Question de Mme BRULIN Céline (Seine-Maritime - CRCE) publiée le 13/10/2022

Mme Céline Brulin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la situation des producteurs de pomme de terre.
Avec les conditions climatiques extrêmes de la période estivale, il est projeté une dégradation historique du rendement de la production de la pomme de terre, à hauteur de - 20 % par rapport à la moyenne des 20 dernières années.
À cela s'ajoute la hausse des coûts de production avec le contexte inflationniste de ces derniers mois. Ainsi, la production d'une tonne de pommes de terre couterait de 25 % à 30 % plus cher que l'année dernière, sans compter l'explosion des coûts énergétiques de stockage avec une hausse de 300 % des prix de l'électricité dans les contrats.
Une situation intenable pour les producteurs qui craignent de voir leur trésorerie s'effondrer au risque de perdre leur exploitation.
Les représentants de cette filière porte des solutions pour aider les producteurs à passer ce cap, avec par exemple la mise en œuvre d'un prêt garanti par l'État remboursable en fin de récolte ou la revalorisation des aides couplées destinées à la fécule au sein de la politique agricole commune (PAC).
Elle lui rappelle que le département de la Seine-Maritime est un des premiers producteurs du pays de pommes de terre avec plus de 13 000 hectares, participant pleinement à garantir à notre pays, sa première place d'exportateur mondial de pommes de terre.
C'est pourquoi elle lui demande de lui préciser les mesures envisagées pour soutenir l'ensemble de cette filière.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 23/02/2023

