Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 06/10/2022

M. Hervé Maurey attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales, sur l'avenir des communes nouvelles.
Dans son rapport sur les communes nouvelles remis en juillet 2022, l'inspection générale de l'administration dresse un bilan « décevant » des communes nouvelles. D'un point de vue quantitatif, le nombre de communes nouvelles créées (787 communes nouvelles regroupant 2 500 communes) apparaît « relativement limité » et celles-ci sont souvent le fruit d'un regroupement de deux communes (56 % des cas) qui ne sont pas de petites communes rurales. Sur ce plan, la mission indique que « la commune nouvelle n'a, à ce jour, pas démontré sa capacité à répondre aux difficultés générées par l'émiettement communal ».
Le rapport indique que ce dispositif n'a pas atteint les objectifs qui lui étaient assignés. La création d'une commune nouvelle « ne garantit pas toujours une meilleure représentation du territoire et de ses habitants auprès de l'État et des autres collectivités ». La mission relativise la contribution de la commune nouvelle au maintien et à l'amélioration des services publics de proximité et sa capacité à porter un projet de territoire. Il indique enfin que « la commune nouvelle ne génère pas, en elle-même, une amélioration de l'efficience de l'action publique locale », avec de réelles mutualisations permettant des économies de coût de gestion.
La mission justifie l'atonie observée du dispositif par des raisons conjoncturelles (crise sanitaire, élections municipales,…) mais aussi structurelles, sa mise en place « ne constitue, pour les élus, ni une priorité, ni une nécessité absolue ».
Elle préconise une réforme plus globale du bloc communal et de la relation entre communes et intercommunalités, en donnant la possibilité aux collectivités territoriales de définir, au niveau départemental, l'organisation du bloc communal la mieux adaptée à leurs caractéristiques. Concrètement, elle recommande la mise en place d'une « commission départementale des coopérations territoriales » animée par le président du conseil départemental pour débattre de cette organisation (adaptation des seuils de l'intercommunalité, détermination des communes ayant vocation à fusionner,…) et dont les travaux se traduiraient par un « document départemental d'orientations de coopération communale et intercommunale » déterminant les « évolutions souhaitables dans l'organisation du bloc local », sans valeur prescriptive.
L'inspection préconise également de faire le « pari de la commune-communauté », appelant à des aménagements de son régime de création et de fonctionnement et la mise en place de nouvelles incitations financières.
Enfin, elle propose de moduler et de mieux individualiser les modalités d'accompagnement de l'État (par exemple l'adaptation du montant de l'aide et de sa durée) en fonction des spécificités des communes nouvelles et de l'ambition du projet. Elle recommande de donner la possibilité au préfet d'utiliser le pouvoir de dérogation prévu par le décret du 8 avril 2020 pour aménager les effets de seuil au bénéfice de ces communes.
Aussi, il souhaiterait connaître les suites qu'elle compte donner à ces recommandations.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 26/10/2023

Le Gouvernement a pris connaissance avec intérêt du rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) publié le 21 septembre 2022 et intitulé "les communes nouvelles : un bilan décevant et des perspectives incertaines". Ce rapport dresse un état des lieux inédit du dispositif depuis sa création par la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. Si l'IGA identifie certaines limites au dispositif des communes nouvelles, elle met surtout en évidence la nécessité d'inscrire leur création dans le cadre d'un projet de territoire cohérent. Sous cette condition, les communes nouvelles permettent de mettre en oeuvre une action publique plus efficace sur leur territoire. Le rapport porte une attention particulière au dispositif de commune-communauté, créé par la loi du 1er août 2019 visant à adapter l'organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires. Il permet à une commune nouvelle constituée à l'échelle de son établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) d'exercer aussi bien les compétences communales qu'intercommunales. Il ne vise pas à remettre en cause les EPCI-FP existants et doit être appréhendé comme un dispositif complémentaire. Les élus peuvent ainsi demander que la commune nouvelle issue du regroupement de toutes les communes d'un EPCI-FP rejoigne une nouvelle intercommunalité. Le rapport de l'inspection générale de l'administration préconise d'élargir juridiquement les possibilités de création de communes-communautés, en autorisant cette création par transformation de tout ou partie d'un EPCI-FP existant. Cette proposition, qui consiste à scinder un EPCI-FP en deux communes-communautés, n'apparaît pas cohérente avec la nature et le sens d'un tel projet, qui a été conçu par le législateur comme un outil d'intégration et de mutualisation et non de scission des EPCI-FP. Les communes nouvelles bénéficient aujourd'hui d'un pacte de stabilité, dispositif complet et incitatif ayant été réformé en 2020. Ce régime favorable se traduit concrètement par les mesures suivantes : une garantie spécifique visant à neutraliser une baisse de leur dotation forfaitaire et de leurs dotations de péréquation suite à la fusion, pendant trois ans. La loi de finances pour 2023 prévoit que ces garanties seront prolongées d'un an pour les communes nouvelles qui y étaient éligibles pour la dernière année en 2022 ; une exemption de contribution au redressement des finances publiques (CRFP) pendant ses années d'application, entre 2014 et 2017 ; une dotation d'amorçage de 6 euros par habitant perçue pendant trois ans, pouvant atteindre 10 euros par habitant pour les petites communes nouvelles ; à compter de 2023, une éligibilité dérogatoire à la dotation de solidarité rurale (DSR) lorsque les communes nouvelles dépassent les 10.000 habitants mais peuvent être objectivement qualifiées de rurales. En conséquence, en 2022, la dotation globale de fonctionnement (DGF) moyenne des communes nouvelles s'élève à 220 euros par habitant pour une moyenne nationale de 165 euros, soit 32 % de plus. Introduire une logique de modulation et d'individualisation, à la discrétion du préfet et au détriment d'un cadre national, amènerait à une rupture d'égalité manifeste entre les différentes communes nouvelles. Le pouvoir de dérogation du préfet, tel qu'issu du décret du 8 avril 2020, ne concerne que les dispositions réglementaires et ne peut ainsi s'appliquer au pacte de stabilité prévu par des dispositions législatives. La dotation d'amorçage calculée en fonction de la population et l'éligibilité dérogatoire à la DSR témoignent déjà d'une prise en compte des différentes réalités des communes nouvelles. Le Gouvernement a la volonté d'accompagner le mouvement de création de communes nouvelles, sur la base du volontariat des communes concernées. Il engagera des travaux pour évaluer notamment comment aménager les incitations financières, dans le respect du principe d'égalité avec les autres communes, dans le cadre d'un prochain projet de loi de finances.

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