Question de M. BOUCHET Gilbert (Drôme - Les Républicains) publiée le 17/04/2025

M. Gilbert Bouchet attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire sur l'urgence de protéger les petits commerces et artisans face aux géants du e-commerce chinois.
En effet, sur nos territoires et plus particulièrement dans la Drôme les petits commerçants et les artisans contribuent à faire vive les centre- villes. Au-delà de l'aspect économique ce sont des lieux de lien social et de savoir-faire. Or, aujourd'hui cet équilibre est menacé par la montée fulgurante des plateformes de vente en ligne, plus particulièrement en provenance de Chine. Ces sites représentent 22% des colis distribués par la poste ; on note que ces gains de parts de marché se font souvent en profitant des failles réglementaires et en contournant des obligations fiscales, sociales et environnementales, que respectent nos entreprises. De ce fait, les commerçants ne peuvent pas rivaliser et luttent afin de préserver les emplois. Ils souhaiteraient qu'afin de défendre notre modèle économique, des mesures soient prises comme l'application immédiate de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dès le premier euro sur les colis en provenance de pays tiers : le renforcement des contrôles douaniers afin de bloquer des produits non conformes aux normes européennes, la responsabilisation juridique des marketplaces qui doivent être garantes de la conformité et de la traçabilité des produits vendus, l'obligation de mention claire de l'origine du produit et du vendeur et enfin qu'une campagne nationale de sensibilisation soit lancée afin d'informer le grand public de l'impact économique, social et environnemental de leurs achats sur ces plateformes. Aussi il lui demande la position du Gouvernement sur ces propositions afin de défendre l'économie de nos territoires.

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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire publiée le 10/07/2025