Les données AGRESTE de novembre 2022 font état d'une production française de pommes de terre de conservation et demi-saison estimée à 6 Mt diminuant de 9,3 % sur un an et de 6,8 % sur cinq ans. Le rendement est de 39,1 t/ha (-11,0 % sur un an). Le contexte de la crise ukrainienne entraîne une hausse générale du coût des matières premières nécessaires à la production agricole (intrants, emballages …), dont l'énergie, notamment pour la filière plants de pomme de terre, forte consommatrice d'électricité au titre du stockage des tubercules. Pour atténuer l'impact de la hausse des prix de l'énergie, le Gouvernement a mis en place une série de mesures de soutien aux entreprises. Toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, bénéficient de l'allègement, à son minimum légal européen, de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) et du mécanisme d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) permettant à tous les fournisseurs alternatifs de s'approvisionner en électricité auprès d'EDF dans des conditions fixées par les pouvoirs publics. Dans le cadre du plan de résilience économique et sociale, les exploitants agricoles sont éligibles au dispositif d'aide aux surcoûts de gaz et d'électricité. Cette aide a pour objectif de pallier les effets de la crise énergétique, de soutenir la compétitivité des entreprises et d'éviter les arrêts de production des sites les plus consommateurs de gaz et d'électricité, notamment ceux assurant des productions essentielles. Suite à la publication par la Commission européenne, le 28 octobre 2022, d'un nouvel encadrement temporaire de crise, le Gouvernement a fait évoluer cette aide fin novembre 2022, permettant d'accélérer les décaissements, de prolonger le dispositif en 2023 et d'augmenter l'intensité du soutien aux entreprises. En complément, pour les très petites entreprises (TPE) dont l'installation électrique est de faible puissance, c'est-à-dire inférieure à 36 kilovoltampères (kVA), le bouclier tarifaire permet de plafonner la hausse des factures d'électricité à 15 % à compter du 1er février 2023. Enfin, toutes les TPE qui ne sont pas protégées par le bouclier tarifaire car elles disposent d'un compteur électrique d'une puissance supérieure à 36 kVA et toutes les petites et moyennes entreprises bénéficient, depuis le 1er janvier 2023, du nouveau dispositif d'amortisseur électricité annoncé le 27 octobre 2022. Ce dispositif instaure un soutien à hauteur de 50 % de la différence entre le prix du contrat et un prix plancher de 180 €/mégawatt-heure (MWh), avec un plafond de 500 €/MWh dans le calcul de l'aide. Les entreprises, y compris les exploitations agricoles, dont la trésorerie est pénalisée de manière directe ou indirecte par les conséquences économiques du conflit en Ukraine peuvent également bénéficier de nouveaux soutiens de trésorerie (prêts BPI de long terme, nouveau prêt garanti par l'État – PGE « Résilience »). Dans l'objectif de faciliter la signature des contrats de gaz et d'électricité des entreprises, le Gouvernement a également annoncé la mise en place d'une garantie publique sur les cautions bancaires qui sont demandées par les fournisseurs à leurs clients lors de la signature de contrats d'énergie. En parallèle, les discussions se poursuivent au niveau européen en vue d'établir des mesures pour limiter à moyen terme l'impact des pressions inflationnistes sur l'économie et les ménages, et encadrer les prix de l'énergie, notamment en découplant les prix de l'électricité et du gaz. Le plan de résilience annoncé le 16 mars 2022 a également fait l'objet d'un abondement en 2022, pour le secteur agricole, de l'enveloppe de prise en charge des cotisations sociales à hauteur de 150 millions d'euros, pour appuyer spécifiquement les exploitations confrontées à des hausses de charges qui dégradent leur compte d'exploitation de manière significative. Sur le plus long terme, le plan de résilience prévoit la mise en œuvre d'un plan spécifique aux fruits et légumes. Les travaux ont été officiellement lancés par le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire le 27 septembre 2022. Ce plan vise à donner un cadre stratégique et identifier les leviers d'actions opérationnels dans l'objectif d'inverser la tendance baissière des courbes de production de fruits et légumes à horizon 2030. Afin d'élaborer ce plan des discussions associent professionnels et services de l'État concernés sur les grands axes stratégiques suivants : protection des cultures ; compétitivité, investissements, innovation ; recherche, expérimentation, formation et renouvellement des générations ; dynamisation de la consommation de fruits et légumes dans le modèle alimentaire. Le plan d'investissement France 2030 soutient aussi les efforts de décarbonation de l'agriculture et la constitution de filières d'intrants durables, avec l'objectif de faire émerger des leaders de la production agricole et agroalimentaire et des solutions pour l'agriculture. Ainsi, l'appel à projet « Résilience et Capacités Agroalimentaires 2030 », porté par Bpifrance, permet notamment de soutenir des projets d'industrialisation et de structuration des filières afin de répondre aux besoins alimentaires de demain et de mettre en œuvre la transition agro-écologique. La production française de pommes de terre féculières constitue, comme la pomme de terre pour le frais et la pomme de terre d'industrie, une culture de diversification intéressante dans les assolements de grandes cultures du Nord et de l'Est du pays et contribue à l'emploi dans ces régions avec deux grandes usines situées au cœur des zones de production. Dans le cadre des soutiens prévus dans la politique agricole commune (PAC), la production de pommes de terre féculière bénéficie depuis 2015 d'une aide couplée avec une enveloppe annuelle de 1,8 million d'euros, correspondant à un montant moyen d'aide de 80 euros par hectare. Cette aide couplée a été maintenue dans le plan stratégique national pour la programmation 2023-2027 de la nouvelle PAC avec une enveloppe et un montant moyen à l'hectare inchangés, pour assurer un soutien de la filière pour les campagnes à venir. Face aux difficultés conjoncturelles liées à la sécheresse qui a sévi en 2022 et à la forte hausse des coûts des intrants, les producteurs de pommes de terre féculières ont pu bénéficier des soutiens mis en place par l'État, comme la mobilisation exceptionnelle des calamités agricoles dans un calendrier resserré, le dégrèvement d'office de la taxe sur le foncier non bâti, le report d'échéances ou la prise en charge de cotisations sociales, le plan de résilience économique et sociale avec notamment la prolongation du dispositif de prêts garantis par l'État qui peut concerner les agriculteurs, et les aides pour les entreprises grandes consommatrices de gaz et d'électricité qui peuvent intéresser les industries féculières.

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