Question de M. ANGLARS Jean-Claude (Aveyron - Les Républicains) publiée le 30/11/2023

M. Jean-Claude Anglars interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics sur la réalité de l'autonomie financière des collectivités territoriales après les réformes du Gouvernement.

La Cour des comptes a montré le 24 octobre 2023, dans son 2ème fascicule sur les finances publiques locales, que la situation financière des collectivités est moins favorable en 2023 que l'année précédente.

Si le contexte inflationniste de l'économie contribue à cette situation, il apparaît également que les choix récents du Gouvernement, particulièrement la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sont des facteurs plus structurels encore. Cela d'autant plus que la réforme de la suppression de la taxe d'habitation n'a pas été suffisamment compensée et qu'il en résulte la perte de plus de 1 milliard d'euros pour les collectivités.

Par ailleurs, la perte de lien territorial de l'impôt est une des conséquences néfastes de la fiscalité locale. Par exemple, pour les communes, le coefficient correcteur, qui est censé compenser le transfert de la taxe foncière des départements aux communes, sanctionne les communes rurales qui, en moyenne, reversent plus d'argent que les communes les plus urbaines. Cela concerne un grand nombre de communes dans le département de l'Aveyron.

Il est nécessaire de renforcer l'autonomie financière des collectivités qui a un statut constitutionnel depuis 2003 car l'autonomie fiscale des collectivités a été réduite au fur et à mesure des réformes menées par le Gouvernement depuis 2018, qui ont également causé une perte de lien entre la fiscalité locale et le territoire.

Or, la diminution de l'autonomie financière des collectivités pourrait aller jusqu'à entraver le principe de leur libre administration. Ce qui est un risque important pour la mise en oeuvre de la décentralisation au niveau local.

Il lui demande ce qu'envisage le Gouvernement pour permettre une réelle autonomie financière des collectivités d'ici à 2027.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics publiée le 04/01/2024

Le Gouvernement a pleinement conscience de l'incidence de l'inflation sur les budgets des collectivités territoriales. Ainsi, l'article 14 de la loi de finances rectificative du 16 août 2022 a instauré, au titre de l'année 2022, un « filet de sécurité » au profit des communes et de leurs groupements satisfaisant aux critères cumulatifs suivants : - une épargne brute au 31 décembre 2021 représentant moins de 22 % des recettes réelles de fonctionnement ; - un potentiel financier inférieur au double du potentiel financier moyen par habitant défini par la loi ; - une perte d'épargne brute d'au moins 25 % en 2022, du fait des hausses de dépenses liées à la majoration de la rémunération des personnels civils et militaires de l'État, des personnels des collectivités territoriales et des établissements publics d'hospitalisation et d'autre part, aux effets de l'inflation sur les dépenses d'approvisionnement en énergie, électricité et chauffage urbain et d'achats de produits alimentaires. Par l'intermédiaire de ce dispositif, l'État soutient ainsi 2 011 communes et 930 syndicats pour un montant total de 406 Meuros, conforme aux engagements pris par l'État en faveur des collectivités en 2022. En outre, concernant les réformes fiscales citées dans la question, il a garanti une compensation pérenne et dynamique des impôts locaux supprimés et mène désormais des réflexions sur le cadre de la décentralisation et de l'autonomie financière. Les « deux choix récents » qui sont évoqués ont trait à l'article 16 de la loi de finances pour 2020 et à l'article 55 de la loi de finances pour 2023. Le premier a prévu les modalités de suppression progressive de la taxe d'habitation (TH) sur les résidences principales ainsi que l'introduction d'un nouveau de schéma de financement des collectivités locales à compter de 2021. Le calcul de la compensation perçue par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre s'opère sur la base du taux de TH 2017 et des bases de TH sur les résidences principales de 2020. Le second a quant à lui prévu la suppression de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) dans l'objectif de soutien de l'activité économique et de reconquête industrielle. Pour les collectivités locales, la compensation de la CVAE intervient dès 2023 et se matérialise, notamment, par une affectation dynamique du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) aux communes qui ne sont pas membres d'un EPCI à fiscalité professionnelle unique (FPU), à la métropole de Lyon pour sa part intercommunale, aux départements et aux EPCI à fiscalité propre. La compensation de ces deux réformes fiscales a été opérée à l'euro près sur la base de vecteurs de substitution nettement dynamiques. Dans le cadre du second fascicule de son rapport 2023 sur les finances publiques locales, la Cour des comptes relève ainsi que les « modalités de la compensation de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises par des recettes de TVA pourraient engendrer, de manière permanente, un gain net pour les collectivités ; il s'est élevé à près de 6 Mdeuros en 2022 ». Ces modalités de compensation permettent à la fois de garantir aux collectivités un niveau particulièrement élevé de compensation et de faire bénéficier à l'ensemble des collectivités concernées d'une ressource dynamique à travers l'affectation d'une part de TVA nationale assise sur l'inflation et la croissance. Parallèlement au fait que la compensation soit dynamique, il est nécessaire de souligner que ces réformes n'ont pas remis en cause l'autonomie financière des collectivités territoriales telle qu'encadrée par la Constitution et précisée dans la loi organique du 29 juillet 2004 prise en application de l'article 72-2 de la Constitution. En effet, le ratio d'autonomie financière est passé, entre 2011 et 2021, de 64,90 % à 70,30 % (bloc communal), de 67,40 % à 75,80 % (départements) et de 54,30 % à 73,10 % (régions). Enfin, dans le cadre d'une réflexion plus générale sur le cadre de la décentralisation administrative et financière, le Président de la République a confié à un député une mission temporaire visant à simplifier l'organisation territoriale et à identifier de nouvelles pistes de décentralisation.

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