Au titre de ses missions de protection du consommateur et de garantie des conditions d'une concurrence libre et équitable, le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est pleinement conscient des défis que posent le développement rapide des places de marché en ligne, notamment étrangères. Ainsi, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est engagée dans la mise à l'échelle de ses missions face à la croissance rapide du commerce électronique, qui a atteint un chiffre d'affaires de 42,7 milliards d'euros en France en 2024 (+ 8,4 % en un an). La DGCCRF mène un nombre croissant de contrôles de la sécurité et de la conformité des produits commercialisés en ligne par l'intermédiaire des places de marché électronique. La DGCCRF organise ainsi chaque année depuis 2018 des campagnes de prélèvements reposant sur la procédure de l'« achat mystère » (permettant aux enquêteurs de se placer dans la situation d'achat d'un consommateur) de produits proposés sur les places de marché électroniques les plus populaires - en particulier, les plateformes basées en Chine : Temu, Shein, Aliexpress… Ces enquêtes annuelles permettent d'éprouver, d'une part, la réactivité des plateformes (qui se positionnent souvent comme de simples intermédiaires mais ont l'obligation de supprimer ou de rendre inaccessibles promptement les annonces de produits illicites dès qu'elles sont informées de l'existence d'une anomalie) et, d'autre part, leur niveau de coopération pour la gestion des campagnes de rappel des produits dangereux. L'une de ces plateformes a ainsi subi une amende de 40 millions d'euros fin juin 2025 pour pratiques commerciales trompeuses. Fortes des enseignements de ces enquêtes, les autorités de surveillance du marché françaises continuent de plaider au niveau européen pour une application rigoureuse du principe selon lequel ce qui est illégal hors ligne soit également interdit en ligne. Cela est essentiel à la fois pour garantir la protection effective des consommateurs et pour lutter efficacement contre la concurrence déloyale d'opérateurs économiques basés dans des pays tiers qui méconnaissent les règles de droit au niveau européen et les normes applicables aux produits. Depuis plusieurs années, les autorités françaises ont ainsi promu un renforcement ciblé de la responsabilité des plateformes de commerce en ligne dans le cadre de l'adoption du Digital Services Act (DSA) [1] et du Règlement relatif à la sécurité générale des produits (RSGP) - règlements tous deux désormais entrés pleinement en application. Parmi leurs nouvelles obligations, il incombe dorénavant aux places de marché en ligne de retirer les produits dangereux et l'ensemble des contenus identiques s'y rapportant sous 48 heures quand ils leur sont signalés, selon la procédure dite de « notice & takedown » (procédure prévue pour ce type d'opérateur de plateforme lorsqu'il est établi qu'il héberge un contenu illicite ou une annonce de produit dangereux). En outre, la procédure d'injonction numérique [2] permet si nécessaire aux autorités de solliciter les fournisseurs d'accès Internet afin de rendre inaccessible aux internautes situés en France les pages web des sites non coopératifs. Enfin, conformément au DSA, chaque fournisseur de service intermédiaire (dont les fournisseurs des places de marché) n'ayant pas d'établissement au sein de l'Union européenne mais y proposant des services, est tenu de désigner un représentant, responsable légal en cas de non-conformité au DSA. En complément de l'action des autorités nationales de surveillance du marché, la Commission européenne s'assure que ces nouvelles dispositions en matière de surveillance du marché sont bien mises en oeuvre par les opérateurs économiques concernés. Dans ce cadre, une action conjointe européenne menée en 2023 a révélé des manquements encore nombreux à l'obligation pour les vendeurs issus de pays-tiers d'identifier un opérateur économique au sein de l'Union européenne, en capacité de fournir des informations aux autorités de surveillance du marché (seulement 14% des offres en ligne par des vendeurs issus de pays tiers pouvaient être considérées comme conformes à cette obligation - renseignement de l'information et existence effective et réelle de la personne physique désignée). Enfin, la plupart de ces opérateurs ayant été désignés comme des « très grandes plateformes » par la Commission européenne au titre du DSA sont soumises à des obligations encore plus strictes, notamment d'atténuation des risques systémiques découlant de l'utilisation de la plateforme. A ce titre, la Commission européenne a notamment ouvert le 31 octobre 2024 une enquête formelle visant à évaluer si TEMU a enfreint le règlement DSA. Ce type d'enquête se concentre notamment sur les systèmes mis en place par ces très grandes plateformes pour limiter la vente de produits non conformes dans l'Union européenne, notamment les systèmes limitant la réapparition de commerçants précédemment suspendus, connus pour avoir vendu des produits non conformes dans le passé, ainsi que les systèmes visant à limiter la réapparition de produits non conformes. A l'issue de ce type d'enquête, les décisions de la Commission européenne peuvent donner lieu à des sanctions financières pouvant aller jusqu'à 6 % du chiffre d'affaires mondial de l'opérateur concerné. Par ailleurs, à titre préventif, la DGCCRF appelle les consommateurs à demeurer vigilants dans le choix des produits qu'ils achètent sur Internet, notamment sur des places de marché électronique, et les invite à consulter sur son site ses conseils pour des achats en ligne en toute confiance. Pour contribuer à améliorer la surveillance des offres sur Internet, les consommateurs peuvent en outre déposer un signalement de toute anomalie qu'ils auraient constatée sur la plateforme SignalConso gérée par la DGCCRF. Le Gouvernement est pleinement mobilisé sur cette problématique et, à cet égard, a annoncé le 29 avril dernier un plan d'action pour la régulation et la sécurité du e-commerce, afin notamment de poursuivre l'augmentation du nombre de prélèvements de produits réalisés en ligne, d'élaborer une doctrine de contrôle à "360 degrés", d'intensifier les échanges d'informations entre autorités européennes. Il s'inscrit également dans le cadre de la réforme de l'Union douanière que la France soutient au niveau européen afin de mettre fin à l'exemption de droits de douane sur les colis inférieurs à 150 euros. La Ministre déléguée en charge du Commerce, de l'Artisanat, des Petites et Moyennes entreprises et de l'Economie sociale et solidaire a également annoncé étudier les voies et moyens d'un assouplissement des règles de déréférencement de ces plateformes, au niveau national comme européen. [1] Règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques [2] Telle que prévue à l'article L.521-3-1 du Code de la consommation

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