Question de Mme BONNEFOY Nicole (Charente - SER) publiée le 24/11/2022

Mme Nicole Bonnefoy attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les difficultés rencontrées par de nombreux ménages pour acquérir leur logement, du fait des modalités de calcul du taux d'usure.

Actuellement, près d'une demande sur deux de prêt immobilier est refusée en France en raison principalement de l'évolution du taux d'usure et ce sont, bien souvent, les ménages modestes et moyens qui ne peuvent réaliser leurs projets immobiliers.

Or, selon de nombreux spécialistes, une actualisation mensuelle du taux d'usure pourrait résoudre cette situation. En effet, le taux d'usure tel qu'il est actuellement établi n'est pas actualisé en temps réel, ce qui aboutit à empêcher la distribution de crédit à des demandeurs pourtant solvables, à écarter les primo-accédants comme les ménages plus âgés.

De plus, depuis la réforme du régime d'assurance avec la mise en place de la libre concurrence, où les assurés peuvent changer d'assurance à tout moment, l'inclusion des frais d'assurance des emprunteurs dans le calcul du taux d'usure n'apparait plus nécessaire et indispensable.

Aussi, elle souhaiterait savoir si le Gouvernement compte réformer les modalités de calcul du taux d'usure pour mettre un terme à cette situation inquiétante qui paralyse l'accession à la propriété des ménages.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 19/01/2023

Les modalités de calcul du taux d'usure sont définies par l'article L.314-6 du code de la consommation, qui dispose que « constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des opérations de même nature comportant des risques analogues […] ». Conformément aux articles D.314-15 et D.314-16 du code précité, les taux effectifs moyens sont calculés trimestriellement par la Banque de France « selon une moyenne arithmétique simple des taux effectifs globaux observés », via des collectes auprès des établissements prêteurs. Le taux d'usure vise à protéger les emprunteurs, notamment les plus fragiles, d'une charge de la dette excessive. La formule de calcul du taux d'usure permet de contenir les taux d'intérêt dans une fourchette réduite, qui bénéficie ainsi à la majorité des emprunteurs. Toutefois, la remontée rapide des taux, que nous connaissons depuis quelques semaines, a pu conduire le niveau actuel du taux d'usure à devenir trop contraignant et à gripper l'accès au crédit des particuliers. Le gouvernement a donc organisé un cycle de travail avec l'ensemble des parties concernées (Banque de France, Trésor, banques, associations de consommateurs…) afin de faire un état des lieux exhaustif des impacts du taux d'usure actuel et d'examiner les mesures de correction possibles. Un nouveau mode de collecte des taux pratiqués par les banques a ainsi été mis en œuvre pour avoir la vue la plus fine et la plus récente des taux moyens. Aussi, au 1er janvier, les différents taux d'usure ont connu une hausse significative permettant d'amplifier l'accès au crédit des particuliers. Ainsi, le taux d'usure des crédits immobiliers à 20 ans a augmenté de 0,52%, en passant de 3,05% à 3,57%. Dans ces conditions de remontée du taux d'usure, le Gouverneur de la Banque de France n'a pas souhaité proposer de déroger à la formule de calcul du taux d'usure. En effet,   l'article L. 314-8 du code de la consommation ne permet au Gouverneur de la Banque de France de proposer de déroger à la formule de calcul du taux d'usure qu'en cas de circonstances exceptionnelles. S'agissant de la prise en compte du coût de l'assurance emprunteur, la directive 2014/17/UE sur les crédits relatifs aux biens immobiliers définit le coût total du crédit comme tous les coûts que le consommateur doit payer au titre du contrat de crédit et qui sont connus du prêteur, incluant les intérêts, les commissions, les taxes, les frais des intermédiaires de crédit, nécessaires pour obtenir le crédit ou pour l'obtenir aux conditions annoncées. Certaines garanties d'assurance emprunteur étant rendues obligatoires pour obtenir un prêt, leur coût, qui peut parfois représenter un montant très important, doit être inclus dans le calcul du coût total du crédit. Ainsi, supprimer l'assurance emprunteur du champ d'application du taux d'usure ferait perdre à celui-ci son caractère protecteur. En effet, une part importante du coût du crédit pourrait être imposée à l'emprunteur au-delà de l'usure. Le gouvernement restera particulièrement vigilant à l'évolution de l'accès au crédit, afin de s'assurer que le taux d'usure permette de protéger contre une charge de la dette excessive, et non de restreindre l'accès au crédit.

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