Question de Mme HARRIBEY Laurence (Gironde - SER) publiée le 15/12/2022

Mme Laurence Harribey attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les atrocités perpétrées au Tigré.

Le 2 novembre 2022, le gouvernement éthiopien et le front de libération des peuples du Tigré (TPLF) ont signé un accord de paix après deux années de conflit marquées par des violences extrêmes. Il n'est pourtant pas clairement prévu de garantir les moyens du respect de l'obligation de rendre des comptes pour les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité, ce qui risque d'entraîner la répétition de telles violations.

Malgré un accès restreint au théâtre des opérations et des coupures de communication, Amnesty international a recensé des atteintes aux droits humains à de nombreuses reprises. L'organisation non gouvernementale a recueilli des informations sur des exactions commises par toutes les parties au conflit, y compris des exécutions extrajudiciaires ainsi que des violences sexuelles à l'égard de femmes et de filles. Les atteintes et violations recensées durant le conflit incluent en particulier des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.

Dans un rapport publié conjointement avec Human Rights en avril 2022, Amnesty international a documenté des crimes ethniques contre les résidents tigréens menés par les forces Amhara contrôlant la zone du Tigré occidental, avec le soutien des forces du gouvernement fédéral et des forces érythréennes.

Depuis le début du conflit, des millions de personnes sont déplacées à l'intérieur du pays et privées d'aide humanitaire dans le Tigré, en raison du quasi-blocus qui entrave l'aide humanitaire et qui a encore aggravé une situation humanitaire déjà très inquiétante.

La communauté internationale doit tout mettre en œuvre pour porter assistance aux victimes et aux survivants des atrocités commises dans le cadre du conflit. En tant que membre permanent du conseil de sécurité et du conseil des droits de l'homme des Nations unies, la France doit agir pour que les millions de personnes confrontées à la famine et à l'urgence médicale puissent accéder aux soins dont elles ont besoin.

Alors, elle lui demande quel rôle jouera la France sur la scène internationale pour faire cesser ces persécutions. Elle lui demande également si la France apportera son assistance aux femmes victimes de violences dans le cadre de son troisième plan national d'action 2021-2025 de mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies « Femmes, paix et sécurité ».

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 29/12/2022

Après deux ans de conflit au nord de l'Ethiopie, l'accord de Pretoria, conclu le 2 novembre sous l'égide de l'Union africaine par le gouvernement fédéral et le front de libération du Tigré, a permis d'aboutir à la déclaration d'une cessation des hostilités. Il s'agit d'une première étape importante en vue de la résolution de cette crise. La situation humanitaire causée par ce conflit est dramatique, avec des conséquences graves pour les populations civiles dans les trois régions affectées par les combats, le Tigré, l'Afar et l'Amhara. Face à cette situation, la France et l'Union européenne (UE) se sont mobilisées pour obtenir l'accès de l'aide humanitaire aux populations et une réponse à la hauteur des besoins. En 2022, la France est le 7e bailleur humanitaire en Ethiopie avec près de 17 millions d'euros pour répondre à la situation qui découle du conflit, mais également pour apporter un soutien aux régions affectées par les sécheresses. L'Union européenne est de son côté le 2e bailleur humanitaire en Ethiopie, derrière les Etats-Unis. Ce conflit a également donné lieu à des exactions massives. Le rapport conjoint publié par la Commission éthiopienne des droits de l'Homme et le Haut-Commissariat des Nations unies pour les droits de l'Homme (HCDH) le 3 novembre 2021 avait conclu qu'un faisceau d'éléments permettait d'estimer que toutes les parties au conflit avaient commis des violations du droit international des droits de l'homme, du droit international humanitaire et du droit international des réfugiés, dont certaines pouvaient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Le rapport publié le 19 septembre par la Commission internationale d'experts des droits de l'Homme, établie par le Conseil des droits de l'Homme à Genève avec le soutien de la France et de l'UE, arrive aux mêmes conclusions sur la gravité des exactions commises. L'accord de Pretoria prévoit la mise en place d'un mécanisme de justice transitionnelle visant l'établissement de la vérité, la réparation et la réconciliation. Il est désormais primordial que ce processus soit mis en œuvre afin d'assurer la prise en compte des victimes et la lutte contre l'impunité. La France, qui a condamné les atteintes aux droits humains, est prête à soutenir ce processus avec ses partenaires européens. La France est très attachée à la souveraineté, à l'intégrité territoriale et à l'unité de l'Ethiopie. Afin de les préserver et de soutenir l'accord de Pretoria du 2 novembre, la France restera mobilisée en soutien de la médiation de l'Union africaine et active à New York, à Genève et à Bruxelles afin que l'ONU et l'UE demeurent saisies de la question et pèsent de tout leur poids vers la restauration de la stabilité et de la prospérité en Ethiopie, et de la paix dans la région.

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