Question de M. GOLD Éric (Puy-de-Dôme - RDSE) publiée le 20/10/2022

M. Éric Gold attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les obligations des propriétaires d'ouvrages hydrauliques, et notamment de seuils, pour répondre au besoin de continuité écologique des cours d'eau. Si des aménagements sont parfois nécessaires, leur destruction systématique n'est pas la règle. De plus, les aléas climatiques se répètent et la sécheresse frappe désormais une grande partie du territoire national. Alors que bon nombre de seuils ont permis ou permettent encore des retenues d'eau non négligeables, la question de leur aménagement doit prendre en compte, au-delà du potentiel hydroélectrique de ces ouvrages, leur utilité dans la nécessaire captation de l'eau. Or, trop souvent encore, les services instructeurs compétents en matière de continuité écologique orientent les collectivités et les propriétaires sans véritable discernement, sur des travaux coûteux et qui ne sont pris en charge que très partiellement. À l'heure où l'eau, dans tous ses aspects, est un enjeu majeur, il lui demande donc de préciser ses intentions sur les travaux envisageables, notamment en fonction de la taille et de l'utilité des ouvrages.

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Transmise au Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie publiée le 23/03/2023

La politique de restauration de la continuité écologique concilie les enjeux de restauration des fonctionnalités des cours d'eau avec le déploiement de la petite hydroélectricité, la préservation du patrimoine culturel et historique, ou encore les activités sportives en eaux vives. Il ne s'agit en aucun cas d'une politique visant la destruction des moulins à eau et autres ouvrages en cours d'eau. À ce jour, la politique de priorisation mise en œuvre par le Gouvernement a permis d'identifier les cours d'eau sur lesquels il était important d'intervenir prioritairement pour procéder à de la restauration écologique, qui représentent 11 % des cours d'eau. Sur ces cours d'eau, la politique est de procéder prioritairement à des interventions sur environ 5 000 ouvrages sur les 25 000 ouvrages obstacles à l'écoulement qu'ils comptent. La solution technique retenue consiste majoritairement à aménager l'ouvrage (mise en place d'une passe à poisson, d'une rivière de contournement, abaissement du seuil…), plutôt qu'à le supprimer. Depuis 2012, environ 1 400 effacements d'ouvrages ont été financés par les Agences de l'eau sur ces 11 % de cours d'eau, soit 28 % des ouvrages à traiter, soit 1 % de l'ensemble des ouvrages obstacles à l'écoulement des cours d'eau français. Les petites retenues en rivière n'ont pas d'effet protecteur contre la sécheresse. La quantité d'eau dans une rivière se mesure par le débit, et ce débit n'est pas augmenté par les petites retenues en cours d'eau. Par conséquent, il n'est pas possible d'utiliser ces retenues pour prélever de l'eau pour un usage ou un autre, car l'autorisation de ces prélèvements dépend du débit observé. Il est vrai, en revanche, que des petits ouvrages en rivière peuvent contribuer à maintenir une ligne d'eau plus haute, ce qui entretient l'illusion d'une eau disponible, mais tend à masquer le dysfonctionnement structurel et la gravité de la sécheresse en cours. D'autres idées dépourvues de fondement scientifique circulent régulièrement sur la continuité écologique, et ont fait l'objet d'éléments de réponse de la part du conseil scientifique de l'Office français de la biodiversité en avril 2018, sous la forme d'une note disponible à l'adresse suivante : https://professionnels.ofb.fr/sites/default/files/pdf/cdr-ce/2018_Delib_CS_AFB_Continuite.pdf. Concernant le coût des solutions de restauration de la continuité écologique, les Agences de l'eau ainsi que certaines collectivités (département, région) subventionnent les travaux afin de limiter autant que possible le reste à charge pour le propriétaire. On notera en revanche que depuis la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021, une des solutions les moins onéreuses, l'effacement, n'est plus accessible aux propriétaires de certains ouvrages (en particulier les moulins à eau) situés sur les 11 % de cours d'eau où une obligation de restaurer la continuité existe. De nombreux propriétaires et gestionnaires locaux le regrettent car l'effacement est aussi la solution qui induit le moins de contraintes et charges d'entretien (un seuil doit en effet être entretenu régulièrement, de même qu'une éventuelle passe à poissons ou rivière de contournement), et qui est la plus bénéfique pour la restauration des fonctionnalités naturelles du cours d'eau. Les propriétaires de ces ouvrages doivent donc envisager une nouvelle solution (passe à poisson ou rivière de contournement, par exemple), généralement plus coûteuse. La politique de restauration de la continuité écologique n'a pas entravé le développement de la petite hydroélectricité, qui a progressé significativement au cours des dernières années (plus de 150 MW supplémentaires entre 2018 et 2021), et n'est limité que par le faible potentiel restant. Selon les projets identifiés auprès de la filière, ce sont 250 MW qui pourraient être installés d'ici 2028 (en sites vierges comme sur ouvrages existants), toutes tailles d'installations confondues. Ces chiffres sont provisoires, en cours de discussion avec les acteurs de l'hydroélectricité. Ils représentent 1 % environ des objectifs nationaux d'installation d'ENR sur la même période (PPE 2023-2028). Le potentiel de développement peut donc objectivement être qualifié d'intrinsèquement limité. Le développement de la petite hydroélectricité doit être, efficace, réaliste et planifiée, en cohérence avec la nécessité de préserver et restaurer les écosystèmes aquatiques fonctionnels, indispensables à l'adaptation au changement climatique.

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