Question de M. BLANC Étienne (Rhône - Les Républicains) publiée le 03/10/2024
M. Étienne Blanc attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur concernant les violences subies en France par un certain nombre de convertis.
La presse se fait en effet régulièrement écho de menaces que subissent des personnes, notamment issues des religions shintoïstes, hindouistes ou musulmanes qui souhaitent quitter leur religion, soit en en rejoignant une autre, soit en faisant le choix de l'athéisme.
Ces menaces peuvent revêtir de nombreuses formes, pressions psychologiques - souvent au sein même du cercle familial -, intimidations sociales et communautaires, voire agressions physiques ou pire encore.
Ce phénomène semble accentué par le poids des réseaux sociaux et leur capacité à être utilisés afin de diffuser de nombreuses informations personnelles sur ces convertis et ainsi appeler à des violences contre eux.
Cette problématique parait s'amplifier au regard du nombre de personnes originaires de pays où le changement de religion est considéré comme un crime d'apostasie et qui émigrent pour rejoindre la France et sa liberté de culte que protège notre Constitution ainsi que l'article 18 de la déclaration universelle des droits de l'homme.
Aussi, il souhaiterait savoir si cette question des violences contre les convertis était aujourd'hui suivie par les services du ministère et si des dispositifs spécifiques étaient mis en place afin de faciliter le recueil de plaintes.
Il souhaiterait également être informé des analyses statistiques dont les services du ministère de l'intérieur disposent à ce sujet et ceci notamment en matière de violences intrafamiliales dont on entend régulièrement dire que les jeunes femmes converties sont les principales victimes.
Enfin, il souhaiterait connaitre les éventuelles évolutions législatives envisagées afin de mieux protéger les personnes converties, sur notre sol.
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Transmise au Ministère de l'intérieur
Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 17/07/2025
La France défend la liberté de conscience telle qu'énoncée à l'article 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et à l'article 1er de la loi de 1905 qui consacre la liberté de croire, de ne pas croire, de ne plus croire ou de changer de religion - et le libre exercice du culte. L'État est particulièrement attaché au respect de cette liberté fondamentale et accorde ainsi la plus grande attention aux cas de violations de cette dernière dans le monde, dont sont victimes de très nombreuses personnes. S'agissant de la situation qui prévaut en France, cette liberté s'inscrit dans le cadre du principe de laïcité. A cet égard, il convient de rappeler qu'il n'existe pas en France de statistique officielle sur l'appartenance religieuse, le dernier recensement faisant état de la confession religieuse remontant à 1872 pour la France métropolitaine et à 1962 pour les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin qui sont assujettis au droit local cultuel. A fortiori, il n'existe pas non plus de statistiques officielles sur les conversions religieuses. L'appartenance religieuse est appréciée par des sondages ou des travaux sociologiques. Le Gouvernement prend très au sérieux la problématique que représentent les atteintes à la liberté de conscience. Ainsi, à travers l'article 81 de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, il a considérablement durci les sanctions pour les comportements visant à forcer une personne à exercer ou s'abstenir d'exercer un culte, prévu à l'article 31 de la loi du 9 décembre 1905 portant séparation des Églises et de l'État. En effet, il a transformé ce qui n'était jusque là qu'une contravention de 5e classe en délit puni d'un an de prison et 15 000 euros d'amende, voire trois ans de prison et 45 000 euros d'amende lorsque l'auteur des faits agit par voie de fait ou violence. Cette évolution s'est accompagnée de la suppression de la nécessité que l'acte soit suivi d'effet (avoir déterminé la personne forcée à exercer ou s'abstenir d'exercer un culte) pour être condamnable, au profit de la seule prise en compte de l'action de l'auteur et de la gravité des formes de pressions exercées. L'ensemble de ces évolutions vise à permettre un traitement pénal plus ferme et rapide. S'il n'apparaît pas que l'arsenal législatif nécessite d'évolution nouvelle pour protéger la liberté de conscience d'une personne qui a fait le choix de se convertir, il s'agit en revanche de veiller à ce qu'une telle personne, si elle est victime de pressions d'intimidations voire de violences, porte plainte afin d'être protégée et que des poursuites soient engagées. Si la détection de telles situations n'est pas évidente, le ministère veille à évoquer le sujet avec les différents représentants des cultes qui sont le mieux à même de se faire les relais de situations individuelles. Le ministère de l'intérieur a également engagé un travail de lutte et de prévention contre les actes anti-religieux. Sans qu'ils soient spécifiquement dédiés aux violences contre les convertis, les groupes de travail organisés avec les forces de sécurité et les représentants des différents cultes permettent un suivi des actes anti-religieux et des actions menées pour prévenir ces actes. Ils constituent un cadre adapté pour traiter de la question spécifique des violences contre les convertis. Pour la gendarmerie nationale, la lutte contre les phénomènes évoqués s'inscrit dans le cadre de la stratégie globale de prévention et de lutte contre infractions discriminatoires, qui s'appuie notamment sur ses référents territoriaux « racisme, antisémitisme et discriminations » (officiers adjoints de police judiciaire) et les référents « lutte contre les crimes de haine » mis en place dans chaque département et collectivité d'outre-mer, qui ont pour mission de former des gendarmes de brigade territoriale ou spécialisés à ces enjeux. Aussi, consciente que dans ces domaines l'accompagnement des victimes est déterminant, la gendarmerie valorise plusieurs plateformes et téléservices à la disposition des victimes, qui leur permettent d'échanger avec des policiers ou gendarmes, par exemple : la plate-forme numérique de signalement des atteintes aux personnes et d'accompagnement des victimes (PNAV), disponible notamment sur l'application M@sécurité.fr, est à la disposition des victimes de discriminations et de toute forme de haine. Pour faciliter le traitement des dossiers et l'accompagnement, une application, Néo Haine, est par ailleurs accessible par les deux forces, spécifiquement pour les crimes et délits de haine fondés sur la supposée race, l'ethnie, la religion, la nation, le sexe, l'orientation sexuelle, l'identité de genre et le handicap. Cette application permet aux enquêteurs policiers et gendarmes d'avoir immédiatement accès au réseau départemental des formateurs-relais de lutte contre les crimes de haine de la gendarmerie ainsi qu'au réseau des associations de leur département, permettant si besoin d'orienter rapidement une victime vers une association. Par ailleurs, s'agissant spécifiquement des violences intra-familiales, y compris pour le motif que vous évoquez, la gendarmerie met en oeuvre des mesures concrètes qui permettent le renforcement de l'accueil, de la prise en charge et de l'accompagnement des victimes. Ces mesures consistent en l'ouverture systématique d'une procédure judiciaire dès connaissance de faits susceptibles de constituer une infraction ; la refonte du récépissé de dépôt de plainte afin de simplifier l'information des droits de la victime en fonction de l'infraction concernée ; la mise en place d'un canevas d'audition des victimes de violences intra-familiales adapté à la situation de chaque victime et l'édition d'un guide à destination des enquêteurs. De nombreuses mesures sont mises en place pour mieux protéger les victimes (inscription sur demande au module de sécurisation des interventions et demandes particulières de protection, systématisation de la recherche et saisie d'armes, mise en relation avec un intervenant social etc.).
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