Question de M. BLANC Grégory (Maine-et-Loire - GEST) publiée le 25/09/2025
M. Grégory Blanc appelle l'attention de M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice sur la situation dramatique qui règne actuellement à la maison d'arrêt du Pré-Pigeon, à Angers, où la surpopulation carcérale atteint des niveaux intolérables.
Pour rappel, cette maison d'arrêt conçue pour 216 détenus, ainsi que 12 arrivants et 38 personnes en semi-liberté, accueillait à l'été 2025 près de trois fois plus de détenus, rendant le climat explosif.
Le report permanent du projet de construction d'un nouveau centre pénitencier inter-régional à Loire-Authion ne peut justifier l'absence d'investissement au sein de l'établissement. Ainsi les conditions d'hygiène de ces bâtiments, construit en 1856, demeurent déplorables. Le tribunal administratif a d'ailleurs condamné l'État. Surtout, faute de modulaires sanitaires suffisants, le nombre de prisonniers entrant pour des faits liés à des addictions et sortant sans avoir vu un seul soignant est en augmentation permanente, du fait à la fois de la surpopulation carcérale et de la rotation plus importante des prisonniers du fait de l'augmentation des courtes peines.
En 2024 à Angers, il y a eu 543 demande de rendez-vous médical pour seulement 381 exécutés, contre 439 demandes pour 360 réalisés en 2021, soit un doublement des détenus non suivis.
Concrètement, pour cet établissement de 216 places, 99 détenus sont sortis sans avoir rencontré le moindre médecin.
Dit autrement, les personnes entrent en prison pour des problèmes d'alcool et de drogue et ressortent avec les mêmes problèmes générant une augmentation des récidives.
Aussi, il souhaite savoir quand et comment l'État compte enfin installer un modulaire supplémentaire afin de pouvoir accueillir le personnel médical et permettre d'assurer une prise en charge des prisonniers malades.
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Transmise au Ministère de la justice
Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'intérieur publiée le 05/11/2025
Réponse apportée en séance publique le 04/11/2025
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, auteur de la question n° 715, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Grégory Blanc. Madame la ministre, la situation actuelle de la maison d'arrêt du Pré-Pigeon, à Angers, est inquiétante.
Pour rappel, cette prison, construite en 1856 et conçue pour 216 détenus, 12 arrivants et 38 personnes en semi-liberté, accueillait à l'été 2025 près de trois fois plus de détenus, ce qui a créé un cocktail explosif.
Le report permanent du projet de construction d'un nouveau centre pénitencier à Loire-Authion ne peut justifier l'absence d'investissements au sein de l'établissement. Les conditions d'hygiène y sont déplorables. Le tribunal administratif a d'ailleurs condamné l'État, en septembre dernier, à réaliser des travaux dans cette maison d'arrêt.
Surtout, faute de bâtiments modulaires sanitaires suffisants, le nombre de prisonniers entrant pour des faits liés à des addictions et sortant sans avoir vu un seul soignant est en augmentation permanente. Cette tendance s'explique non seulement par la surpopulation carcérale, mais aussi par la rotation de plus en plus importante des prisonniers du fait de politiques pénales visant à favoriser l'emprisonnement pour de courtes peines.
Concrètement, pour cet établissement de 216 places, 99 détenus sont sortis sans avoir rencontré le moindre médecin et le nombre de détenus n'ayant fait l'objet d'aucun suivi a doublé entre 2021 et 2024. En clair, les personnes entrent en prison pour des problèmes d'alcool et de drogue et en ressortent avec encore plus de problèmes, ce qui entraîne, de fait, une multiplication des récidives.
Aussi, madame la ministre, quand l'État compte-t-il enfin installer un bâtiment modulaire supplémentaire pour accueillir le personnel médical qui assurera une prise en charge des prisonniers souffrant d'addictions ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Grégory Blanc, vous soulignez l'importance d'une bonne collaboration entre les services de l'administration pénitentiaire et le corps médical.
Sachez que les personnels pénitentiaires redoublent continuellement d'efforts pour assurer l'effectivité de l'accès aux soins des détenus.
Vous m'interrogez plus particulièrement sur la situation de la maison d'arrêt d'Angers et sur l'installation d'un bâtiment modulaire sanitaire pour renforcer la prise en charge des troubles addictifs de la population pénale, dans le contexte de surpopulation carcérale que vous décrivez.
Au 1er septembre 2025, 503 personnes détenues étaient écrouées à la maison d'arrêt d'Angers pour une capacité opérationnelle de 266 places. Toutefois, les services oeuvrent à améliorer la situation. En effet, depuis le mois de septembre et jusqu'au mois de janvier 2026, la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) de Rennes procède au transfert d'une trentaine de personnes détenues vers d'autres établissements. En complément, la DISP sensibilise les services judiciaires à la possibilité de recourir aux placements extérieurs.
Concernant les conditions matérielles de détention et l'ordonnance en référé rendue le 12 septembre 2025 par le tribunal administratif de Nantes, je précise que l'absence de bâtiments modulaires sanitaires suffisants n'a pas été mentionnée par les associations requérantes ni par le juge administratif. L'administration pénitentiaire a été enjointe à prendre des mesures, notamment pour renforcer le cloisonnement des sanitaires, ce qu'elle a fait. Plus encore, le tribunal considère que l'accès des personnes détenues aux soins est assuré de façon satisfaisante au sein de la maison d'arrêt.
Pour autant, il est vrai que l'unité sanitaire de l'établissement manque de locaux et de place. La direction de l'administration pénitentiaire, en lien avec la direction générale de l'offre de soins (DGOS) et la délégation au numérique en santé (DNS), a donc lancé un appel à projets en avril 2025 en vue d'encourager le déploiement de nouvelles solutions. Dans ce cadre, un projet de nouveaux bâtiments modulaires sanitaires a été présenté par la DISP de Rennes, l'agence régionale de santé (ARS) et le centre hospitalier d'Angers.
Par ailleurs, l'Association ligérienne d'addictologie, qui intervient au sein de la maison d'arrêt, a recruté un nouvel intervenant, ce qui devrait contribuer à une réduction des délais de prise en charge des personnes incarcérées souffrant de problèmes d'addiction.
Enfin, les procédures préalables à l'implantation d'un nouvel établissement se poursuivent, et des garanties quant à sa future construction seront apportées dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2026.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour la réplique.
M. Grégory Blanc. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse et des précisions que vous serez susceptible d'apporter ultérieurement.
Cela étant, il est assez paradoxal que le ministre de la justice répète, sur un ton quasi martial, qu'il est nécessaire de systématiser l'emprisonnement ferme pour les courtes peines, alors que notre appareil pénitentiaire n'est pas conçu pour accueillir davantage de détenus.
Il n'est pas normal que des hommes et des femmes souffrant de problèmes d'addiction, notamment à l'alcool, soient incarcérés pour des faits de violences conjugales, par exemple,...
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Grégory Blanc. ... et puissent ressortir de prison sans avoir fait l'objet du moindre suivi.
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