Question de Mme BÉLIM Audrey (La Réunion - SER) publiée le 03/10/2024
Mme Audrey Bélim attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports sur la situation du port de La Réunion. La directive européenne 2023/959 institue un système dit ETS (emission trading system), c'est-à-dire d'échanges de quotas de carbone dans le transport maritime. Publiée au Journal officiel européen le 27 octobre 2023, la modification de cette directive européenne permet d'assimiler un voyage maritime depuis les ports de Tanger Med (Maroc) et Port-Saïd (Egypte) à destination d'un port de l'Union européenne (UE) à un voyage intracommunautaire. Ce changement est significatif car il permet de limiter le principal risque de détournement de trafics vers les hubs extraeuropéens de la Méditerranée et de hausse des fuites de carbone en raison de la mise en place du système ETS. Or, dans l'océan indien, le port de La Réunion est confronté à la même concurrence de la part de Port-Louis (Maurice). Ces deux ports ne sont qu'à 200 kilomètres l'un de l'autre, soit bien plus que la distance entre Tanger et Marseille (1 600 kilomètres). Elle souhaiterait savoir si Port-Louis peut être inclus sur la liste des ports de transbordement de conteneurs proches de l'Union européenne qui sont situés à moins de 300 milles marins d'un port relevant de la juridiction d'un État de l'Union européenne.
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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports
Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports publiée le 07/08/2025
L'application de la directive européenne 2023/959 dans sa composante maritime aux régions ultra-périphériques de l'Union européenne fait l'objet d'une attention accrue de la part des services du ministère des Transports. En effet, dans un contexte de compétition entre les ports et de forte dépendance au transport maritime des territoires français d'outre-mer, il convient de veiller à l'intégrité environnementale de la directive en prévenant toute fuite de carbone (déplacement des émissions vers des territoires non concernés plutôt que leur diminution) tout en garantissant des conditions de concurrence équitables. Ainsi, la législation l'Union européenne prévoit la notion de "port de transbordement" afin d'éviter un déplacement des trafics vers des ports proches aux fins de contourner les obligations financières découlant du marché carbone. Un port d'un pays tiers doit cumuler deux critères pour être qualifié de « port voisin de transbordement de l'Union européenne » au sens de la directive'ETS', définis au deuxième paragraphe de l'article 3 octies bis. Le port doit être situé à moins de 300 milles marins d'un port de l'UE et la part que représente le transbordement de conteneurs doit excéder 65 % du trafic total de conteneurs du port au cours de la période de douze mois la plus récente. La directive précise également que les conteneurs sont considérés comme étant « transbordés » lorsqu'ils sont déchargés d'un navire vers le port dans le seul but d'être chargés sur un autre navire ; sont donc exclues les importations et exportations directes de biens par conteneurs. C'est la Commission européenne qui apprécie ces critères et qui fixe la liste des ports de transbordement. Le port de Port-Louis (Maurice) n'a pas été qualifié de port de transbordement car bien que proche du port de La Réunion, il ne remplit pas le second critère du seuil de transbordement de conteneurs. D'autres ports de pays-tiers sont dans des cas similaires, comme ceux du Royaume-Uni. Les données publiées par l'autorité portuaire de Port-Louis indiquent en effet que l'activité de transbordement représente 46 % du trafic total de conteneurs en 2023 (205 825 tonnes sur 448 526), soit une part inférieure au seuil de 65 %. La liste des ports de transbordement doit être mise à jour tous les deux ans. La prochaine échéance de mise à jour est en décembre 2025. La directive ETS prévoit également que la Commission fasse rapport tous les deux ans sur la mise en oeuvre de l'ETS pour le secteur maritime, en particulier afin de surveiller les effets de contournement des compagnies maritimes et les impacts sur la compétitivité des ports européens. La France a demandé dans ce cadre que la Commission examine les cas particuliers du secteur maritime dans les régions ultrapériphériques. Il convient également de noter que des démarches sont en cours auprès de la Commission européenne pour adapter le droit de l'UE aux contextes particuliers des régions ultra-périphériques. La directive ETS fait partie du champ de ces travaux. Enfin, une révision de la directive aura vraisemblablement lieu à partir de 2026, comme le prévoit l'article 3 octies octies du texte, à la suite de l'adoption par l'Organisation maritime internationale d'une mesure de tarification mondiale des émissions de gaz à effet de serre des navires.
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