Question de M. MOGA Jean-Pierre (Lot-et-Garonne - UC) publiée le 19/01/2023

M. Jean-Pierre Moga attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer concernant la situation critique des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) de France.

Les méga-feux de l'été 2022 doivent constituer un véritable électrochoc, avec un « avant » et un « après » été 2022 en matière de sécurité civile. Si cet été a été exceptionnel, il est malheureusement probable, compte tenu de l'intensification et de l'extension géographique du risque feux de forêts induit par le réchauffement climatique, que la saison des feux 2022 devienne à l'avenir une saison de référence.
Au niveau national, au 31 août 2022, plus de 8 550 incendies ont été recensés pour une surface brûlée proche de 70 000 hectares. Le bilan 2022 est ainsi 2,3 supérieur en nombre de feux et 6 fois supérieur en termes de superficie brûlée par rapport à la moyenne décennale.

Le massif des Landes de Gascogne a payé un lourd tribut à ces feux : 28 654 hectares de forêt partis en fumée, soit 3,064 millions de m3 de bois, 1 652 propriétaires forestiers impactés, 50 000 personnes évacuées. Grâce au courage et au dévouement des 6 400 pompiers mobilisés, dont 1 500 venus des autres régions métropolitaines et d'autres pays d'Europe, des élus locaux, des centaines de bénévoles, d'agents de divers services publics locaux ou nationaux, aucune victime n'a été heureusement à déplorer.

Les feux de cet été ont illustré tout à la fois la capacité de résilience mais aussi les limites de notre modèle de protection civile. Il convient de rappeler que le financement de la sécurité civile repose essentiellement sur les dépenses locales. Les collectivités, et notamment les départements, assument aujourd'hui les deux tiers du coût de la protection civile en France... Le conseil départemental de Lot-et-Garonne a, à titre d'exemple, financé le SDIS 47 en 2021 à hauteur de 16 186 400 euros, le bloc communal apportant de son côté un financement de 11 220 586 euros.

Les SDIS apprécieraient une augmentation de plus de 10 % des contributions des financeurs locaux dès 2023, suivie de plusieurs autres augmentations significatives durant 2 ou 3 ans afin de pouvoir faire face aux surcoûts constatés ainsi qu'aux objectifs opérationnels définis dans ce schéma départemental d'analyse et de couverture du risque (SDACR). Les financeurs locaux, départements et bloc communal, prendront leur part de cet effort financier et le SDIS poursuivra également ses efforts de gestion et de rationalisation de ses dépenses de fonctionnement.

Il lui demande les mesures nationales qu'il compte mettre en oeuvre dans la lutte contre les incendies qui devrait devenir une véritable cause nationale, avec notamment le déblocage de la part du Gouvernement de moyens suffisants et pérennes afin de permettre aux SDIS de France (et spécialement à ceux situés dans des territoires boisés comme c'est le cas en Lot-et-Garonne) de faire face tout à la fois aux conséquences du réchauffement climatique et de l'augmentation des interventions opérationnelles « classiques », et ce afin d'appréhender efficacement et sereinement la période estivale de 2023.

