Question de M. LEVI Pierre-Antoine (Tarn-et-Garonne - UC) publiée le 15/12/2022

M. Pierre-Antoine Levi attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les conséquences de l'inflation sur les projets d'investissement locaux finançables au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL).

En effet, la forte inflation que connaît notre pays entraîne d'importants surcoûts sur les montants initialement validés par les communes et intercommunalités dans les appels à projets de la DETR et de la DSIL.

Certaines collectivités risquent de ne pas pouvoir faire aboutir certains projets, n'étant pas en mesure de compenser le différentiel entre les montants initiaux, et ceux actualisés.

Il souhaiterait savoir s'il ne serait pas envisageable de prendre en compte les surcoûts générés par l'inflation, en la faisant entrer dans la part subventionnable de la DETR et de la DSIL lorsque celle-ci n'est pas à son maximum, ou encore s'il ne serait pas possible de redéployer les crédits non consommés de l'année sur l'appel à projets suivant, dans une dotation complémentaire destinée aux dossiers connaissant d'importants surcoûts.

De façon plus générale, il l'interroge sur les moyens qu'il compte mettre en œuvre pour soutenir l'investissement local dans un contexte de forte inflation.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 25/01/2023

Réponse apportée en séance publique le 24/01/2023

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, auteur de la question n° 315, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le président, madame la ministre, la crise de l'inflation que nous connaissons depuis maintenant plusieurs mois a d'importantes conséquences sur les projets d'investissements locaux finançables au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL).

En effet, les très importants surcoûts sur les montants initialement validés par les communes et intercommunalités risquent d'empêcher l'aboutissement de certains projets. Certaines collectivités ne sont plus en mesure de compenser le différentiel entre les montants initiaux et ceux qui sont actualisés.

Vous savez, madame la ministre, que ces projets sont parfois vitaux pour les petites communes et nos territoires ruraux.

C'est par exemple le cas d'un projet de requalification de centre-bourg dans la commune d'Orgueil, dans mon département, le Tarn-et-Garonne. Sur un projet d'environ 820 000 euros, la commune avait obtenu 640 000 euros de financement, avec un reste à charge de 180 000 euros.

Compte tenu de la crise de l'inflation et de la nécessité de relancer le marché initial déclaré infructueux, le surcoût des travaux s'est élevé à 44 % et le reste à charge pour la commune est finalement de 480 000 euros : 300 000 euros de plus que le montant initial, ce n'est pas tenable pour le budget de cette petite commune !

En l'état, la commune d'Orgueil, comme des milliers d'autres qui sont dans le même cas, devra certainement renoncer à ses projets stratégiques.

En parallèle, la préfecture du Tarn-et-Garonne aurait, en 2022, rendu 1 million d'euros de DETR non consommée au titre des années précédentes.

Ne serait-il pas possible de redéployer les crédits annuels non consommés sur l'appel à projets suivant, dans une dotation complémentaire destinée aux dossiers subissant d'importants surcoûts ? Ou ne serait-il pas envisageable de prendre en compte les surcoûts générés par l'inflation, en faisant entrer celle-ci dans la part subventionnable de la DETR et de la DSIL lorsque cette part n'est pas à son maximum ?

De façon plus générale, madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer les moyens que vous comptez mettre en œuvre afin de soutenir l'investissement local dans un contexte de forte inflation ?

Je vous remercie par avance de votre réponse, qui sera scrutée par des milliers de maires et de présidents d'intercommunalités.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur, les dotations d'investissement, telles que la dotation d'équipement des territoires ruraux ou la dotation de soutien à l'investissement local, permettent chaque année de soutenir de nombreux projets d'investissement portés par les communes et les groupements éligibles.

En 2023, avec près de 2 milliards d'euros en autorisations d'engagement – et même 4 milliards d'euros en incluant le fonds vert –, le soutien de l'État à l'investissement local est maintenu à un niveau particulièrement élevé, afin d'accompagner au mieux le dynamisme des territoires.

Vous avez raison, dans un contexte d'inflation, les collectivités peuvent faire face à davantage de difficultés dans le financement des projets d'investissement qu'elles souhaitent porter.

L'État les accompagne dans ces projets, en apportant un soutien financier qui peut aller jusqu'à 80 % des financements publics. Ce soutien comprend le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), qui intervient en moyenne à hauteur de 16 %, et ce sur la base du montant définitif des dépenses éligibles.

En principe, il n'est pas possible d'augmenter le taux de subvention DETR ou DSIL figurant dans l'arrêté attributif. Il s'agit d'une règle de bonne gestion budgétaire, permettant de sécuriser la trajectoire des dépenses. Cela inclut le cas où un projet, déjà subventionné, connaîtrait en cours de réalisation des surcoûts par rapport aux montants initialement prévus par les communes et intercommunalités.

Il est néanmoins envisageable, si les projets peuvent être scindés en plusieurs tranches distinctes, d'octroyer une nouvelle subvention correspondant à une nouvelle tranche ne portant pas sur la même assiette. Il est également possible de solliciter un autre levier de financement pour compenser au mieux cette augmentation du coût à l'aide par exemple de la DSIL pour un projet subventionné par la DETR, et inversement, les deux dotations étant cumulables.

En dernier lieu, le droit de dérogation du préfet, prévu par le décret du 8 avril 2020, permet également, sous certaines conditions, de modifier le taux de la subvention attribuée. Il convient toutefois de l'employer à bon escient pour que cette règle budgétaire ne perde pas sa portée.

Il convient en particulier de s'assurer qu'il existe un risque réel d'abandon du projet, et ce malgré l'absorption par le titulaire du marché d'une part de la hausse du coût. En effet, la puissance publique – collectivités et État – ne doit pas supporter seule l'intégralité de la hausse des prix.

En ce qui concerne le redéploiement des crédits que vous proposez, dans les faits, la quasi-totalité des crédits mis à disposition des préfectures est effectivement consommée chaque année.

Le principe d'annualité budgétaire prévu par la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) implique que les crédits soient ouverts uniquement pour l'année en cours. Il impose ce faisant un haut niveau de consommation.

Il a également pour conséquence que les redéploiements entre opérations ne peuvent se faire qu'au sein d'un même exercice annuel. Les montants tout à fait résiduels – quelques dizaines de milliers d'euros sur plus de 2 milliards d'euros en autorisations d'engagement – qui n'ont pas pu être consommés pour des raisons techniques sont reportés en totalité sur l'exercice suivant.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour la réplique.

M. Pierre-Antoine Levi. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais les montants de DETR non consommés les années précédentes sont bien rendus, ce qui représentait plus d'un million d'euros pour la seule année 2022 dans mon département.

Or cette somme aurait pu être redéployée sur le territoire en faveur des projets locaux, dont la revitalisation du centre-bourg de la commune d'Orgueil.

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