Question de Mme GRUNY Pascale (Aisne - Les Républicains) publiée le 15/12/2022

Mme Pascale Gruny attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité sur le sens précis à donner au dernier alinéa de l'article L 5211-4-2 du code général des collectivités territoriales.
En effet, ce texte dispose que « le maire ou le président de l'établissement public peut donner, par arrêté, sous sa surveillance et sa responsabilité, délégation de signature au chef du service commun des missions qui lui sont confiées ». Doit-on comprendre qu'une seule délégation de signature est possible au bénéfice du « chef de service commun » d'un établissement public de coopération intercommunale, ou peut-on imaginer que son adjoint, ou encore son supérieur hiérarchique, par exemple un directeur général adjoint, puisse également bénéficier d'une telle délégation ? Cette question revêt une importance pratique pour toutes les collectivités mutualisées qui tendent à rationaliser leurs services, en mettant en commun leurs moyens, et dont les exécutifs souhaitent en conséquence pouvoir donner délégation aux responsables de services communs que sont les directeurs généraux, directeurs généraux adjoints mais aussi les responsables de services et leurs adjoints.
Dans ces conditions, elle lui demande si l'on doit s'en tenir à une stricte interprétation du texte, qui peut conduire à des lourdeurs et à un blocage du fonctionnement du processus décisionnel, ou si l'on peut, comme le prévoit l'article L 2122-19 du code général des collectivités territoriales, pour les délégations de signature du maire, considérer que plusieurs délégations de signature peuvent être données à des intervenants multiples qui remplissent des fonctions de responsables du même service ou de la même direction.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 30/03/2023

L'article L. 5211-4-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) permet à une ou plusieurs communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) de se doter d'un service commun avec leur EPCI-FP (et, le cas échéant, des établissements publics qui leur sont rattachés), afin de réaliser des missions fonctionnelles ou opérationnelles, en dehors des compétences qui ont été transférées à l'EPCI-FP. Les conditions de cette mise en commun sont fixées dans le cadre d'une convention, à laquelle est annexée une fiche d'impact décrivant notamment les effets sur l'organisation et les conditions de travail, la rémunération et les droits acquis pour les agents. Ces services communs sont gérés, en principe, par l'EPCI-FP, bien que la loi autorise à titre dérogatoire qu'ils soient gérés par une commune choisie par l'organe délibérant de ce dernier. En fonction de la mission réalisée, les agents des services communs sont placés sous l'autorité fonctionnelle du maire ou sous celle du président de l'EPCI-FP. La loi prévoit également que le maire ou le président de l'EPCI-FP peut donner, par arrêté, sous sa surveillance et sa responsabilité, délégation de signature au chef du service commun pour l'exécution des missions qui lui sont confiées. Le principe selon lequel il ne peut y avoir de délégation sans texte, issue d'une jurisprudence constante, s'applique aux délégations de signature et impose que toute délégation puisse reposer sur une disposition législative ou réglementaire la prévoyant explicitement (Conseil d'État 25 février 1949 Roncin, p. 92). Ainsi, un fonctionnaire, ne figurant pas au nombre des agents expressément habilités à recevoir une délégation de signature, ne peut signer une décision mettant fin aux fonctions exercées par un non titulaire. Cette décision est illégale car prise par une autorité incompétente (CE, 24 janvier 1994, n° 141143, Commune de Vigneux-sur-Seine c/ Mlle Duplessis). L'illégalité de la délégation affecte les décisions du bénéficiaire de la délégation. Celles-ci sont dès lors entachées du vice d'incompétence, qui est d'ordre public. S'agissant des services communs, ni l'article L. 5211-4-2, ni les articles L. 2122-18 et L. 2122-19 du CGCT ne mentionnent la possibilité pour le maire de déléguer sa signature à l'adjoint ou au supérieur du chef du service commun, ou à tout autre agent de ce service : une telle possibilité est donc exclue. Un tel dispositif serait d'ailleurs de nature à créer d'importantes difficultés de gouvernance. Le service commun agit en effet, dans la limite de ses missions, au nom et pour le compte de chaque commune ou EPCI ayant participé à sa constitution. Accorder une délégation au supérieur hiérarchique du chef du service commun reviendrait donc à intégrer ce service au sein de l'organigramme de l'EPCI (ou de la commune) qui en assure la gestion, alors même que cet EPCI (ou cette commune) n'exerce pas, en tant que tel, les missions concernées. Une telle délégation constituerait donc une forme de détournement du principe du service commun, qui n'est pas un transfert de compétences au profit d'un EPCI mais bien une mise en commun dont la gestion, déléguée, n'en reste pas moins mise en oeuvre sous la pleine autorité fonctionnelle du maire.

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