Question de Mme DUMAS Catherine (Paris - Les Républicains) publiée le 20/10/2022

Mme Catherine Dumas interroge Mme la ministre de la culture sur l'avenir du monde de la musique, en particulier des luthiers et archetiers.
Elle s'inquiète de l'interdiction de l'exploitation et la commercialisation du pernambouc, bois brésilien indispensable aux luthiers et archetiers, envisagées par la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), qui se réunira à Panama fin novembre 2022.
Elle note que l'interdiction d'importation de cette matière première serait une catastrophe pour les 109 archetiers français qui représentent près de 15 % de l'activité mondiale et dont l'excellence fait rayonner la France et est unanimement reconnue dans le monde.
Elle précise par ailleurs que cette décision conduirait à des obstacles administratifs considérables pour les artisans d'art d'une part, mais aussi pour les musiciens d'autre part, en raison de l'obligation de détenir un certificat délivré par les autorités CITES, que cela soit pour les instruments anciens ou contemporains. Elle précise que ce certificat, à renouveler tous les trois ans, serait obligatoire pour chaque transaction commerciale et pour chaque passage de frontière, ce qui compliquerait l'ensemble du marché artisanal des instruments de musique et perturberait sensiblement les déplacements des professionnels du monde de la musique.
Elle reconnaît la rareté de cette matière première et la nécessité de protéger l'espèce du trafic illégal. Elle souligne de ce fait que, depuis 2007, la vente de ce bois rare est déjà très réglementée. Elle rappelle les initiatives des professionnels pour protéger l'espèce, par l'intermédiaire notamment du programme international de conservation du pernambouc (IPCI), qui a permis de replanter près de 340 000 arbres.
Elle souhaite donc lui demander quelle position prendra le Gouvernement lors de la prochaine CITES fin novembre 2022, et comment elle compte accompagner les luthiers et les archetiers pour faire face à cette éventuelle nouvelle réglementation.

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Réponse du Ministère de la culture publiée le 26/01/2023

En juin 2022, le Brésil a souhaité faire évoluer le classement du bois précieux de pernambouc concerné par la « Convention on International Trade of Endangered Species » (CITES). Déjà classé à l'annexe 2 en tant qu'« espèce protégée » depuis 2007, le Brésil entend désormais le classer à l'annexe 1, qui est la protection la plus élevée, correspondant aux espèces menacées d'extinction. En vertu de l'article II de la convention, « le commerce des spécimens de ces espèces doit être soumis à une réglementation particulièrement stricte afin de ne pas mettre davantage leur survie en danger, et ne doit être autorisé que dans des conditions exceptionnelles ». Cette stipulation équivaut à une quasi interdiction de commercialisation et de circulation du pernambouc. La CITES étant une convention internationale, un groupe de travail interministériel a été constitué à l'été 2022, associant les ministères chargés de l'environnement, des affaires étrangères, de la culture et de l'économie, en vue d'arrêter une position unique de la France, en lien avec les autres pays membres de l'Union européenne pour peser dans les négociations de la « Conference of parties » (COP), organe décisionnel des conventions internationales. Celui-ci rendra son avis sur la proposition brésilienne fin novembre 2022. Alerté en amont par la Chambre syndicale de la facture instrumentale, le ministère de la culture a pour sa part exprimé son opposition ferme au classement à l'annexe 1 du pernambouc, prenant la mesure des conséquences négatives d'un tel classement sur la fabrication des archets de haute qualité, l'archèterie française (120 emplois en France) et la mobilité des professionnels du monde de la musique en raison de l'obligation de détenir un certificat délivré par les autorités CITES. L'article III de la convention stipule en effet que « l'exportation d'un spécimen d'une espèce inscrite à l'Annexe I nécessite la délivrance et la présentation préalables d'un permis d'exportation ». La CoP19 de la CITES a pris fin au Panama le 25 novembre dernier et s'est achevée positivement avec le maintien de l'espèce en annexe 2. Cette décision est assortie d'un plan d'action adressé au secrétariat général de la CITES dont la mise en œuvre est de son ressort et sera notamment traitée lors des comités des plantes et permanents de cette instance. Il comprend plusieurs volets : la lutte contre le trafic illégal, l'inventaire de la ressource, un plan de conservation de l'espèce et la traçabilité et l'utilisation du bois de plantation. Le secteur doit être partie prenante de ce travail jusqu'à la CoP20 et le ministère de la culture suivra ce sujet de près respectant son engagement auprès de la filière.

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