Question de M. BONNUS Michel (Var - Les Républicains) publiée le 17/11/2022

Question posée en séance publique le 16/11/2022

M. le président. La parole est à M. Michel Bonnus, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Bonnus. Ma question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Vendredi dernier, l'Ocean Viking a accosté dans le port de Toulon. À son bord, 230 migrants, dont une cinquantaine de mineurs, secourus en mer entre la Libye et l'Italie. Depuis des semaines, ce bateau naviguait sans destination. L'Italie refusait très fermement de l'accueillir, passant outre les conventions européennes. La France a dû se résoudre à l'accueillir. Pourtant, d'autres voies, alliant humanité et dignité, soutien et fermeté, étaient envisageables.

Monsieur le ministre, vous annonciez vouloir réguler les flux migratoires. Vous annonciez aussi des négociations pour convaincre l'Italie d'accueillir le navire, alors qu'il était clair que son nouveau gouvernement refuserait. Finalement, vous avez ordonné son accueil et vous avez ouvert la voie aux passeurs. L'accueil de ce navire et la gestion de ces migrants créent un précédent d'une grande gravité.

Du fait de votre manque de préparation et d'anticipation, des vices de procédure ont été soulevés. À cause du manque de moyens dont souffre la justice, leur situation n'a pas pu être examinée dans les temps.

La conséquence est que, au moment où je vous parle, des migrants sont libres (Exclamations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.), sans que leur situation ait été examinée. Faute de moyens légaux de rétention, des mineurs ont déjà fugué. Votre incapacité à intervenir et, surtout, à anticiper les difficultés met gravement en cause la responsabilité du Gouvernement.

Votre prédécesseur Gérard Collomb nous apprend qu'il a préféré démissionner plutôt que de se voir imposer par le Président de la République la création d'un grand centre d'accueil de migrants dans la ville de Toulon et de créer ce genre de situation et d'inquiétudes pour les habitants de Toulon et du Var.

Nous ne serons jamais insensibles, évidemment, à la souffrance des enfants, des femmes ou des hommes qui recherchent l'asile. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.) Mais ne voyez-vous pas que, dans nos territoires déjà fragilisés et en manque de moyens, nous sommes aujourd'hui incapables de les assumer ? Nous ne voulons pas que nos côtes deviennent une nouvelle cible privilégiée pour les passeurs. Ma question est la suivante : monsieur le ministre, qu'allez-vous faire si de nouveaux bateaux se présentent ? À quoi les Toulonnais et les Français doivent-ils s'attendre ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère de la justice publiée le 17/11/2022

Réponse apportée en séance publique le 16/11/2022

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Laurence Rossignol. Vous avez changé de ministre ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur, au fond, la réponse est assez simple. Il était de notre honneur d'accueillir ces migrants, et notamment les 44 enfants, qui se trouvaient en mer depuis quinze jours. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, GEST, SER et CRCE.) Cela s'appelle tout simplement l'humanisme, une valeur dont la France s'honore depuis des siècles et qui fait son universalité.

J'aurais presque envie de vous poser directement la question, monsieur le sénateur : que fallait-il faire à compter du moment où les Italiens, priés d'accueillir ces passagers, ne les ont pas accueillis ?

Mme Sophie Primas. Il fallait anticiper !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Vous évoquiez la justice et ses moyens. Le tribunal judiciaire de Toulon s'est mobilisé pour multiplier le nombre de juges des libertés et de la détention (JLD) et de membres du parquet afin de traiter immédiatement, et dans l'urgence, ces dossiers.

Des décisions ont été rendues. Certaines font l'objet d'un appel. Vous le savez, la séparation des pouvoirs m'interdit de commenter ces décisions. Qu'allons-nous faire pour l'avenir ? Eh bien ! Nous allons nous battre pour que chaque pays européen prenne sa part. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Lors de la dernière campagne présidentielle, un éminent représentant de l'extrême droite, voyant les images de migrants massés à la frontière polonaise, a dit qu'il fallait les laisser crever de froid. (Marques d'agacement sur les travées du groupe Les Républicains.) Ce n'est pas l'option retenue par le Gouvernement auquel j'ai l'honneur d'appartenir. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, GEST, SER et CRCE.)

Mme Sophie Primas. Ce n'est pas la nôtre non plus !

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