procédure d'expulsion d'urgence ne paraît pas nécessaire dès lors que le président du tribunal administratif ou son délégué, saisi d'un recours en annulation contre l'arrêté préfectoral de mise en demeure, a l'obligation de statuer dans un délai de quarante-huit heures, au lieu de 72h avant l'entrée en vigueur de la loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté. La saisine du juge administratif est elle-même enfermée dans le délai d'exécution de la mise en demeure qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures. Tant les requérants que le maire de la commune, le président de l'EPCI, le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain occupé ont donc l'assurance qu'il sera statué à brève échéance sur la légalité de la mise en demeure. Réduire encore le délai, déjà très contraint, dont disposent les gens du voyage pour saisir le juge administratif, porterait atteinte au droit au recours effectif, que la jurisprudence du Conseil constitutionnel rattache à l'article 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen.

- page 5636

Page mise à jour le