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 18/05/2023

Les services d'incendie et de secours (SIS) sont des établissements publics administratifs dotés de la personnalité juridique et de l'autonomie financière. Leur financement résulte d'un équilibre entre les contributions des départements, des établissements publics de coopération intercommunale et des communes. L'Etat apporte son concours au budget des services d'incendie et de secours à travers différentes dotations. La loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels prévoit, dans son article 54, que le Gouvernement remette au Parlement un rapport portant sur le financement des services départementaux et territoriaux d'incendie et de secours avant le 1er janvier 2023. L'Inspection générale de l'administration (IGA) a été chargée de la rédaction de ce rapport, qui a fait l'objet d'une transmission au Parlement le 27 décembre 2022. Il est également disponible sur le site internet du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer. L'IGA a mené ses travaux en y associant toutes les parties prenantes. Elle relève notamment que le développement d'un volet maîtrise de la dépense est à encourager, en favorisant notamment les mutualisations. En matière de ressources, elle note que la contribution du bloc communal et son plafonnement à l'inflation pourraient être remis à plat pour tenir compte de l'évolution de la population et des risques. Ce rapport permettra de nourrir les réflexions à engager sur le modèle de financement des SIS. Par ailleurs, face à la hausse inédite des prix de l'électricité et afin d'en limiter les effets pour les établissements ne pouvant la compenser commercialement, l'article 181 de la loi de finances pour 2023 prévoit la mise en place d'une "compensation" électrique dont les modalités d'application sont détaillées dans le décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022. Les SIS sont éligibles en leur qualité de personnes morales de droit public dont les recettes annuelles provenant de financements publics, taxes affectées, dons et cotisations sont supérieures à 50 % de leurs recettes totales. L'État prendra ainsi directement en charge, auprès du fournisseur, l'écart entre le prix de l'énergie du contrat et 180 euros/MWh sur 50 % des volumes d'électricité consommés. Concernant le « malus écologique », seuls les véhicules de tourisme au sens de l'article L. 421-2 du Code des impositions sur les biens et services, sont soumis à la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone (« malus écologique »). Ainsi, un certain nombre de véhicules en sont exclus : c'est le cas notamment des véhicules de catégorie M1 qui sont à usage spécial, des véhicules pick-up de moins de cinq places ou encore des véhicules de catégorie N2 ou N3 (véhicules de transport de marchandises de plus de 3,5 tonnes). Malgré cette exclusion déjà importante, il est apparu nécessaire d'aller plus loin, certains véhicules des SIS, indispensables pour l'exercice de leurs missions opérationnelles, restant encore fortement taxés (cas des véhicules pick-up d'au moins cinq places et de véhicules de type 4X4). C'est la raison pour laquelle, depuis la publication de la loi de finances pour 2023, sous l'impulsion du MIOM, les véhicules hors route qui sont affectés aux besoins des missions opérationnelles des services d'incendie et de secours sont dorénavant exonérés de la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone et de la taxe sur la masse en ordre de marche. A l'instar de l'abattement de malus prévu pour les familles nombreuses, cette exonération prendra la forme d'une demande de remboursement de la taxe auprès de l'administration fiscale. Ces mesures permettront d'offrir aux SIS des marges de manoeuvre supplémentaires pour acquérir des véhicules indispensables pour répondre à leurs besoins opérationnels croissants. Concernant la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), la France a choisi de limiter le bénéfice des taux réduits, permis par les articles 5 et 7 de la directive 2003/96/CE restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, aux exploitants de taxi et aux transporteurs routiers de marchandises ou de voyageurs. Les SIS, exerçant une activité qui n'est pas soumise au droit commercial, ne peuvent pas prétendre à un remboursement partiel de la TICPE. Le droit appliqué est identique à celui décliné pour les forces armées et l'administration. Enfin, conformément aux annonces du Président de la République le 28 octobre dernier devant les acteurs de la sécurité civile mobilisés cet été, la loi de finances pour 2023 prévoit l'ouverture de 150 millions d'euros en autorisation d'engagement et de 37,5 millions d'euros de crédits de paiement pour renforcer les moyens opérationnels des services d'incendie et de secours dédiés à la détection et la lutte contre les feux de forêt. Ces 150 millions d'euros s'ajoutent aux 30 millions d'euros prévus dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer sur 5 ans au profit des « pactes capacitaires ». Cette ouverture de crédits concrétise l'engagement financier de l'État aux côtés des collectivités territoriales pour faire cesser une rupture capacitaire ou favoriser une stratégie de mutualisation. Les attributions de crédits, pour chaque service d'incendie et de secours engagé dans cette démarche de pacte capacitaire, sont en cours d'arbitrage et seront prochainement annoncés.

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