Question de Mme SOUYRIS Anne (Paris - GEST) publiée le 06/02/2025
Mme Anne Souyris attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur la tenue de combats de vaches de la race Hérens en France, une pratique qui soulève de vives préoccupations en matière de bien-être animal.
Depuis une trentaine d'années, ces combats, inspirés d'une tradition suisse datant de 1922, se sont implantés en France, notamment dans les Alpes. Lors de ces événements, des vaches sont transportées sur de longues distances, placées dans un environnement bruyant et contraignant, puis incitées à se battre sous le regard du public. Or, si la hiérarchie au sein d'un troupeau s'établit naturellement dans un espace ouvert où les animaux peuvent éviter l'affrontement, ces combats artificiels imposent des confrontations forcées, générant un stress important pour les animaux.
Bien que certains défenseurs de ces combats mettent en avant le tempérament naturellement belliqueux de la race Hérens, il apparaît problématique de stimuler ces comportements agressifs dans un cadre spectaculaire. La mise en scène de combats entre animaux va à l'encontre des principes de bien-être animal et des efforts de sensibilisation menés ces dernières années pour limiter la souffrance et le stress inutiles infligés aux animaux d'élevage.
Alors que cette pratique ne constitue en rien une tradition française, son essor récent, y compris dans les Alpes-Maritimes, inquiète les associations de protection animale. Il existe des alternatives permettant d'organiser des événements festifs et folkloriques sans encourager des affrontements entre animaux.
Aussi, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour encadrer voire interdire ces pratiques, afin de garantir une meilleure protection des animaux et de veiller à la cohérence des politiques publiques en matière de bien-être animal.
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Transmise au Ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire
Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire publiée le 04/12/2025
La race bovine d'Hérens est originaire des territoires à proximité du Mont-Blanc : le Valais, le Val d'Aoste, mais également le Val Montjoie et la région de Chamonix. Comme tous les animaux élevés dans les Alpes, ces vaches restent à l'étable durant l'hiver et pâturent durant l'été au coeur des alpages où plusieurs troupeaux sont réunis. De fait, une hiérarchie s'instaure au sein de ces troupeaux. Ce comportement est particulièrement fort s'agissant de la race d'Hérens et se traduit par des luttes entre les animaux pour désigner une meneuse appelée « reine », qui guide et protège ses congénères et assure la cohésion de l'ensemble du troupeau. Le vacher s'appuie d'ailleurs sur cette dernière pour guider les animaux dans l'alpage. En France, cette race avait pratiquement disparu, comptant moins de 100 animaux dans les années 1980. Ses effectifs progressent cependant depuis et on comptait plus de 1 000 femelles en 2020, dont la population se concentre en Haute-Savoie, en Savoie et en Isère (85 % de la population totale). L'organisation de ces combats est, au niveau cantonal dans les pâtures, un événement important qui attire les habitants locaux lors d'une journée festive avec un public parfois nombreux. Ils sont un véritable levier pour l'attractivité de ces territoires autrement enclavés. En outre, si ces combats sont spectaculaires compte tenu de l'anatomie de ces animaux, ils n'occasionnent que rarement des blessures. En effet, l'organisation de ces combats est soumise à une réglementation stricte. Tout d'abord, comme tout rassemblement d'animaux, les combats de reines d'Hérens, dans les conditions actuelles de la tenue de ces événements, doivent faire l'objet d'une autorisation des services vétérinaires. Ainsi, concernant la journée du 18 mai 2025 à Ugine, les associations co-organisatrices ont adressé une demande d'autorisation le 29 avril 2025. Les services préfectoraux ont délivré cette autorisation le 12 mai 2025. Cette manifestation était sous la surveillance d'un vétérinaire praticien habilité par l'État, en charge de contrôler les animaux à leur arrivée (identification et documents d'accompagnement) ainsi que leur bien-être (conditions de transport, abreuvement, état de santé général, blessures, etc.). S'agissant de la réglementation applicable, deux textes s'appliquent de plein droit : - l'arrêté ministériel du 25 octobre 1982 qui requiert que l'élevage, la garde ou la détention d'un animal ne doit entraîner, en fonction de ses caractéristiques génotypiques ou phénotypiques, aucune souffrance évitable, ni aucun effet néfaste sur sa santé ; - le règlement (UE) n° 1/2005 du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport qui interdit le transport des femelles ayant passé au moins 90 % de la période de gestation. Au demeurant, si la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes interdit notamment certains spectacles avec des animaux d'espèces non domestiques à compter de 2028, cette dernière ne traite pas des spectacles qui concernent les animaux domestiques. Au-delà, cette pratique n'entre pas dans le champ d'application de l'article 13 du traité de fonctionnement de l'Union européenne prévoyant des dérogations au bien-être animal pour des pratiques culturelles, des pratiques locales ininterrompues ou des rites religieux. Ainsi, si les combats de reines d'Hérens présentaient un risque pour la protection animale, ces derniers ne pourraient pas bénéficier d'une dérogation telle que permise par le traité précité. En l'état actuel, la souffrance animale lors des combats de reines d'Hérens n'est pas documentée. Les seules blessures observées, malgré le caractère spectaculaire de ces combats, sont rares et exceptionnelles. De fait, les connaissances scientifiques actuelles ne permettent pas d'affirmer que les règles de protection animale ne sont pas respectées. Comme évoqué précédemment, le vétérinaire sur place est habilité à s'assurer de la bonne santé et du bien-être des animaux. De plus, les organisations et le propriétaire de l'animal demeurent responsables de ces derniers et doivent renoncer à toute participation d'un animal s'ils jugent que sa santé peut être mise en péril. Il est précisé qu'aucune intervention humaine ne peut obliger un animal qui, par sa nature, ne voudrait pas combattre. C'est pourquoi à l'heure actuelle, la direction générale de l'alimentation (DGAL) du ministère chargé de l'agriculture ne travaille pas à un encadrement, une limitation ou une interdiction de ce type de manifestation, même si elle est informée des oppositions à ces combats. Les services vétérinaires et les vétérinaires habilités demeurent très attentifs au respect des règles relatives au bien-être animal, que les éleveurs ont également intérêt à suivre dans l'objectif de préserver la santé de leurs animaux.
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