Question de M. FAGNEN Sébastien (Manche - SER) publiée le 20/03/2025

M. Sébastien Fagnen attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire sur les parts de marché que le commerce électronique dérobe à nos acteurs économiques locaux.

Malgré l'attachement des Français aux commerces de proximité, on observe, entre 2010 et 2020, un taux de croissance annuel de 14 % du commerce électronique contre seulement 1,4 % pour le commerce en magasin. Pour ce faire, les commerces de proximité sont désormais dans l'obligation de se digitaliser afin de proposer une nouvelle offre de vente en ligne ce qui engendre de nouveaux coûts et une concurrence accrue avec les plateformes de commerce électronique.

En effet, ces dernières ne cessent de progresser en France. Avec un chiffre d'affaires de 159,9 milliards d'euros en 2023, nous constatons une progression de plus de 10 % par rapport à 2022. Comme en témoigne aussi le nombre de transactions réalisées en France en 2022 : 2,3 milliards d'achats en ligne avec un panier moyen de 65 euros, en hausse de 6,9 % par rapport à 2021. De ce fait, il souhaite connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement pour garantir l'équité fiscale, les géants du commerce bénéficiant d'avantages compétitifs alors que les commerces locaux doivent faire face à des charges plus lourdes.

Ainsi, il interroge le Gouvernement sur les leviers réglementaires et fiscaux qu'il envisage de mobiliser pour permettre une concurrence équitable entre le commerce local et les grandes plateformes numériques. En particulier, il souhaite connaître les mesures envisagées pour aligner la fiscalité de ces acteurs du marché économique français.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique


Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 05/06/2025

Le Gouvernement est soucieux de poursuivre la recherche d'un équilibre entre la taxation du commerce physique et celle du commerce en ligne et à ce titre, plusieurs mesures ont déjà été mises en oeuvre. S'agissant des impôts de production, les différences de contribution entre commerce physique et commerce en ligne sont marginales (0,6 point). Le développement de l'omnicanalité a réduit cet écart, ainsi que les baisses successives des impôts de production depuis 2021. Ainsi, en 2021, les commerces à dominante physique - c'est-à-dire ceux qui réalisent moins de 10 % de chiffre d'affaires de vente à distance - ont contribué aux impôts de production à hauteur de 5,5 % de leur valeur ajoutée, contre 5,3 % pour les commerces réalisant plus de la moitié de leur chiffre d'affaires en vente à distance. Pour leur part, les commerçants qui sont dans une situation intermédiaire du point de vue de la vente en ligne (entre 10 et 50 % de leur chiffre d'affaires) contribuent davantage aux impôts de production, ce qui reflète implicitement la taille de ces acteurs. Plus spécialement, la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) a allégé la fiscalité pesant notamment sur les commerçants physiques. La CVAE représentait en effet 1,2 % de la valeur ajoutée produite par le secteur du commerce de détail en 2020, puis 0,7 % en 2021. La suppression de la CVAE à horizon 2030, accompagnée d'une baisse du taux du mécanisme de plafonnement en fonction de la valeur ajoutée qui affecte aussi la cotisation foncière des entreprises (CFE), constituera un choc de compétitivité positif annuel pour les acteurs du secteur estimé à 1,3 % de la valeur ajoutée, correspondant à 1,25 milliard d'euros en 2021, par rapport à la période pré-réformes. Par ailleurs, les impôts fonciers sont considérés par la littérature économique comme des impôts relativement peu distorsifs parmi les impôts de production, et assurent un lien entre entreprises et territoire. Au contraire, d'autres taxes spécifiques existent, telles que la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) qui s'applique sur les surfaces de vente importantes - dépassant un certain seuil de surface et de chiffre d'affaires - et vise ainsi à favoriser un développement équilibré entre petits commerces et grandes surfaces commerciales. De plus, en 2019, et suite à l'échec de l'instauration d'une taxe sur les géants du numérique au niveau européen, la France a été le premier État à appliquer une taxe sur les services numériques, laquelle concerne notamment les entreprises mettant à disposition une interface numérique pour fournir des services d'intermédiation entre utilisateurs, comme les places de marché. Un taux de 3 % est appliqué au montant des sommes perçues par l'intermédiaire et rattachables à la France. De même, de nouvelles règles en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour le commerce électronique sont entrées en vigueur depuis le 1er juillet 2021. Transposition d'une directive européenne, ces règles prévoient notamment la taxation des colis au premier euro à l'importation et la redevabilité, dans certains cas, des plateformes de e-commerce. Elles ont été en outre approfondies par une nouvelle directive, adoptée, le 11 mars 2025 et qui prévoit une série de mesures s'échelonnant jusqu'en 2030 et permettant de mieux appréhender la taxation des échanges internationaux. En outre, la France a activement participé aux discussions de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur la réallocation des droits imposés dans les États où la valeur est créée et sur l'imposition minimale mondiale des groupes d'entreprises multinationales. L'article 33 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 transpose ainsi en droit interne les règles de la directive (UE) 2022/2523 permettant d'instaurer un niveau minimal d'imposition fixé à 15 % pour les bénéfices des groupes d'entreprises multinationales disposant d'une implantation en France, ainsi que des grands groupes nationaux qui développent leurs activités sur le seul territoire français. Ainsi, le levier fiscal a été fortement mobilisé récemment pour adapter l'environnement fiscal au développement des plateformes numériques de commerce, et ses effets en faveur des commerces de proximité doivent encore se déployer dans les prochaines années. Il convient enfin de rappeler que le Gouvernement a présenté le 29 avril 2025 la mise en oeuvre d'un plan d'action pour la régulation et la sécurité du e-commerce, dans le but notamment de prévenir et lutter contre les fraudes à la TVA, mais également de soutenir au niveau européen la fin de l'exemption de droits de douane pour les petits colis de moins de 150 euros transportés par les plateformes de e-commerce.

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